« Prenez rendez-vous avec un praticien certifié en médecines douces », promet la plateforme Médoucine, créée en 2016. Naturopathie, acupuncture, ostéopathie, sophrologie ou auriculothérapie : 2 000 thérapeutes sont référencés sur le site de prise de rendez-vous, équivalent alternatif de Doctolib. Mais début septembre, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) l'a épinglé pour « pratiques commerciales trompeuses ». En effet, l’entreprise qui l'exploite, Goodmoon, fait « l'objet d'une mesure d'injonction » de la part de la Direction départementale de la protection des populations de Seine-et-Marne afin qu’elle cesse ses pratiques contraires au Code de la consommation.
Cette mesure de police administrative « est un élément à charge dans une procédure pénale », explique au « Quotidien » la DGCCRF. Si l’entreprise ne modifie pas ses pratiques, elle s’expose à des sanctions. « De fait, le délit de pratique commerciale trompeuse est sanctionné d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 300 000 euros », rappelle plus généralement la répression des fraudes.
Cette injonction intervient quelques semaines à peine après que Doctolib a été accusé de faire de la promotion de certaines pratiques médicales douteuses, en référençant, entre autres, des naturopathes.
⚠️Pratiques commerciales trompeuses : le site internet https://t.co/jBqE5c79N9, exploité par la SAS GOODMOON, fait l'objet d'une injonction de la DDPP de Seine-et-Marne
— DGCCRF (@dgccrf) September 6, 2022
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Acupuncture dans le viseur
La procédure à l’encontre de Médoucine se base sur deux motifs. Premièrement, selon la DGCCRF, la plateforme diffuse « des allégations sur son site laissant croire aux utilisateurs de la plateforme que l'exercice de l'acupuncture peut être réalisé par des professionnels autres que ceux listés » par le Code de la santé publique. En effet, seuls les médecins, les sages-femmes et les chirurgiens-dentistes peuvent pratiquer l'acupuncture.
Secondo, la DGCCRF reproche à Médoucine d’inscrire dans son réseau des thérapeutes « ne disposant pas des qualifications requises conformément à l'article L. 4161-1 du Code de santé publique » (celui qui définit l'exercice illégal de la médecine), tout en « en alléguant sur le site à ses utilisateurs le référencement de "praticiens de confiance" ».
La plateforme réagit
Pour se mettre en conformité, Médoucine doit donc changer le contenu de son site. Contactée par le « Quotidien », la plateforme affirmait mercredi avoir déjà « modifié la page d’information sur l’acupuncture du site » pour coller aux demandes de la DGCCRF et « rajouté mention de la jurisprudence qui considère cette pratique comme réservée aux professionnels médicaux ». Médoucine met toutefois en avant « un flou réglementaire » autour du statut d’acupuncteur en France - « il est possible tout à fait officiellement de se former à l’acupuncture sans être médecin », rappelle-t-elle - mais affirme avoir « fait preuve de diligence vis-à-vis des autorités pour éviter tout risque de confusion du public ». De fait, à ce jour, la requête « acupuncture » à Paris ou à Strasbourg dans la barre de recherche du site n'aboutit plus et renvoie à des praticiens en « énergétique traditionnelle chinoise ».
« Le dernier point de mise en conformité sur lequel nous travaillons vise à supprimer des fiches des praticiens non-médecins toute allégation qui porterait à croire qu’ils pourraient proposer de l’acupuncture à leurs clients », ajoutait hier Médoucine, qui précise que ces « fiches étant sous la responsabilité des professionnels, c’est à eux de faire les modifications qui s'avéreraient nécessaires ». Après avoir informé ses clients, la plateforme affirme qu'elle supprimera après un certain délai « tous les profils que l’on pourrait repérer de praticiens qui mentionneraient encore une pratique de l’acupuncture ».
« Annuaire douteux »
Avec 30 000 prises de rendez-vous revendiquées par Médoucine chaque mois, l’entreprise met aussi en avant des bénéfices commerciaux pour ses clients praticiens, selon l’hebdomadaire « Marianne ». Elle « propose un abonnement à 119 euros par mois (comptez aussi 250 euros de frais d’inscription) à tous les praticiens qu'elle référence », détaille l’hebdo. Sur son site, la plateforme met également à disposition de ses clients des guides et formations pour booster leur visibilité ou « perfectionner l’art de la vente quand on est thérapeute ». En décembre 2021, l’Union nationale des associations de défense des familles et de l’Individu victimes de sectes dénonçait déjà un « annuaire douteux ».
À l’inverse, Médoucine continue pour sa part de mettre en avant la rigueur du référencement de ses thérapeutes et dit « pouvoir collaborer avec les pouvoirs publics pour éviter de rejeter de nombreux praticiens dans une ombre où les dérives pourraient justement s’épanouir ».
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