Agnès Buzyn a affirmé lundi vouloir « aller vers une tarification à la qualité et au parcours de soins, y compris en médecine de ville, c'est-à-dire [...] ne pas continuer à financer la totalité des actes en ville », notamment pour les soins des maladies chroniques. Ces propos confirment ceux du Premier ministre Édouard Philippe, la semaine dernière, lors de la présentation du plan de transformation du système de santé.
« Aujourd'hui, nous tarifons des actes, quel que soit leur intérêt pour le malade. Ce qui est utile aux malades, y compris en médecine de ville, ça va être donc des tarifications par parcours où les professionnels de ville ou de l'hôpital vont avoir chacun une part de cette rémunération », a argumenté la ministre de la Santé dans « L'Épreuve de vérité » sur Public Sénat, en partenariat avec l'AFP, « les Échos » et Radio classique.
Tarifer autrement les maladies chroniques
Est-ce une étape vers la fin du paiement à l'acte chez le médecin généraliste ? Agnès Buzyn s'en est défendu, en rappelant que « le paiement à l'acte est utile pour toutes les consultations aiguës », par exemple « quand vous avez la grippe ».
« Mais chez quelqu'un qui a un diabète, qui va vivre avec son diabète vingt ans, dont on sait que chaque année, il doit avoir x consultations, x examens de sang, une consultation chez un podologue, chez un cardiologue, chez un ophtalmo, on peut imaginer tarifer au parcours, par exemple sur les maladies chroniques », a-t-elle énuméré. « Nous avons prévu de commencer sur les ALD et il n'est évidemment pas question de revenir complètement sur le paiement à l'acte, nous savons à quel point les médecins (y) sont attachés », a-t-elle tranché, alors que des leaders syndicaux ont manifesté leur vive inquiétude à ce sujet, au premier rang desquels le Syndicat des médecins libéraux (SML).
Selon la ministre de la Santé, une telle réforme du financement des soins éviterait des disparités de pratique. « On a quatre fois plus de césariennes dans une région que dans une autre, trois fois plus de retraits des amygdales [...] : on se rend bien compte que ces disparités pratiques cachent quelque part des inégalités d'accès aux soins », a-t-elle détaillé.
Le terrain est miné mais Agnès Buzyn a assuré que ces réformes des modes de rémunération « ne se feront pas sans les médecins ». « C'est à eux de déterminer ce qui est un parcours de qualité pour un malade, ça n'est pas à l'administration de choisir comment soigner un diabétique », a-t-elle encore précisé.
Grand décollage promis pour le DMP en 2018
Après 14 ans d'atermoiements, la ministre de la Santé a assuré dans la même émission que le dossier médical partagé (DMP) décollerait enfin cette année. « Le dossier médical partagé est enfin opérationnel, il y a aujourd'hui plus d'un million de dossiers ouverts dans des régions expérimentales, et il pourrait être totalement déployé d'ici à la fin de l'année 2018 par l'Assurance-maladie », a déclaré la ministre.
La généralisation de cet outil permettra des « économies », en soulignant que « beaucoup d'actes sont refaits entre la ville et l'hôpital, tout simplement parce que le médecin de ville ne récupère pas la radio, le scanner… ».
Même pas peur des lobbies
S'agissant enfin des pressions de tous bords qu'elle subit, Agnès Buzyn, a admis que « les lobbies sont partout », mais « ils ne [lui] font pas très peur ». « Quand on travaille dans le champ de l'environnement, nous savons très bien qu'il y a des lobbies ; dans le champ des comportements, il y a d'autres lobbies ; dans le champ des vaccins, ce sont encore d'autres lobbies qui s'expriment, pas forcément des lobbies industriels, mais d'autres », a-t-elle égrené.
Au sujet de ses priorités en matière de prévention de l'alcool, du tabac ou des produits alimentaires ultra-transformés, mis en cause par une récente étude qui les considère cancérogènes, Agnès Buzyn s'est refusée à hiérarchiser les angles d'attaque. « Je pense que la prévention, à tous les âges de la vie, dans tous les milieux et quel que soit l'enjeu, c'est vraiment un pari que nous faisons sur l'avenir, de façon à réduire les dépenses de santé », a expliqué la ministre, estimant que « nous [étions] très bons sur les soins mais très mauvais sur la prévention ».
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