LE QUOTIDIEN : en grève aujourd’hui, vous ne ferez aucune consultation. Pour quelle raison ?
Dr GUY-ANDRE LOEUILLE : Je me bats contre une politique dont l’objectif premier est économique. C’est l’un des deux inconvénients majeurs de la loi HPST : la recherche d’économies, et l’avènement d’un superdirecteur à l’hôpital. Nicolas Sarkozy l’avait annoncé dans son discours ici même, à Dunkerque, en juin 2007. Je ne dirai donc pas que le contenu de la loi HPST me surprend. Je dirai même qu’il y a de bonnes choses dedans, notamment l’éducation thérapeutique, et l’amélioration de la répartition des praticiens sur le territoire. Mais la recherche d’économies avant tout ne peut que démotiver les praticiens hospitaliers. Nous sommes conscients du coût de la santé, mais nous ne voulons pas que notre première mission soit d’équilibrer les comptes de l’établissement. Ceux qui ont choisi le service public n’y trouvent plus leur compte aujourd’hui. Nous avons les inconvénients du public, sans les avantages du privé. En pédiatrie en particulier, les difficultés sont fortes : de nombreux postes sont vacants, la tarification à l’activité rémunère mal notre activité. Ça devient difficile de travailler correctement, alors que la demande augmente du fait de la disparition de la pédiatrie de ville.
Le mouvement sera-t-il très suivi à l’hôpital de Dunkerque ?
En octobre dernier, pour la défense de la retraite IRCANTEC, une soixantaine de médecins ont fait grève à Dunkerque, sur un total de cent. Cette fois, je ne m’attends pas à une forte mobilisation. À ma connaissance, avant-hier, une dizaine de médecins seulement avaient l’intention de faire grève. Il y a pourtant une grande inquiétude partagée sur ce qui se prépare, avec la loi HPST, mais les actions sont difficiles à mener en raison d’un défaitisme, d’un découragement que j’observe au sein du corps médical. Sans compter qu’une grève, c’est une perte sèche de salaire : ça retient les collègues. Le travail se reporte sur les autres, contraints de travailler dans les conditions du week end. Et puis nous ne sommes pas très à l’aise vis-à-vis des patients : même si nous ne nous battons pas pour nous, mais pour la qualité des soins, nous faisons quand même figure de privilégiés.
La suspension du codage des actes, décidée par plusieurs syndicats médicaux début février, est-elle suivie dans votre hôpital ?
Nous nous sommes réunis en assemblée générale il y a quinze jours à ce sujet, mais nous étions à peine 15 médecins : le quorum n’a pas été atteint. L’idée était pourtant intéressante : puisqu’une grève des soins passe inaperçue en raison du maintien de la continuité des soins, le fait de paralyser financièrement l’hôpital, en plein débat sur la loi HPST, nous aurait permis de faire pression sur l’Assemblée nationale. J’y étais favorable. Mais nous avons renoncé au mouvement car nous n’avons pas souhaité mettre notre hôpital en difficulté : notre direction nous a dit qu’on allait se tirer une balle dans le pied avec cette grève.
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