La convention citoyenne rentre dans les détails de l'aide active à mourir

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Publié le 20/03/2023

Crédit photo : Burger/Phanie

Comment exprimer une demande ? Quel accompagnement médical et psychologique du patient ? Comment réaliser, encadrer, contrôler l'acte ? Quel rôle du médecin ? La convention citoyenne sur la fin de vie a livré des propositions concrètes sur la mise en œuvre d'une aide active à mourir (AAM) à l'issue de son avant-dernière session de travail, ces 18 et 19 mars.

Les citoyens ont d'abord réaffirmé leur souhait de voir évoluer l'encadrement de la fin de vie, aujourd'hui précisé par la loi Leonetti-Claeys de 2016. Ainsi 75,6 % des 164 votants ont répondu « oui » à la question : « l’accès à l’aide active à mourir devrait-il être ouvert ? ». Ils sont 23,2 % à avoir répondu « non » et 1,2 % à s'être abstenus. Soit un pourcentage un peu plus important d'opposants qu'il y a un mois (19 %), lors d'un précédent vote. Ils confirment en parallèle leur volonté de mettre des conditions à cette ouverture (à plus de 70 %).

Pour un modèle mixte, suicide assisté et euthanasie

Mais qu'entendre par AAM ? C'est un scenario mixte, dans lequel les Français auraient le choix entre le suicide assisté ou l'euthanasie, qui recueille le plus de suffrages (près de 40 %). Vient ensuite un modèle d'ouverture du suicide assisté avec exception d’euthanasie (une notion proposée dès 2000 dans l'avis 63 du Comité consultatif national d'éthique), qui rallie plus de 28 % des votants.

Les modèles exclusifs semblent moins convaincre : 3 % des participants ont voté pour l'euthanasie seule, 10 % pour le suicide assisté seul. Et plus de 18 % ont rappelé leur opposition à l'AAM.

AAM en dernier recours

Les citoyens ont ensuite voté plusieurs propositions dessinant en six temps un parcours d'AAM, « solution à inscrire dans le cadre d'un accompagnement global, à coordonner notamment avec le parcours de soins palliatifs ».

D'abord, une pré-demande doit être effectuée auprès d'un médecin ou autre soignant ; puis après un certain délai, la demande officielle doit être exprimée auprès d'un médecin (généraliste ou spécialiste) et réitérée après un délai de réflexion et alors, formalisée à l'écrit et enregistrée. Le patient doit être à l'initiative de cette demande ; s'il est inconscient ou hors d'état de s'exprimer, elle peut être faite par la personne de confiance ou découler des directives anticipées (ouvertes via Ameli).

La personne doit bénéficier d'un accompagnement médical et psychologique dès la pré-demande, avec rendez-vous médicaux et suivi psy. Cet accompagnement doit être l'occasion d'informer le patient des étapes du processus et des conséquences de sa décision. Un accompagnement psychologique doit aussi être proposé au corps médical, et aux proches. Ces derniers ne doivent être impliqués que sur demande du patient, par ailleurs incité à les informer de sa démarche.

Avant validation de la demande, doit avoir lieu une évaluation du discernement, qui peut prendre en compte (sans que cela soit obligé) l'avis de la famille, des accompagnants, ou dans une demande de suicide assisté, des soignants. Il faut aussi s'assurer que l'AMM n'est proposée qu'en dernier recours, après avoir essayé toutes les options, tous les traitements et accompagnements.

L'évaluation repose sur une procédure collégiale et pluridisciplinaire (avec des soignants, mais aussi des professionnels du médicosocial ou de la justice) et le respect d’un certain nombre de critères, précisés dans un « modèle d’accès à l’AAM ».

Clause de conscience

Que ce soit pour un suicide assisté ou une euthanasie, le protocole impose la présence d'au moins un professionnel de santé. En cas de refus, les soignants peuvent faire valoir une clause de conscience et orienter la personne vers un professionnel volontaire - inscrit sur une liste transmise au patient.

Quand il s'agit d'un suicide assisté, l'acte est nécessairement réalisé par la personne elle-même. Celle-ci peut néanmoins choisir l'euthanasie sans refaire tout le parcours. Elle doit avoir le choix du lieu, ce qui vaut aussi pour le suicide assisté, et de la présence ou non des proches.

Enfin, les citoyens demandent la création d'une commission de contrôle, dès l'expression et tout au long du parcours, y compris a posteriori avec vérification du respect de la procédure pour chaque acte d'AAM.

Remise du document final le 2 avril

La Convention citoyenne restituera publiquement ses travaux lors de la dernière session, les 31 mars, 1er et 2 avril, et remettra un document final qui promet d'être nuancé à la Première ministre.

En attendant, les prises de position se multiplient. Ce 20 mars, ce sont 18 organisations de la société civile, dont l'Association pour le Droit de mourir dans la dignité (ADMD), l'Association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh), la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), et des mutuelles (MGEN, Mutuale, et la Fédération des mutuelles de France), qui signent un « pacte progressiste » pour que « chaque personne soit effectivement égale en droit et libre de ses choix ». Affichant leur volonté de dépasser l'opposition entre soins palliatifs et aide active à mourir, ces organisations demandent l'accès effectif au premier et la légalisation de la seconde pour « les personnes atteintes d’une maladie grave et incurable qui, en conscience et librement, la demanderaient ».


Source : lequotidiendumedecin.fr