Face à des ruptures « alarmantes » de médicaments jugés essentiels, les autorités sanitaires ont sanctionné par une amende des laboratoires pharmaceutiques pour ne pas avoir maintenu des stocks suffisants, une solution jugée « non pérenne » par Biogaran, l'un des plus touchés.
L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a été amenée à « prononcer des sanctions financières à l’encontre de 11 laboratoires pharmaceutiques, pour un montant total de près de 8 millions d’euros », a-t-elle déclaré dans un communiqué.
Ces sanctions s'inscrivent dans un contexte où la loi a été durcie ces dernières années envers les groupes pharmaceutiques afin de renforcer leurs obligations en matière de stocks de médicaments.
Alors que les pénuries de médicaments s'aggravent d'année en année, depuis septembre 2021, la loi prévoit que les médicaments dits d'intérêt thérapeutique majeur (MITM) disposent d'un stock de sécurité de quatre mois minimum s'ils ont fait l’objet de ruptures ou risques de rupture réguliers au cours des deux années précédentes. Ce stock est de deux mois pour les autres MITM.
Plus de 700 médicaments concernés
Ces médicaments sont ceux pour lesquels une interruption de traitement peut mettre en danger la vie du patient à court ou moyen terme.
Quelque 748 médicaments sont désormais concernés par cette mesure, contre 422 en 2021.
« On a une situation qui est particulièrement alarmante […], inédite » en 2023, « avec plus de 5 000 ruptures de médicaments déclarées, c'est 30 % de plus qu'en 2022, c'est six fois plus qu'en 2018 », a fait valoir mardi 24 septembre sur France info Alexandre de La Volpilière, le directeur général de l'ANSM.
Les sanctions annoncées mardi, et qui correspondent à des manquements constatés en 2023, sont sans précédent. Au titre de 2022, à peine plus de 500 000 euros de sanctions avaient été décrétées. Cette fois, une trentaine de références sont concernées et couvrent un large spectre thérapeutique.
L’augmentation significative du nombre de ces médicaments est liée à la progression constante des déclarations de rupture ou risque de rupture entre les périodes 2018-2019 et 2021-2022 (respectivement 2 098 et 5 921 déclarations reçues), précise encore l’ANSM par voie de presse.
Les génériqueurs les plus sanctionnés
« Les manquements identifiés concernent par exemple les anti-hypertenseurs, des anti-cancéreux, des anti-microbiens, des médicaments en neurologie », a expliqué à l'AFP Alexandre de La Volpilière. Selon lui, aucune classe n'est épargnée.
« Sur les laboratoires, les principaux sont Biogaran, Sandoz, Viatris : les plus grosses sanctions concernent des médicaments génériques, ce qui correspond aux principales ruptures d'approvisionnement qu'on a pu constater ces dernières années », a-t-il ajouté. L'une des plus grosses sanctions touche par exemple Biogaran, géant français des génériques, pour des stocks insuffisants d'une molécule contre l'hypertension, l'irbesartan.
« Le prononcé de telles sanctions et la montée en puissance de la sévérité de leur appréciation ne peuvent constituer une solution pérenne aux problématiques des ruptures de stocks et sont au contraire de nature à amplifier les déséquilibres structurels du marché des médicaments génériques », a réagi le laboratoire, leader français du médicament générique et filiale du laboratoire Servier, fustigeant la « ligne de conduite très dure des autorités ».
Biogaran assure avoir été en mesure d'assurer l’approvisionnement continu du marché. Selon le fabricant de génériques, « il ne paraît pas pertinent de considérer qu’un stock de sécurité doive être maintenu coûte que coûte ».
Ces annonces ont à l'inverse été favorablement accueillies par les associations de patients, inquiètes de l'aggravation des pénuries de traitements.
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