Une équipe pousse le développement d'embryoïdes humains à partir de cellules souches jusqu'à 14 jours

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Publié le 07/09/2023

Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Les chercheurs de l'Institut Weizmann des sciences en Israël annoncent avoir développé des structures similaires à l'embryon humain - « embryoïdes » -, à partir de cellules souches embryonnaires humaines non modifiées génétiquement, permettant d'observer jusqu'aux 14 premiers jours de grossesse. Comprendre les mécanismes encore mystérieux de cette période laisse espérer notamment une meilleure prévention et gestion des échecs et fausses couches précoces.

Ces travaux, publiés ce 6 septembre dans Nature, s'inscrivent dans un contexte de compétition internationale dans l'espoir de développer des embryoïdes humains, c'est-à-dire des assemblages de cellules qui visent à reproduire le fonctionnement et le développement d'un embryon, sans avoir eu besoin d'aucune fécondation. Deux équipes sont particulièrement avancées : celle de la chercheuse Magdalena Zernicka-Goetz, au Royaume-Uni, et celle de son collègue Jacob Hanna, en Israël. En 2022, les deux avaient déjà publié à quelques semaines d'intervalle des articles scientifiques détaillant comment leurs équipes avaient créé les premiers simili-embryons de souris. Le scénario se reproduit en 2023, autour d'embryoïdes humains.

Cellules non modifiées génétiquement

Dans ce nouvel article, l'équipe de Jacob Hanna insiste sur la proximité de leurs embryoïdes (avec vésicule vitelline et cavité amniotique) avec les embryons humains - enjeu de taille pour développer la recherche sur les fausses couches, les malformations génitales et la stérilité.

Les auteurs soulignent ainsi que les cellules souches embryonnaires humaines naïves (très pluripotentes) sur lesquelles ils travaillent n'ont pas été génétiquement modifiées - contrairement aux travaux de l'équipe britannique. Selon Jacob Hanna, les amas cellulaires décrits par sa collègue Magdalena Zernicka-Goetz sont loin d'être assez développés et différenciés pour être comparés à des embryons

« Les modèles embryonnaires humains de notre équipe, issus de cellules souches structurées selon une telle morphogenèse, récapitulent l'organisation de presque toutes les lignées et compartiments connus des embryons humains post-implantation, y compris l'épiblaste, l'hypoblaste, le mésoderme extra-embryonnaire et le trophoblaste entourant les dernières couches » lit-on.

Par ailleurs, ces modèles « miment une dynamique de croissance semblable aux principales caractéristiques de l'embryogenèse au stade post-implantatoire jusqu'à 13-14 jours après la fécondation », est-il expliqué. Cela ouvre une fenêtre sur la formation du disque embryonnaire, la rupture de symétrie antéro-postérieure ou encore le sac vitellin polarisé avec l'endoderme viscéral et pariétal. À noter, la durée de 14 jours est la limite légale pour ce genre de recherches dans beaucoup de pays (dont la France, depuis la dernière révision de 2021 de la loi de bioéthique).

La structure créée « semble produire tous les différents types de cellules qui forment les tissus à ce stade précoce du développement », commente James Briscoe, de l'Institut Francis-Crick, à Londres.

« Quelle année excitante pour l'embryologie ! Cette étude s'ajoute à six autres sur des simili-embryons humains. Aucun ne reproduit complètement le développement humain, mais chacun d'eux contribue à son étude expérimentale », a réagi Magdalena Zernicka-Goetz.

Questions éthiques

Ces recherches ne manquent pas de soulever des questions éthiques. Les chercheurs insistent sur le fait que les structures créées ne devaient pas être considérées comme des embryons humains. Elles y « ressemblent fortement, mais ne sont pas identiques », a indiqué l'étude. Plus largement, le terme « embryons de synthèse » est réfuté par la communauté scientifique : d'une part, ces structures ne peuvent se développer en un fœtus viable, d'autre part, elles nécessitent de partir de cellules réelles, n'ayant rien de « synthétiques ».

Ceci étant, un consensus émerge pour réclamer un encadrement robuste de ces recherches en laboratoire sur les modèles embryonnaires humains.


Source : lequotidiendumedecin.fr