Auditionné par les députés de la commission d'enquête sur l'impact, la gestion et les conséquences de l'épidémie de Covid-19, l'ancien Premier ministre Édouard Philippe a défendu, pendant près de 3 heures, son action à la tête du gouvernement pendant la crise sanitaire, qui a permis selon lui « de sauver des vies ».
Le ton grave, pesant ses mots, le maire du Havre a tout d'abord reconnu certains dysfonctionnements. « Parmi les choses qui n'ont pas bien fonctionné (...) j'ai été frappé et heurté qu'on n'arrive pas à avoir un débat public ordonné autour des questions médicales et scientifiques », a-t-il regretté, faisant état d'une « invective violente et permanente ». « Comment avoir une expertise reconnue et légitime avec une parole sur laquelle on peut se fonder ? Notre système ne l'a pas permis », a déploré Édouard Philippe.
Plus de curare
Faisant preuve d'humilité, l'ex-chef du gouvernement a longuement partagé ses états d'âme, rappelant qu'il avait dû en permanence « concilier », voire osciller « entre de mauvaises décisions ». Il a confié avoir eu de « vraies angoisses » lorsqu'une pénurie de curare s'est déclarée dans les établissements, en raison de très longs séjours en réanimation de patients Covid. « Quand un directeur d'hôpital vous dit que dans 36 heures il n'a plus de curare, mais que son service de réanimation est plein, vous n'êtes pas exactement détendu », a indiqué Édouard Philippe.
Et lorsqu'il a fallu interdire les visites dans les établissements pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), il l'a fait « la mort dans l'âme ». « Il y avait un risque de glissement évident. Mais est-ce qu'on pouvait ne pas prendre cette décision ? Face à la marée qui arrivait ? Je ne crois pas », ajoute-t-il.
En porte-à-faux sur les masques
L'ancien locataire de Matignon a été interrogé sur la tenue des élections municipales, le 15 mars 2020, deux jours avant le début du confinement généralisé. « Je ne crois pas que l'on puisse modifier la date des élections comme ça dans une démocratie, à moins d'un consensus politique et scientifique. Or de consensus il n'y avait pas », s'est défendu Édouard Philippe pour justifier sa décision de maintenir ces élections.
Concernant les masques, l’une des grandes failles de la gestion de cette première vague épidémique, il a assuré qu'il n'avait pas connaissance du document de Santé publique France préconisant de renouveler le stock stratégique d'État, alors à 117 millions de masques juste avant la crise. « J'ai posé la question, on m'a dit qu'on avait 117 millions de masques en stock, qu'on en consommait 5 millions par semaine en milieu hospitalier, et qu'on en importe de Chine, sachant que la France en produit 4 millions. On me dit "ça devrait aller", sauf qu'ensuite la consommation passe à 40 millions par semaine et on n'arrive plus à s'approvisionner », relate Édouard Philippe. L'objectif a ensuite été de fournir les soignants dans la durée, souligne-t-il.
Toujours sur les masques, l'élu normand a reconnu des « erreurs de communication », notamment lors d'un JT de 13 heures sur TF1, où il a dit que le port du masque en population générale ne servait à rien. « Je l’ai dit avec assurance parce que des médecins me l’ont dit. Aujourd’hui la doctrine a changé, je vois bien le porte-à-faux sur lequel je suis », a-t-il concédé.
Édouard Philippe a pris la défense de l'ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn, un « grand médecin » dont il a soutenu la décision début mars de quitter son poste pour se présenter aux élections municipales. « Je ne critiquerai jamais personne du fait d’une candidature à une élection, a-t-il assuré, c'est utile d'avoir un enracinement électoral. »
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