LE QUOTIDIEN : Les tarifs hospitaliers pour 2017 sont tombés, en baisse de 0,9 % pour le secteur public. Quelle est votre réaction ?
FRÉDÉRIC VALLETOUX : Quelques jours avant l'annonce de la campagne tarifaire, les offreurs de soins hospitaliers (FHF, FHP, FEHAP et UNICANCER) ont formé un front uni inédit pour dénoncer la forte contrainte financière en passe d'être décidée.
Tout en comprenant la nécessité d'économies, nous avons alerté le ministère de la Santé sur le risque d'étranglement quand on serre le garrot trop fort. Si les arbitrages définitifs sont moins défavorables que prévu, nos tarifs baissent malgré tout de 0,9 % [contre 1 % en 2016, NDLR]. Cette décision maintient les hôpitaux dans la difficulté ! Certes, notre objectif de dépenses a augmenté [de 2 %, NDLR], mais le diable se cache dans les détails. Marisol Touraine se vante d'un financement des missions d'intérêt général (MIGAC) à la hausse [+3,1 %] en oubliant de préciser que le périmètre de l'enveloppe a changé. C'est pourquoi la FHF et les conférences représentatives des commissions médicales d'établissements (CME) et des directeurs ont formé un second front hospitalier public et lui ont réclamé un entretien.
Pourquoi l'hôpital va-t-il aussi mal ?
Des nouvelles mesures catégorielles décidées sans aucun financement ont dégradé le quotidien déjà précaire d'organisations fragilisées et de personnels en burn-out.
Le protocole Lebranchu sur les parcours, les carrières et les rémunérations coûte, à terme, 1,7 milliard d'euros par an aux hôpitaux. L'augmentation du point d'indice de la fonction publique représente un effort de 700 millions d'euros et l'accord sur le temps de travail des urgentistes 90 millions d'euros. Nous étions à l'équilibre en 2012. Cinq ans plus tard, le déficit des hôpitaux s'élève à 800 millions d'euros. Dans ce contexte, ce n'est pas étonnant que les hospitaliers descendent dans la rue pour réclamer plus de respect de la part des pouvoirs publics.
Les établissements peuvent-ils construire sereinement les groupements hospitaliers de territoire ?
Les hôpitaux oscillent aujourd'hui entre inquiétude et incompréhension sur la mise en œuvre d'une réforme à laquelle nous sommes favorables. Chaque GHT a eu douze mois pour définir son projet médical, que les tutelles réclameront le 1er juillet. C'est une étape vers l'ouverture à la ville et au secteur privé, véritable intérêt de la réforme.
Mais à ce stade, je tire la sonnette d'alarme si nous voulons sauver les GHT. Les hôpitaux conçoivent leur projet médical après avoir défini leur périmètre d'action, pour beaucoup très mal ajusté. On a placé la charrue avant les bœufs. Livrés à eux-mêmes, les établissements subissent des procédures complexes sur la politique d'achat ou la mutualisation des services d'information. Le syndicat des managers publics de santé (SMPS) a dénoncé à juste titre ce manque d'accompagnement. Certaines agences régionales de santé imposent aux forceps leur vision à des directeurs et des médecins hospitaliers. J'en ai fait les frais, puisque l'hôpital de Fontainebleau, ville que je dirige, est l'établissement principal du GHT Sud de la Seine-et-Marne sans en être le support. Un petit cadeau empoisonné à l'attention du président de la FHF…
Quel regard portez-vous sur la campagne présidentielle ?
Nous avons envoyé à tous les candidats notre plateforme politique de propositions. Nous attendons leur réponse. En 2012, personne ne se souciait de l'hôpital. En 2017, c'est tout le contraire. Mais au-delà des slogans de campagne, les programmes santé manquent de concret. Que propose exactement François Fillon sur les 35 heures et sur les baisses d'effectifs à l'hôpital ? Que veut financer Emmanuel Macron avec cinq milliards d'euros ? Quelle politique Benoît Hamon veut-il mener pour en finir des déserts médicaux ? Comme les Français, nous attendons des précisions.
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