Après avoir publié un avis en juin dernier sur la nécessité de repérer les usages d’alcool à risques, le conseil scientifique du CNGE poursuit son engagement dans la lutte contre l’alcoolisme en se prononçant en faveur d’une prise en charge thérapeutique conforme aux données de la science.
Pour le Collège, le repérage de l’usage d’alcool à risque « est justifié par la mortalité attribuable à cette drogue ». Avec 41 000 décès/an estimés, l’alcool est en effet la deuxième cause de mortalité évitable après le tabac en France. En 2017, 10 % des Français étaient usagers quotidiens et 35 % des adultes au moins une alcoolisation ponctuelle importante au cours de l’année écoulée.
Les critères d’une consommation à faible risque ont quant à eux, été revus à la baisse : pas plus de 2 verres par jour, au maximum 10 verres par semaine, avec au moins un jour sans alcool dans la semaine.
Dans l’avis publié ce mardi par le CNGE, les outils thérapeutiques recensés et disponibles en médecine générale sont l’entretien motivationnel (EM) les thérapies cognitivocomportementales et les médicaments.
Faible efficacité des approches psychothérapeutiques en soins primaires
Ainsi, selon l'analyse de ces spécialistes en médecine générale, l’entretien motivationnel a montré une efficacité à court terme sur les consommations de substances comparativement à l’absence d’intervention.
Concernant l’approche cognitivocomportementale, on disposerait de trop peu de données spécifiques aux psychothérapies proposées par un médecin généraliste pour conclure sur leur bénéfice en soins primaires.
Des approches médicamenteuses insuffisamment documentées
Quant aux médicaments, l’effet de l’acamprosate et de la naltrexone est faible en termes de pertinence clinique. L’efficacité de l’acamprosate est supérieure au placebo pour la reprise d’un usage d’alcool et la durée cumulée d’abstinence (7,5 ans vs 6,7 pour le placebo) dans une méta-analyse de 24 essais randomisés en double insu. Celle de la naltrexone est supérieure au placebo sur la diminution du risque d’alcoolisation importante et sur le nombre de jours (-4 %) avec consommation d’alcool dans une méta-analyse de 40 essais cliniques randomisés en double insu.
Le disulfirame n’a pas montré d’efficacité vs placebo dans une méta-analyse d’essais cliniques en double insu.
Les essais cliniques randomisés en double insu vs placebo sont trop peu nombreux pour affirmer l’efficacité du nalméfène (méta-analyse de 5 essais : efficacité limitée sur la diminution du nombre de jours mensuels avec consommation d’alcool à risque).
La récente stratégie qui prône une réduction de la consommation d’alcool comme objectif thérapeutique permet à certains patients de s’inscrire dans un projet de soins. Dans cette indication, l’efficacité du nalméfène semble très faible (différence moyenne du nombre de jours mensuels avec consommation d’alcool à risque à 1 an = 1,6 jour/mois). Il existe trop peu de données pour la naltrexone et l’acamprosate prescrits cette indication.
Accompagner le patient sur le long cours
Au final, le comité scientifique du CNGE insiste sur le manque d’évaluations des interventions pharmacologiques et non pharmacologiques en soins premiers. Ces approches thérapeutiques présentent « de faibles niveaux de preuves avec une efficacité dans tous les cas, très modestes ». Sans grande surprise, ces spécialistes en médecine générale recommandent « un accompagnement au long cours et une approche centrée sur le patient (…) en négociant des objectifs fixés par le patient ». Une bonne collaboration interprofessionnelle peut être associée à un meilleur accès aux soins et à des taux d’abstinence plus élevés à 6 mois.
Un avis spécifique pour le baclofène
Quant au baclofène qui a récemment obtenu son AMM chez l'adulte dans la réduction de la consommation d'alcool, en complément d'un suivi psychosocial et après échec des autres traitements, le conseil scientifique précise qu’il publiera un prochain avis sur l’efficacité et la tolérance de ce médicament.
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