« On est complètement à la rue en France ! » Lors d'une table ronde organisée par la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP), Dominique Pon, directeur de la clinique Pasteur (Toulouse) a résumé sans fard le sentiment qui anime toujours nombre de professionnels du secteur à l'évocation de l'innovation en santé en France.
Beaucoup déplorent le manque d'investissement concret et durable des pouvoirs publics sur la e-santé, la robotique ou le big data. L'annonce de Marisol Touraine d'une stratégie nationale e-santé 2020, censée accompagner les acteurs dans le virage numérique, n'a pas calmé les esprits. « L'innovation est le parent pauvre de la politique de santé de ces cinq dernières années alors que cela devrait être au cœur de nos pratiques », juge Lamine Gharbi, président de la FHP.
Le principal frein à l'innovation en santé résulte d'un système toujours « très éclaté », selon Anne-Marie Brocas, présidente du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie (HCAAM). « Les innovations peinent à émerger à cause du cloisonnement des procédures d'évaluation des produits de santé », explique-t-elle. Le Pr Jean-Yves Fagon, délégué ministériel à l’innovation, ne sous-estime pas les « verrous » qui plongent les porteurs de projet dans une opacité déroutante et freinent l'émergence d'une coordination régionale et nationale.
Capitaux : sirènes étrangères
Régime des autorisations temporaires d'utilisation (ATU), fonds d'investissement régional (FIR), subventions publiques ou privés… Le financement épars des innovations thérapeutiques, des outils numériques et des nouveaux dispositifs médicaux bloquent aussi les bonnes volontés. Bertin Nahum, PDG du groupe Medtech, a mesuré la course d'obstacles. Figure emblématique de la « french tech' », le créateur du robot neurochirurgical ROSA déplore un « vrai problème » en France. Si les collectivités locales et l'État étaient bien présents au début de son aventure, en 2002, l'ingénieur regrette le manque d'implication dans la durée. « Faute de financement pour nous aider à devenir un acteur de taille mondiale, nous avons dû nous résoudre à céder notre société à un groupe américain cet été », indique-t-il.
Le Dr Guillaume Richalet, biologiste, a lui aussi ouvert les portes de son entreprise aux capitaux étrangers. Depuis 2008, le PDG de la clinique des Cèdres (Échirolles) mise sur l'innovation de pointe pour dynamiser l'activité de son établissement. L'achat d'un robot de diagnostic moléculaire en prévention du risque infectieux (maternité et orthopédie) puis d'un second appareil en urologie a entraîné un processus vertueux, attirant de nouveaux investisseurs. Mais le médecin a dû attendre 2016 pour obtenir un retour sur investissement. Le risque est élevé de disparaître avant. « L'innovation, c'est une course à l'armement très onéreuse. Pour y participer, il faut se ruiner… »
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