Fortement régionalisé et principalement financé par les cotisations des assurés, le système autrichien associe un secteur hospitalier longtemps surdimensionné à un secteur libéral où cohabitent tarifs réglementés et honoraires libres. Le pays, qui compte 47 600 médecins pour 8,9 millions d’habitants, a connu depuis 2013 une longue série de réformes destinées à restaurer l’équilibre financier de ses comptes sociaux, mais l’avenir de la médecine libérale préoccupe beaucoup médecins et pouvoirs publics.
L’Autriche dispose de trois groupes de médecins libéraux : on trouve d’abord les médecins conventionnés stricto sensu, qui appliquent les tarifs négociés avec les caisses, gratuits pour les patients. Leur installation est soumise à l’octroi d’une autorisation, et ils suivent toutes les règles de l’assurance maladie, dont le principe de l’accès aux spécialistes via les médecins traitants. Viennent ensuite les « médecins de libre choix », autorisés à s’installer et à exercer sans restrictions, et qui fixent librement leurs honoraires : les patients sont remboursés sur la base de 80 % des honoraires pratiqués par les médecins conventionnés. Enfin, les médecins privés exercent, eux, sans aucune prise en charge des caisses publiques.
Les médecins conventionnés, souvent proches de la retraite et isolés, ont du mal à trouver des successeurs. Les plus jeunes, surtout spécialistes, préfèrent s’installer comme « médecins de libre choix », au point que ces derniers sont, désormais plus nombreux que les médecins conventionnés, le nombre de médecins privés restant lui relativement faible.
L’Ordre, qui mène, en Autriche, une large partie de la politique professionnelle des médecins, estime que le système des médecins de libre choix fonctionne très bien et ne pose pas de difficultés financières aux patients, car ils disposent majoritairement de complémentaires. Un point de vue contesté par certains responsables de la sécurité sociale et par les syndicats de salariés, qui souhaiteraient, eux, créer plus de licences de médecins conventionnés et limiter le nombre de médecins de libre choix.
Le problème est particulièrement criant à Vienne, où le nombre de conventionnés est en chute libre mais, estime l’Ordre régional viennois, c’est aussi parce que les budgets qui leur sont alloués sont trop limités : les patients ne veulent plus attendre qu’une consultation soit disponible et préfèrent aller voir des médecins de libre choix, même plus chers.
Le nouveau ministre a donné l'exemple
En 2010, quelques généralistes se sont lancés dans l’aventure des « Unités de soins primaires », en créant des cabinets de groupe facilement accessibles, avec des paramédicaux avec lesquels ils collaborent étroitement. D’abord expérimental, le modèle a été officialisé par une loi en 2017, et leur nombre devrait maintenant progresser d’autant plus vite que le généraliste fondateur en 2015 de la première PVE viennoise a été nommé ministre de la Santé en avril 2021. Militant vert de longue date, le Dr Wolfgang Mückstein a succédé au pied levé à un autre Vert, Rudolf Anschober, victime d’un burn-out en plein reconfinement.
Pour le Dr Mückstein, les PVE répondent à l’évolution des demandes des patients comme des attentes des médecins. Accessibles 50 heures par semaine avec ou sans rendez-vous et assurant des prestations médicales et sanitaires, les PVE travaillent au tarif conventionné et séduisent des jeunes médecins qui souhaitent mieux combiner leurs activités familiales et professionnelles et ne plus exercer seuls. À l’image, là aussi, des MSP françaises, les PVE associent médecins et paramédicaux autour d’un « projet de santé » et bénéficient d’un soutien financier des caisses. Leurs médecins restent toutefois des libéraux, ce qui inquiète l’Ordre : ils doivent en effet se constituer en société civile avec d’autres confrères pour ouvrir leur PVE, et abandonnent de fait leur « licence » d’exercice individuel, sans être certains d’en obtenir une autre s’ils quittent un jour la PVE.
En outre, l’Ordre estime que ces Unités sont trop administratives et « bureaucratiques » et milite pour le maintien des cabinets traditionnels, conventionnés ou de libre choix. « Il n’est pas question de les remettre en question, mais de combler les insuffisances actuelles, notamment dans les zones où il n’y a plus assez de généralistes », répond le Dr Mückstein, fier de ses chiffres : le nombre de PVE augmente et devrait atteindre les 75 à la fin de l’année, avec une répartition aussi bien urbaine que rurale.
Parallèlement, d’autres dossiers chauds attendent le ministre, alors que les dernières réformes ont du mal à passer. La fusion de toutes les caisses de maladie en une caisse unique, achevée en 2020, a été mal vécue par les médecins, qui estiment y avoir perdu une partie de leur indépendance. De même, le gouvernement a récemment confié aux autorités sanitaires régionales une partie de la formation spécialisée des médecins ainsi que les programmes de qualité qui étaient assurés jusque-là par ces derniers : les médecins ont protesté et manifesté en dénonçant « la mort de la liberté de la médecine ».
Beaucoup parmi les médecins voient dans les réformes en cours « la mort de la liberté de la médecine ».
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