Le gouvernement soigne la médecine de proximité

Bertrand entre dans le vif du sujet, les syndicats exigent du concret

Publié le 06/01/2011
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Crédit photo : S. toubon/« le quotidien »

LA COMMANDE est venue directement de l’Élysée. 2011 doit être une année de réconciliation avec la médecine libérale, un électorat jugé stratégique en vue l’élection présidentielle. Nommé au ministère de la Santé (en plus du Travail et de l’Emploi), Xavier Bertrand sait qu’il n’a que quelques mois pour « remettre de la confiance dans le système de santé » et obtenir des « résultats ».

La grande entreprise de réconciliation commence aujourd’hui avec une concertation centrée sur la médecine de proximité. Ce rendez-vous intervient quelques jours après l’entrée en vigueur au 1er janvier, après trois ans et demi d’attente, de l’augmentation de la consultation à 23 euros et du CS pour les médecins qualifiés spécialistes en médecine générale.

L’exécutif veut changer de braquet avec les médecins, envoyer des signaux forts. En fin de quinquennat, la logique n’est plus la même. Pas question de lancer un cycle interminable de discussions. La réunion du jour doit marquer les urgences. Au ministère de la Santé, on précise qu’il s’agit de faire le tri dans le volumineux rapport Hubert sur la médecine de proximité (quelles priorités ? Quels textes cela nécessite-t-il ?), d’avancer sur la simplification administrative mais aussi de compléter la future proposition de loi Fourcade chargée d’assouplir la loi Bachelot… Le sénateur UMP des Hauts-de-Seine sera d’ailleurs présent pour préciser quelle forme juridique prendront les maisons de santé.

Gestes.

Après la remise du rapport Hubert, le chef de l’Etat avait promis des actes lors d’une visite dans un pôle de santé à Orbec, en Basse-Normandie (Le Quotidien du 3 décembre). Les médecins souhaitent que les paroles se concrétisent. « Il semblerait qu’après quatre ans de surplace, on se remette enfin en mouvement », veut croire le Dr Michel Chassang, président de la CSMF. Les organisations invitées à la concertation ont été priées de communiquer un court document résumant leurs trois principales priorités. Difficile pour des syndicats qui ne sont pas avares de propositions! La Confédération et le SML se sont illustrées il y a quelques semaines en formulant...100 recommandations pour l’avenir de la médecine libérale. Pour Michel Chassang, le ministère de la Santé devra faire plusieurs gestes : « geler » les décrets sur le DPC, le développement professionnel continu, préciser les suites données au rapport Hubert (rémunération, statut du médecin libéral, protection sociale, surcharge administrative) mais aussi revoir la composition de la Conférence nationale de la Santé (CNS) en donnant plus de places aux libéraux. Surtout, « le ministère devra dire quels moyens seront dégagés pour mettre en œuvre tout celà », estime Michel Chassang.

Le Syndicat des médecins libéraux (SML) n’a pas attendu la réunion pour présenter les mesures qu’il juge primordiales. Pour apporter une réponse rapide et efficace aux problèmes de démographie médicale, le syndicat veut encourager la retraite active des praticiens libéraux, établir un compagnonnage entre tous les étudiants en médecine et des médecins installés volontaires et enfin à mettre en place une « régulation éclairée » de la démographie médicale. « D’ici à 2020, la moitié des 114 000 médecins libéraux pourraient faire valoir leurs droits à la retraite, souligne le Dr Christian Jeambrun, président du SML. Il faut rendre attractive la poursuite d’activité des praticiens de cette tranche d’âge ». « Au pas de charge où vont se dérouler les événements, nous aurons peu de temps pour formuler un catalogue de propositions, remarque le Dr Jean-Claude Régi, président de la Fédération des médecins de France (FMF). Je ne m’attends pas à des miracles mais à quelques mesures qui faciliteront la vie des médecins ».

Le Dr Claude Leicher, président de MG-France, espère pour sa part un « passage à l’acte » dans la mise en place de la rémunération forfaitaire. « La fonction de médecin traitant existe, il faut la rémunérer à sa juste valeur », souligne-t-il. Les représentants des plateaux techniques lourds tenteront également de faire bouger les lignes. « Souhaitons que 2011 permettra de résoudre la problématique de responsabilité civile professionnelle (RCP) spécifique à nos professions », affirme le Dr Philippe Cuq, président du BLOC.

Le Dr Stéphane Munck, président de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG), fait partie des jeunes médecins conviés à la réunion. Selon lui, l’opération devra apporter des réponses concrètes sur le chapitre de la formation en professionnalisant le cursus, en revalorisant les maîtres de stage et en allongeant le diplôme d’études spécialisées (DES) de médecine générale de 3 à 4 ans. Le jeune généraliste souhaite par ailleurs que les formalités d’installation soient simplifiées et que les regroupements de professionnels soient favorisés.

Les médecins ne sont pas dupes de l’attention ministérielle dont ils font l’objet. « Cette réunion est essentiellement une opération de communication en vue de 2012 », ironise un syndicaliste. 

 CYRILLE DUPUIS ET CHRISTOPHE GATTUSO

Source : Le Quotidien du Médecin: 8880