Les entreprises du médicament (Leem) ont officialisé ce mardi 4 juin le lancement d’une campagne de communication a l’intention des médecins généralistes afin de les sensibiliser au bon usage du médicament. En clair : prière d’avoir la main un peu moins lourde sur la prescription. En parallèle, les industriels du secteur vont déployer à partir de juin une deuxième campagne grand public. Coût global de l’opération : deux millions d’euros.
« Nous avons un enjeu objectif de réduction de la prescription, a appuyé ce mardi Thierry Hulot, président du Leem. Car nos médicaments sont réellement efficaces uniquement lorsqu’ils sont bien pris. Je rappelle que les interactions médicamenteuses conduisent chaque année 200 000 personnes à l’hôpital et sont à l’origine d’une dizaine de milliers de décès prématurés. »
Éviter de dépasser le nombre de cinq médicaments différents pour un même patient
Le plan du Leem pour 2024 se concentre sur la polymédication des personnes âgées de plus de 65 ans, particulièrement exposées au risque des survenues d’événements indésirables graves. L’objectif de cette campagne est d’optimiser les prescriptions pour éviter, quand cela est possible, de dépasser le nombre de cinq médicaments différents pour un même patient.
Même si les spécialistes ne sont pas les derniers à surprescrire, le Leem a décidé de sensibiliser essentiellement les médecins généralistes à la sobriété médicamenteuse par l’envoi de 125 000 newsletters ciblées et, à partir de septembre, par de la formation en ligne (webcast, podcast). Vidal est son partenaire sur cette opération.
Mauvais plis
Surtout, les industriels vont prendre part aux logiciels d’aide à la prescription (LAP) de 22 000 médecins généralistes. Concrètement, le syndicat patronal financera un dispositif de notifications qui apparaîtront au moment de la prescription chaque fois que le médecin aura en face de lui un patient « polymédiqué » de plus de 65 ans. Le message suggérera au généraliste de « réviser l’ordonnance ». Le Leem l’assure : son intervention se résume à financer la manœuvre, pas à s’immiscer dans le contenu de l’ordonnance.
Le Pr Paul Frappé, président du collège de médecine générale (CMG), confirme lui aussi être « interpellé » par la place centrale de l’ordonnance dans la consultation médicale, dans l’esprit des patients mais aussi dans les habitudes et les « mauvais plis » des praticiens. Le Stéphanois rappelle les résultats de l’étude Ecogen de 2014, qui a passé au crible 20 000 consultations de généralistes. En moyenne, le patient arrive au cabinet avec 2,6 motifs. La demande de médicaments est le premier d’entre eux ! À la sortie, 80 % des consultations donnent lieu à une prescription alors que l’examen clinique n’est effectué que dans 75 % des cas. Au Pays Bas, le stylo se promène sur l’ordonnance uniquement dans 43 % des consultations, rappelle le Pr Frappé.
300 millions d’euros d’économies ?
Outre l’enjeu de santé publique, l’intérêt de cette campagne est aussi économique. Le Leem espère dégager 300 millions d’euros pour 2024. Il mènera une offensive similaire en 2025 et 2026, cette fois-ci sur la prescription inappropriée d’antibiotiques (avec en creux la lutte contre l’antibiorésistance) puis sur le « gaspillage » de médicaments côté praticiens (prescription par le médecin, dispense par le pharmacien) et côté patients.
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