La réduction des inégalités sociales de santé, enjeu de la stratégie nationale de santé, a aussi été érigée en priorité du 3e plan cancer 2014-2019 dès son lancement par François Hollande en février 2014.
« Les femmes concernées par la mastectomie – 20 000 par an – font face à des dépenses importantes, parfois récurrentes, qui continuent à la pénaliser, même après leur guérison. Fragilisant d’autant plus les plus modestes et leurs familles, ces restes à charge creusent un peu plus les inégalités face au cancer », constate le Pr Jacqueline Godet, présidente de la Ligue contre le cancer, lors de la présentation du 4e rapport de l’Observatoire sociétal des cancers.
456 euros de reste à charge pour un tiers des femmes
L’intervention chirurgicale est prise en charge par l’Assurance-maladie à 100 % dans le cadre de l’affection longue durée (ALD). Mais d’autres frais ne sont pas systématiquement couverts comme le forfait hospitalier (ou les participations forfaitaires), certains médicaments et dispositifs médicaux, et les franchises médicales.
Surtout, une très grande majorité des femmes (5 sur 6) nécessite des soins supplémentaires après une mastectomie, selon l’enquête commandée par l’Observatoire à l’Institut BVA*.
Si 64 % des femmes interrogées n’ont pas eu à s’acquitter d’un reste à charge, un tiers (36 %) en déclare un, qui s’élève en moyenne à 456 euros. Parmi elles, 33 % ont eu des restes à charge pour les consultations de psychologues (566 euros), 25 % pour des séances de kinésithérapie (159 euros), et 70 % pour d’autres soins (329 euros) comme les frais à la pharmacie (183 euros), l’achat de prothèses amovibles, de soutiens-gorge adaptés ou de manchons (228 euros), ou le règlement des honoraires des professionnels de santé (404 euros).
1 391 euros de RAC en cas de reconstruction
Un quart des femmes ne souhaitent pas de reconstruction, un refus fréquent chez celles qui ont déjà eu une mastectomie il y a plus de 6 ans, et chez les plus de 60 ans. Elles sont 14 % à invoquer des raisons financières. Mais même sans reconstruction, 9 sur 10 déclarent un reste à charge annuel moyen de 256 euros, lié aux soutiens-gorge adaptés, aux prothèses amovibles, ou aux produits d’hygiène.
En cas de reconstruction chirurgicale, une femme sur deux fait état d’un RAC de 1 391 euros en moyenne, soit pour des frais liés à l’intervention elle-même (1 330 euros, dépassements d’honoraires des chirurgiens ou anesthésistes), soit pour des soins supplémentaires (574 euros).
Dans tous les cas, plus de la moitié des femmes (54 %) peinent à faire face à ces coûts. Pourtant, elles sont une minorité à chercher une négociation avec les médecins pour réduire les dépassements d’honoraires, 85 % évoquant de la gêne.
Le privé et les CLCC préférés
Les femmes se font opérer pour 34 % d’entre elles dans un hôpital ou une clinique privé(e), 31 %, dans un centre de lutte contre le cancer, ou 30 % dans un hôpital public. Une minorité (5 %) se fait opérer dans le secteur privé d’un hôpital public. Elles prennent leur décision sur les conseils du médecin traitant pour plus de la moitié d’entre elles, d’un proche, ou parce qu’elles connaissent déjà la structure. Les raisons financières interviennent dans le choix pour 7 % d’entre elles, les délais d’attente, pour 6 %, tout comme la réputation.
Pour la reconstruction, les femmes se dirigent plutôt vers le CLCC ou les établissements privés quand elle est immédiate, tandis que le public prend davantage en charge les opérations différées. Une femme sur trois change d’établissement entre la mastectomie et la reconstruction, qu’elles rechignent moins à faire dans des structures éloignées de leur domicile.
L’implant mammaire est la technique la plus utilisée (61 % des cas), devant la reconstruction par lambeau du muscle grand dorsal (37 %), par transfert de graisse (17 %), par lambeau abdominal libre (DIEP, 9 %) ou par lambeau du muscle grand droit de l’abdomen (TRAM, 4 %). Deux femmes sur dix ont eu le sentiment d’être mal informées sur la reconstruction, ce qui nourrie souvent du mécontentement à l’égard du résultat.
Une souffrance psychologique
La mastectomie est vécue par les femmes comme « une mutilation » ou une « perte ». Chaque personne vit différemment cette épreuve, de la colère à la résignation, influencée par la rapidité ou non de la prise de décision, son rapport à son corps et à l’image qu’elle se fait de la féminité, du discours médical qu’elle reçoit et entend, de son environnement. Certaines n’acceptent pas « d’être mutilées, amputées, de perdre leur féminité », éprouvent des craintes au sujet du regard d’autrui et du couple, tandis que d’autres considèrent la chirurgie comme une question de vie ou de mort, une libération, un soulagement, une nécessité.
La Ligue contre le cancer suggère de mettre en place un soutien psychologique à toutes les étapes du parcours de soin avec un forfait minimal de 10 séances dans un panier de soins remboursé par l’Assurance-maladie, de développer les dispositifs d’information accompagnés par des échanges et du partage d’expérience, et de mieux informer les femmes sur les leviers susceptibles de diminuer les restes à charge.
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier
Soumission chimique : l’Ordre des médecins réclame un meilleur remboursement des tests et des analyses de dépistage
Dans les coulisses d'un navire de l'ONG Mercy Ships