« Nos données personnelles valent de l'or ! », le nouveau numéro du magazine Cash Investigation, sera diffusé ce jeudi 20 mai sur France 2 (mais déja disponible). L’enquête s’attaque à la collecte et à l'utilisation des données de santé par le groupe américain Iqvia, leader mondial dans ce domaine.
En 2018, cette société a été autorisée par la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) à passer un partenariat avec les officines françaises pour récolter les données de délivrance et de vente de parapharmacie notamment. Un océan de data, stockées dans les entrepôts de la société.
Présent dans plus de 10 000 pharmacies françaises, Iqvia assure que les données saisies par le pharmacien sont « anonymisées » à deux reprises : une première fois dès la collecte chez le pharmacien, puis une seconde fois, via un tiers de confiance agréé. Iqvia indique n'avoir « accès qu'à deux informations personnelles du patient : le genre et l'âge ». « En 60 ans, aucun incident n’a jamais été déploré », plaide le groupe américain.
Pas de données nominatives, affirme Iqvia
À quelles fins sont utilisées ces données ? Il peut s'agir de consolider des études épidémiologiques, d'analyser le parcours du patient ou l’usage des médicaments en ville mais aussi de conduire des études de marché. Iqvia peut ainsi fournir des données de consommation médicamenteuse à des laboratoires ou à des instituts de recherche. Mais, affirme la société le 19 mai, Iqvia « ne cherche pas à obtenir de la donnée nominative sur les patients, qui ne présente pas d’intérêt pour nos activités » car « seul le comportement général de groupes de patients est pertinent, et en aucun cas les comportements individuels. »
Le code de la santé publique prévoit que les données de santé ne peuvent être utilisées que pour « des projets d’intérêt public ». Sans pour autant se concentrer uniquement sur des activités de recherche publique… « Le législateur n’a pas entendu créer de distinction entre les acteurs publics et les acteurs privés. Ils peuvent, les uns comme les autres, mettre en œuvre des entrepôts ou des projets de recherche présentant un caractère d’intérêt public. Il en va par exemple ainsi pour les recherches visant à permettre le développement de nouveaux médicaments (essais cliniques), une évaluation médico-économique des consommations ou une analyse des parcours de soins », précise la CNIL à l’occasion de la diffusion du magazine.
Mais le gendarme des données personnelles rappelle que ces données ne peuvent « en aucun cas être utilisées pour promouvoir commercialement des produits de santé, notamment en direction des professionnels de santé ».
Les pharmaciens épinglés
Quel intérêt pour une officine de partager les données de ses clients à Iqvia ? En contrepartie, la société fournit au pharmacien une étude de marché ciblée, regroupant les statistiques de vente de son rayon parapharmacie, des médicaments avec ou sans prescription médicale obligatoire, son panier moyen lors du passage en caisse, son taux de générique substitué, le nombre de vaccinations ou tests antigéniques…
« Les données issues des ventes permettent également aux représentants de la profession de se doter de données opposables à l’Assurance-maladie et à chaque panéliste de disposer d’un tableau de bord utile à la gestion de son officine », précise Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Interrogé par France 2, le président du syndicat majoritaire des pharmaciens, s’était étonné que, sur les 200 officines visitées par les journalistes, aucune ne mentionne d’information claire à destination de la clientèle sur la gestion des données personnelles. Or, « les pharmaciens d'officine sont chargés, contractuellement, d'informer individuellement leurs clients du traitement des données les concernant, ainsi que de permettre l'exercice des droits d'accès, de rectification et d'opposition qui leur sont reconnus », recadre la CNIL, ajoutant qu'elle « diligentera des contrôles ».
La possibilité d’effacer les données patient
Une affichette doit être visible dans l’officine, mentionnant le traitement de ces données médicales et le droit pour le patient de s’y opposer. C'est pourquoi les syndicats de pharmaciens rappellent à leurs adhérents l’obligation d’affichage. Un code-barre est fourni par Iqvia à chaque pharmacie partenaire pour permettre d’effacer toutes les données transmises par le patient dans le passé.
De facto, les données des prescripteurs peuvent également être collectées « en particulier leur numéro RPPS ou Adeli indirectement auprès des pharmacies d’officine partenaires par le biais d’un module d’extraction interfacé avec leur logiciel métier », précise Iqvia dans une notice à destination des médecins.
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