Il y a du pain sur la planche pour clarifier et encadrer l'offre de téléconsultation en France. Me Maud Lambert, avocate counsel au sein du département « propriété intellectuelle et technologies de l’information » du cabinet Hoche Société d’Avocats a évoqué le relatif flou juridique qui caractérise cette pratique.
Confusion entre téléconsultation et téléconseil
Me Lambert souligne d'emblée la différence entre la téléconsultation (acte de télémédecine défini comme tel) et le téléconseil dans lequel s'engouffrent la majorité des plateformes d'intermédiation. La téléconsultation permet à un médecin de donner une consultation à distance à un patient. Un professionnel de santé peut être présent auprès du patient et, le cas échéant, assister le médecin. « Les entreprises choisissent plus facilement le téléconseil car les démarches pour faire de la téléconsultation sont compliquées. En revanche, elles ne fournissent que du conseil, ni soins, ni prescription », explique-t-elle.
Néanmoins, la frontière entre conseil et acte médical reste mal définie. En février 2016, l'Ordre des médecins s'est d'ailleurs prononcé en faveur de l'intégration du « téléconseil personnalisé » comme une forme particulière de téléconsultation dès lors que cette activité est clairement tracée dans le parcours de soins. Les syndicats de médecins libéraux souhaitent également une clarification. Le gouvernement travaille en ce sens.
Quelle responsabilité ?
Dans le cadre du téléconseil, Me Lambert souligne que le médecin « est responsable de tous les conseils qu'il donne ». Dans le cas de la télé expertise, seul « le médecin sollicité [pour faire le diagnostic] est le responsable ». En matière de télémédecine, une convention préalable avec l'ARS définit la responsabilité entre les acteurs. Il peut y avoir une « lourdeur juridique », confie Me Lambert. La procédure devrait être simplifiée. L'Ordre avait demandé de faire sortir la télémédecine (lorsqu'elle est pratiquée dans le parcours de soins) du régime de contractualisation avec l'ARS
Comment sont rémunérés les médecins ?
Le défaut d'encadrement a abouti à des situations diverses. En cas de téléconseil personnalisé, le patient paye le service, soit l'entreprise d'intermédiation mais ne rémunère en aucun cas directement le médecin. Le service étant hors parcours, il n'est pas remboursé par l'assurance-maladie obligatoire.
Le médecin, lui, est généralement rémunéré par l'entreprise ou l'assureur. Chez MedecinDirect, plateforme médicale spécialisée dans les téléconsultations téléphoniques, le médecin est rétribué à l'heure travaillée et non à l'acte. Dans le modèle AXA, proposant aux adhérents des téléconsultations téléphoniques dans leur contrat santé, le médecin est rémunéré par l'assureur.
Le paiement à l'acte concerne les téléconsultations médicales dans le cadre des expérimentations reconnues par la loi. « Elles ont été élargies récemment à toutes les régions de France et aux ALD. L'expérimentation vise à définir un modèle économique et a été prolongée d'une année », précise Me Lambert. Un avenant télémédecine est au menu des négociations conventionnelles.
Comment ces prestations sont-elles encadrées ?
Sur le papier, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) se réserve le droit de sanctionner les entreprises pratiquant une activité illégale. L'Ordre veille au grain sur le volet éthique dans un contexte d'ubérisation de la santé. Certains sites surfent avec la légalité : la plateforme induit le patient en erreur et entretient l'amalgame entre acte médicaux et téléconseils.
La société ZAVA implantée en Angleterre propose aux Français des téléconsultations et télé prescriptions limitées à quelques pathologies – directement envoyées aux pharmaciens dans l'Hexagone. Ces médecins généralistes et spécialistes sont inscrits à l'Ordre britannique. Est-ce légal ? « Le site est en français, dans la jurisprudence on considère que ce service est tourné vers les Français. Il doit donc respecter notre législation », explique l'avocate.
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