Combien de patients avez-vous traités par la phagothérapie à titre compassionnel au centre hospitalier de Villeneuve Saint Georges (CHIV) ?
Depuis le début des années 2000, on a traité 5-6 patients en impasse thérapeutique au CHIV. On a d'abord adressé le premier patient à l'hôpital militaire de la Reine Astrid à Bruxelles. Puis il y a eu plusieurs demandes rapprochées sur 3-4 ans à partir de 2008 : des infections ostéoarticulaires, une otite à Staphylocoque récidivante ou encore une plaque abdominale. Nous avons limité ensuite les cas, car une structure publique ne peut pas s'engager davantage en l'absence de cadre légal. Les produits utilisés qui viennent de Géorgie ou de Russie ne coûtent rien mais ne sont pas autorisés en France. Cela entraîne d'ailleurs un tourisme médical. Des gens sont partis en Géorgie à l'Institut de Phagothérapie de Tbilissi se faire soigner, d'autres se sont auto-traités en France avec des produits importés, comme ce jeune patient atteint de mucoviscidose pour des réinfections pulmonaires.
La phagothérapie a été utilisée dans ses débuts dans les infections à staphylocoque et certaines infections digestives. Aujourd'hui, quelles en seraient les indications préférentielles ?
Les situations d'impasse thérapeutique, en cas de contre-indication ou de résistance aux antibiotiques, sont prioritaires. Les applications sont nombreuses : pneumonies récidivantes du sujet ventilé en réanimation, les fasciites nécrosantes, les mucoviscidoses multitraitées, les pieds diabétiques multitraités, les brûlures surinfectées, les infections urinaires, etc. Mais il y a une autre indication très intéressante : la lutte contre les biofilms. Cette propriété permettrait de traiter une infection ostéo-articulaire sur prothèse en laissant le matériel prothétique en place, quelle que soit l'antibiosensibilité de la bactérie en cause. Il y a de grandes économies à la clef mais cela demande à être réévalué.
Contrairement aux antibiotiques dont certains ont un spectre très large, les phages agissent spécifiquement contre certaines bactéries. Quel est l'intérêt des cocktails de phages ? Quelle place au traitement personnalisé ?
Les cocktails de phages comportent un nombre limité de phages, tous dirigés contre la même espèce mais actifs sur différentes souches, les plus fréquemment rencontrées dans une situation donnée, par exemple contre différentes souches de staphylocoque dans les infections ostéo-articulaires (essai PHOSA). Cela permet d'éviter les résistances. C'est du prêt-à-utiliser mais il faut pouvoir traiter au coup par coup, par exemple dans les infections à Acinetobacter. Ces traitements personnalisés ne peuvent s'envisager sans une banque de phages.
Quelles mesures prioritaires proposez-vous pour relancer la phagothérapie en France et en Europe ?
Aujourd'hui, les grandes banques de phages se trouvent dans les pays de l'est, en Géorgie et en Pologne. Il est urgent d'en créer en France et/ou en Europe, à proximité d'un système de production, pour que les phages soient identifiés, caractérisés et prêts à être utilisés. Pour l'instant, il existe un seul site de production en France avec la société Phérécydes. Mais elle n'est autorisée pour l'instant qu'à des fins de recherche. Autre mesure, comme pour les maladies rares, la création de centre national de référence permettrait de coordonner les efforts. En attendant, l'association Phago 2020 va remplir des missions d'expertise et d'aide à la décision des tutelles. Il faut pouvoir traiter le plus vite possible via des ATU de cohorte et des dossiers communs, y compris avec des produits géorgiens et russes.
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