« Dans sa forme actuelle, qui est celle de servir de documentation, le DME contribue à un surcroît de travail cognitif, à des relations tendues entre le patient et le médecin et au surmenage », déclarent dans un point de vue à paraître dans « The Lancet » (1) les Dr Stephen Martin de l’université de médecine de Harvard et le Dr Christine Sinsky de l’American Medical Association (AMA), à Chicago.
Une complexité stupéfiante
La réglementation fédérale, qui existe depuis 1995, avait été considérée dès le début comme étant « d’une complexité stupéfiante, sans rapport avec les soins aux patients », indique le Dr Martin au « Quotidien », citant un éditorial paru en 1998, dans le « New England Journal of Medicine ». Le DME n’a fait qu’intensifier le problème. Les Dr Martin, Sinsky et d’autres se plaignent que le DME a été conçu essentiellement pour satisfaire les experts-comptables et non pour le soin des patients. Selon eux, le DME contient une quantité énorme d’informations inutiles pour la décision clinique. Il réduit le temps consacré au patient et il isole le médecin qui s’appuie sur des communications fragmentées au lieu de passer du temps à discuter des problèmes avec son équipe.
Le Dr Martin ajoute : « Décrire les soins prend plus de temps que les délivrer. Certains médecins doivent finir leurs notes pendant le week-end. Cela a conduit des étudiants en médecine à se détourner de certaines voies, comme celle de la médecine générale, où le praticien peut avoir à gérer des cas compliqués mettant en jeu de multiples conditions chroniques. »
Dans une perspective publiée dans le « JAMA » le 15 août, Nigam Shah et les Dr Donna Zulman et Abraham Verghese de l’université de Stanford, en Californie, constatent également que : « Les effets spectaculaires de l’informatique (…) ne se retrouvent pas » non plus dans le DME. Pourquoi ne pas s’inspirer de l’industrie aéronautique pour limiter les alertes aux événements critiques ou qui mettent la vie en danger, suggèrent-ils, par exemple, et pourquoi ne pas utiliser des logiciels qui transformeraient la surcharge d’informations en données graphiques simples ?
Introduire des facteurs sociaux et comportementaux
Les auteurs des deux articles demandent également la possibilité d’introduire dans le DME des facteurs sociaux et comportementaux lorsque ceux-ci sont importants pour le traitement et son résultat. En attendant, suggère l’équipe de Stanford, « supprimer le DME pourrait activement améliorer le soin porté aux patients dans de nombreux scénarios cliniques ». Alors que, depuis 2015, « l’administration sanitaire promet de récompenser la qualité des soins plutôt que la quantité, conclut le Dr Martin, cela crée une occasion unique de réévaluer la structure, la fonction et le rôle du DME. Moins, c’est plus. Il est temps de séparer l’essentiel, ce qui peut servir (au diagnostic} et à la communication, de tout ce qui a trait à la responsabilité professionnelle et légale, la facturation et la recherche ».
(1) Article sous presse
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