DE NOTRE CORRESPONDANT
À L’ACCUEIL DES URGENCES du centre hospitalier de Fougères (Ille-et-Vilaine) ou dans la salle d’attente, ni affiches ni tracts revendicatifs. Les trois personnes patientant en cette fin de matinée ne sont d’ailleurs au courant de rien. La grève nationale lancée par l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF) ? Aucune d’entre elles n’en a entendu parler. Elles seraient venues le lundi 1er décembre, au moins auraient-elles pu voir les brassards que portaient les sept médecins du service, officiellement grévistes, comme la grande majorité des urgentistes du département - excepté Saint-Malo et le SAMU 35 (1).
Mais en grève le premier jour du mouvement national par « solidarité », selon le Dr Didier Marchand, responsable des urgences, les sept médecins de Fougères n’ont pas poursuivi. « Nous avons ici un fonctionnement particulier, qui repose sur une franche latitude que la direction nous laisse pour nous organiser, explique Didier Marchand. Nous sommes donc plutôt dans la pondération. En Bretagne, très peu de services fonctionnent avec un temps médical continu de 48 heures. On ne revendique pas de travailler 48 heures. On travaille déjà plus que dix demi-journées. Les demi-journées en plus nous sont payées en heures supplémentaires. Notre priorité, c’est la qualité du travail et la sécurité. »
Toutes les spécialités enrôlées.
Mélange lié à la fois à l’évolution historique du service et à l’implication du Dr Didier Marchand, aux urgences depuis 15 ans, l’organisation locale est en effet très originale. Elle repose notamment sur l’intégration complète des urgences dans l’hôpital, qui se traduit par son décloisonnement. « Nous avons souhaité avoir deux médecins la nuit, souligne Didier Marchand, également président de CME. Nous devions passer d’un effectif de 6,5 équivalents temps plein de médecins urgentistes à un effectif de 14. Pour ce faire, nous sollicitons les autres médecins de l’établissement, quelle que soit leur spécialité. C’est désormais un prérequis pour tout médecin embauché. Par exemple, depuis la reprise il y a cinq ans des activités de la clinique privée par l’hôpital, les médecins de l’ancienne clinique participent au tour de gardes. Ce principe est bien entendu adapté au fonctionnement de chacun des services. Outre la présence de deux médecins la nuit, ce système permet de décloisonner les urgences, de faciliter le transfert des patients, de partager nos connaissances… » Une unité d’hospitalisation de courte durée de huit lits gérée par les urgentistes eux-mêmes facilite la gestion des passages aux urgences.
Parallèlement à l’accueil spécifique réservé aux enfants grâce à la construction de nouveaux locaux il y a plus de deux ans et à la création de trois boxes pédiatriques à côté des six boxes adultes, une mutualisation des moyens est décidée avec la pédiatrie. En journée, des puéricultrices assurent ainsi une permanence aux urgences.
En 2006 toujours, un pôle Urgences-Réanimation-Mère et Enfant est constitué. Le Dr Didier Marchand en est le responsable. Là encore, c’est la complémentarité qui prime. Même chose avec l’ouverture d’une maison médicale de gardes accolée aux Urgences. « Nous avons pu ainsi mutualiser le secrétariat d’accueil jusqu’à minuit et sept jours sur sept, se réjouit le Dr Didier Marchand. Cette proximité permet aux médecins libéraux de venir nous saluer quand ils prennent leur garde. Et puis, un patient peut être réorienté, dans un sens comme dans l’autre. »
Résultat de ce contexte de travail : l’équipe des urgentistes est pérenne. Les sept médecins ont effectué une partie de leur cursus au sein du service. Et, avec environ 22 500 patients reçus en 2007 - un chiffre stabilisé depuis trois ans - et le dispositif mis en place, le travail se fait dans de « bonnes conditions de sécurité et de sérénité », selon le chef de service. « Grâce aux deux médecins de nuit, quand nous arrivons le matin, en général, il n’y a pas du monde partout dans les couloirs et, grâce aussi aux trois médecins urgentistes présents la journée, nous arrivons à assurer un bon turn over dans les boxes », souligne ce dernier. Alors, avant l’argument salarial, l’équipe de Fougères entend surtout garantir son organisation actuelle. « On pourrait nous dire : revoyons le principe de la présence de trois médecins la journée, de deux médecins la nuit… Vu le contexte, on est dans la pondération. »
(1) Selon le responsable de l’AMUF en Bretagne, le Dr Mohamed Saidini, le mouvement était au début du mois très bien suivi en Ille-et-Vilaine et dans les Côtes-d’Armor (80 % des services en grève) et très peu suivi dans le Morbihan et le Finistère (20 %).
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