L'UE va renouveler l'autorisation du glyphosate pour 10 ans

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Publié le 16/11/2023

Crédit photo : GARO/PHANIE

La Commission européenne a annoncé ce 16 novembre qu'elle allait renouveler l'autorisation du glyphosate dans l'UE pour 10 ans, à la suite d'un vote des États membres qui a ouvert la voie à cette décision sur cet herbicide controversé.

À l’appui de sa décision, l'exécutif européen met en avant le rapport d'un régulateur européen, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), estimant que le niveau de risque ne justifiait pas d'interdire le glyphosate.

L'autorisation actuelle du glyphosate dans l'UE, renouvelée en 2017 pour cinq ans puis étendue d'une année supplémentaire, expire le 15 décembre. En l'absence de majorité au sein des 27, il revenait à la Commission de trancher.

Certaines conditions et restrictions

« La Commission, en collaboration avec les États membres de l'UE, va maintenant procéder au renouvellement de l'approbation du glyphosate pour une période de dix ans, sous réserve de certaines nouvelles conditions et restrictions », indique-t-elle dans un communiqué.

Elle prévoit quelques garde-fous et interdit l'usage de cette substance pour la dessiccation (épandage pour sécher une culture avant récolte).

Le glyphosate, substance active de plusieurs herbicides - dont le Roundup de Monsanto (Bayer), très largement utilisé dans le monde - avait été classé en 2015 comme « cancérogène probable » par le Centre international de recherche sur le cancer de l'Organisation mondiale de la santé. Une expertise Inserm sur les pesticides en 2021 a conclu à l’existence d’un risque accru de lymphome non hodgkinien avec un niveau de présomption « moyenne » de lien avec l’exposition professionnelle. En France, le lien de causalité entre malformations congénitales et glyphosate a été reconnu possible, le premier patient indemnisé ayant décidé de s'exprimer début octobre dans l'espoir de peser sur le vote.

France et Allemagne s'abstiennent

À l’inverse, en juillet, l'EFSA a indiqué n'avoir pas identifié de « domaine de préoccupation critique » chez les humains, les animaux et l'environnement susceptible d'empêcher l'autorisation de l'herbicide, tout en reconnaissant un manque de données.

Le groupe allemand Bayer, qui a acquis Monsanto en 2018, s'est réjoui de l'annonce de la Commission. « Cette nouvelle autorisation nous permet de continuer à fournir aux agriculteurs de toute l’Union européenne une technologie importante pour la lutte intégrée contre les mauvaises herbes », a déclaré un porte-parole.

Comme lors d'un premier vote le 13 octobre, la majorité qualifiée requise pour valider ou rejeter la proposition de la Commission - soit 15 États sur 27, représentant au moins 65 % de la population européenne - n'a pas été atteinte.

Sept pays, dont la France - première puissance agricole de l'UE -, l'Allemagne et l'Italie, se sont abstenus, selon des sources diplomatiques, tandis que 17 ont voté pour et trois s'y sont opposés (dont le Luxembourg).

Mercredi 13 novembre, le ministre français de l'Agriculture Marc Fesneau avait répété qu'une interdiction totale de l'herbicide n'était « pas possible » à l'heure actuelle faute d'alternative pour les agriculteurs.

« Il faut reconnaître qu'il y a des usages pour lesquels nous sommes aujourd'hui dans une impasse. On continuera à défendre au niveau européen la volonté de réduire l'usage du glyphosate et en même temps de prendre acte des situations d'impasse dans lesquelles nous nous trouvons », avait-il déclaré devant le Sénat.

Pour les ONG Foodwatch et Générations futures, « cette position est une trahison, sans surprise, de la promesse faite par le président de la République (Emmanuel Macron) en 2017 ». Elles estiment que le renouvellement de l'autorisation « va à nouveau à l'encontre du principe de précaution alors que les preuves de la dangerosité du glyphosate pour l'homme et pour l’environnement continuent de s'accumuler ».

Même si la substance active est approuvée au niveau de l'UE, chaque État reste chargé d'autoriser les produits contenant du glyphosate - et pourrait donc adopter des restrictions selon les spécificités locales et effets potentiels sur l'environnement, dans le cadre des critères fixés par Bruxelles.

I.D. avec AFP

Source : lequotidiendumedecin.fr