Guyane : une semaine après l'accord, le monde de la santé reste sur la défensive

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Publié le 02/05/2017
centre hospitalier Andrée Rosemont

centre hospitalier Andrée Rosemont
Crédit photo : AFP

Le monde de la santé guyanais reste circonspect après l'accord thématique entre le gouvernement et le pôle santé du collectif « Pou Lagwiyann Dékolé ». Cet accord, signé vendredi 21 avril, prévoit 90 millions consacrés à la santé, sur le 1,1 milliard d'aides accordé au département d'outre mer.

Selon le texte produit par le groupe de travail santé, dont le « Quotidien » a eu copie, le plan prévoit 5 millions pour le plan de rattrapage handicap de l'Ouest Guyanais, 40 millions d'euros pour le développement et la modernisation du centre hospitalier Andrée Rosemont (CHAR) de Cayenne, 20 millions supplémentaires pour régler les fournisseurs du CHAR et 25 millions pour renforcer le centre hospitalier de l'ouest guyanais (CHOG), de même qu'un prêt de 25 millions supplémentaire pour ce même centre.

L'accord entérine par ailleurs l'abandon du projet de cession du centre médico-chirurgical de Kourou (CMCK) qui avait cristallisé le mécontentement au début de la crise. Le CMCK deviendra un établissement public avant le 31 décembre 2017 et développera de nouvelles spécialités. L'accord prévoit d'ailleurs le maintien du partenariat avec le centre national d'étude spatiale (CNES) qui participera au financement.

« L'état s'engage en outre à ce que ces 90 millions ne soient pas pour solde de tout compte mais une première tranche d'aide pour redresser la santé en Guyane », précise le texte. D'autres mesures doivent intervenir dans les années à venir, à commencer par la création de 150 lits pour des séjours de courtes durées et d'un hospitel pour l'accueil des femmes enceintes issues des territoires isolés, pour un coût d'investissement de 2 millions.

Un CHU pour la Guyane

La création d'un CHU pour la Guyane figure dans le détail des mesures : 4 PU-PH sont d'ores et déjà présents, et l'inauguration est prévue d'ici 2 ans. L'accord prévoit une augmentation, non chiffrée, des MIGAC et une augmentation du coefficient géographique à 1,41 au lieu des 1,29 en vigueur depuis le 17 mars. La réouverture du centre de transfusion sanguine et d'un service médico psychologique régional au centre pénitentiaire figure aussi au programme.

Un doublement de l'activité des centres départementaux de prévention et de santé (CDPS) est aussi prévu, de même que le doublement des places en EPHAD et l'accompagnement de la modernisation et de la professionnalisation des services à domicile.

La médecine libérale oubliée

S'ils prennent acte des efforts consentis, les représentants du Conseil de l'ordre, de l'URPS de la CSMF, du SML et de MG France ne sont pas convaincus par cet accord. « Il n'y a pas une ligne pour la médecine libérale en grande difficulté dans la région », souligne le Dr Stanley Caroll qui coordonne ce rassemblement. « La clinique privée Véronique, la dernière du département, est en grande difficulté et rien n'est prévu pour lui venir en aide », note-t-il.

Dans une lettre adressée à la ministre des Affaires sociales et de la Santé, les organisations renouvellent leur demande de mise en place de mesures incitatives forte pour redresser la démographie médicale (il y a 3 fois moins de généralistes et 4 fois moins de spécialistes qu'en métropole), la constitution d'une zone franche sanitaire globale et d'un numerus clausus spécifique à la Guyane.

Certaines demandes concernent aussi le secteur public, avec la mise en place d'un TEP scan, d'un service de neurologie et de neurochirurgie, d'un service de cardiologie interventionnelle et de chirurgie vasculaire, une réanimation pédiatrique, un service d'oncologie, d'hématologie, de diabétologie, de pneumologie, de médecine nucléaire et des services de psychiatrie plus adaptés. De nouvelles réunions sont prévues, organisées par l'ARS Guyane à laquelle sont conviés les représentants de la médecine de ville.

Le CHAR toujours sous tension

Alors que les barrages ont été levés sur les routes du département, un mouvement social est toujours en cours au CHAR. Les 60 millions prévus dans l'accord sont en effet inférieur aux 70 millions (39 millions pour épurer la dette 31 millions pour renouveler la trésorerie) réclamés par l'intersyndicale (CFDT-CDTG, CGT-FO, association d'usagers et syndicats des médecins), qui demandent aussi la mise aux normes des locaux et du système incendie (prévu dans l'accord), le renouvellement du matériel médical, l'arrêt de l'évacuation sanitaire systématique des patients vers les Antilles ou l'hexagone (également prévu), l'embauche de médecins spécialisés, de soignants, d'administratifs, de techniciens. L'intersyndicale réclame aussi un plan d'investissement pour la construction d'un hôpital universitaire et l'embauche de 50 % de personnel local.


Source : lequotidiendumedecin.fr