Dans son rapport annuel, la Cour des comptes formule plusieurs recommandations pour développer les services publics numériques en santé, domaine qu'elle juge en progrès mais avec des résultats très inégaux ou trop timides. Ces outils regroupent notamment les téléservices de l'assurance-maladie, le dossier médical partagé (DMP), la messagerie sécurisée de santé et, au-delà, l'écosystème lié aux données de santé.
Boîte aux lettres et coquilles vides
Les échanges numériques en santé ont été encadrés en 2002 afin de sécuriser les communications professionnels. Fin novembre 2017, 78 % des généralistes libéraux et seulement 42 % des spécialistes disposaient d'une messagerie sécurisée. Afin d'assurer l'interopérabilité entre ces outils, l'Agence des systèmes d'information partagés de santé (ASIP) a mis sur les rails fin 2016 sa propre messagerie sécurisée – la MS Santé – pour un coût de 11,4 millions d'euros fin 2016. Le bilan de cet espace national d'échange (qui réunit des services de messagerie électronique souvent privés) se révèle mitigé.
Seulement 900 établissements et 53 000 « boîtes aux lettres » ont été raccordés à la MS Santé en avril 2017. Un bilan « trop limité » par rapport à l'importance du nombre de professionnels et établissement de soins, tranche la Cour. À cela s'ajoute, les 70 000 utilisateurs du service privé Apycript, plus ancien, dont le raccordement à l'espace national d'échange est « encore en chantier ».
DMP, attentisme coûteux
Les sages de la rue Cambon ne sont guère plus cléments avec le dossier médical personnel puis partagé (DMP). L'ex-dossier médical personnel (DMP), instauré en 2004 mais rendu accessible seulement en 2011, a rapidement abouti à des coûts considérables – 210 millions d'euros – pour seulement 158 000 dossiers créés en 2012 dont 89 500 coquilles vides ! Le déploiement avait donc été suspendu fin 2012, avant une période d'« attentisme coûteux », tacle la Cour.
Après cet échec, la gestion du DMP (désormais partagé) a été transférée à l'assurance-maladie en 2017. La Cour salue depuis une relance assortie de « premiers résultats non négligeables ». Depuis avril 2017, environ 10 000 dossiers par semaine ont été créés dans les neuf départements dans lesquels il a été déployé dans un premier temps. La création au travers des logiciels professionnels a fortement diminué et a été compensée, quantitativement, par la hausse des créations sur Internet et dans les caisses.
Points d'alerte cependant : la consultation de documents par les professionnels stagne. « L'entrée du DMP dans les usages des professionnels reste le principal enjeu », lit-on. Et l'ouverture du DMP conditionnée au consentement du patient « constitue une limitation à sa généralisation complète ».
Sécurité et interopérabilité insuffisantes
La dématérialisation des feuilles de soins est saluée par la Cour mais ses résultats restent incomplets. La proportion de FSE a grimpé (79 % en 2005, 86 % en 2009 et 95 % aujourd'hui soit 1,4 milliard de FSE par an), pour des gains d'efficience évalués à 1 485 équivalents temps plein (ETP) entre 2012 et 2016. « Le passage à 100 % de dématérialisation plus de 20 ans après la fixation de cet objectif n'est toujours pas atteint, la mise en place de pénalisations financières restant écartées par les pouvoirs publics », déplore la Cour. Autre essai à concrétiser : les avis d'arrêt de travail en ligne sont passé de 8 % à 22 % entre 2012 et 2016, ce qui laisse des « gains élevés encore à mobiliser ».
Pour les sages de la rue Cambon, l'enjeu de la sécurité doit être intégré de manière prioritaire au sein des chantiers numériques, ce qui n'est toujours pas le cas. Parmi les établissements publics de santé, un sur six ne dispose pas encore de politique de sécurité des systèmes d'information, pointe l'institution.
L'interopérabilité entre services numériques (libéraux et hospitaliers) reste en partie lacunaire », regrette la Cour. « Les données doivent pouvoir être transmises depuis le logiciel hospitalier comme un logiciel professionnel de santé libéral et traitées de manière à permettre le suivi de chaque patient dans l'évolution de ses prises en charge », peut-on lire.
Autre carence : l'absence de système unifié d'identité numérique des assurés entre le numéro de Sécurité sociale (NIR) pour la facturation, l'identifiant spécifique utilisé par les établissements, les projets de l'ASIP santé, etc. La loi de santé de 2016 a certes prévu l'utilisation du NIR comme identifiant national de santé unique... mais pas avant 2020.
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