La progression de la campagne de vaccination permettra-t-elle d’éviter un nouveau rebond de l’épidémie de Covid-19 à l’automne ? Pour Pr Jean-François Delfraissy, la réponse est non : le président du Conseil scientifique a affirmé ce matin sur France Inter qu’il s’attendait à une quatrième vague à l’automne. Une prévision corroborée par l’Institut Pasteur, qui vient de publier de nouvelles modélisations de la circulation du SARS-CoV-2.
Alors que la campagne de vaccination progresse mais sans doute pas à un rythme permettant d’atteindre une couverture quasi-compète de la population avant l’automne, la question de son impact à court ou moyen terme sur la circulation du virus se pose. Si, pour les chercheurs de l’Institut Pasteur, seule une couverture très élevée des adolescents et des adultes pourrait permettre d’éliminer le virus en l’absence d’autres mesures de contrôle, la vaccination partielle devrait toutefois modifier l’épidémiologie du SARS-CoV-2. Reste toutefois à savoir à quel point.
Pour y voir plus clair, les chercheurs ont examiné un scénario sans mesure de contrôle (distanciation physique, gestes barrières, port du masque) et avec un nombre de reproduction de base R0 du variant dominant égal à 4. Et ce en formulant l’hypothèse qu’à la rentrée, 30 % des 12-17 ans, 70 % des 18-59 ans et 90 % des plus de 60 ans auront reçu deux doses de vaccin.
Un pic quantitativement proche de celui de l’automne dernier
Résultat : « dans notre scénario de référence, […] un pic d’hospitalisations similaire au pic de l’automne 2020 pourrait être observé », rapportent les auteurs. De fait, les modélisations anticipent un pic d’environ 2 500 nouvelles hospitalisations par jour.
Mais au-delà de ce pic quantitativement proche de celui enregistré l’année dernière, l’épidémiologie du SARS-CoV-2 devrait changer drastiquement sous l’effet de la vaccination. Ainsi, l’âge des personnes hospitalisées pourrait être modifié. « Alors que 74 % des hospitalisations survenaient chez les plus de 60 ans avant la vaccination, il est attendu que cette proportion chute à 52 % », prévoient les auteurs. Corollaire : la proportion d'adultes de moins de 60 ans hospitalisés devrait augmenter de 15 %.
Contribution disproportionnée des non vaccinés
Cependant, un des conclusions les plus saillantes de la modélisation concerne sans doute le rôle « disproportionné » que pourraient jouer à l’avenir les personnes non vaccinées. Et ce d’abord vis-à-vis de la pression hospitalière. Par exemple, les personnes non vaccinées de 60 ans, qui représenteraient 3 % de la population générale et 10 % de leur classe d’âge, pourraient être à l’origine de 35 % des hospitalisations et de 67 % de celles enregistrées dans leur classe d’âge. Mais aussi vis-à-vis de la circulation du virus. De fait, les personnes non vaccinées, soit 37 % de la population générale, pourraient être concernées par 75 % des infections et présenter un risque 12 fois plus élevé de transmettre le SARS-CoV-2 qu’une personne vaccinée.
À noter que les auteurs semblent s’inquiéter particulièrement de la contribution future des adolescents et des enfants à l’épidémie. « Du fait d’une couverture vaccinale faible, les enfants et adolescents représentent à peu près la moitié des infections [et des transmissions] alors qu’ils couvrent seulement 22 % de la population », résument-ils.
Un rebond épidémique contrôlable
Et ces prévisions plutôt mauvaises pourraient être sous-estimées. Car le R0 du virus pourrait, à l'automne et en l'absence de mesures de contrôle, dépasser 4 pour s’approcher plutôt de 7 sous l’effet du remplacement du variant alpha par le variant delta.
Toutefois, les auteurs ne semblent pas alarmistes. Pour eux, en effet, « du fait de la vaccination, l’effort nécessaire pour contrôler un rebond épidémique devrait être nettement moindre que pendant la période pré-vaccinale ». Par exemple, tester à un rythme hebdomadaire 50 % des non vaccinés de plus de 12 ans pourrait réduire le pic d’environ 30 %. Voire de près de 90 % si ces 50 % de non vaccinés acceptaient de se faire vacciner au lieu de se faire tester régulièrement.
Ces modélisations soulèvent néanmoins des questions sociales et éthiques qui, pour les auteurs, « doivent être discutées ». De fait, d’après ce travail, « les mesures non pharmaceutiques ont un impact similaire si elles sont appliquées à l’ensemble de la population ou aux personnes non-vaccinées uniquement ». Autrement dit, « le fait que les personnes vaccinées adhèrent à ces mesures présente peu de bénéfices supplémentaires ». Faudra-t-il donc soumettre uniquement les non vaccinés à une distanciation sociale contraignante ?
Cancer colorectal chez les plus de 70 ans : quels bénéfices à une prise en charge gériatrique en périopératoire ?
Un traitement court de 6 ou 9 mois efficace contre la tuberculose multirésistante
Regret post-vasectomie : la vasovasostomie, une alternative à l’AMP
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce