Stagnation du taux de participation, difficultés d’accès des femmes éloignées du système de santé, controverses autour de la balance bénéfices/risques, de nouveaux défis se dressent aujourd’hui dans le dépistage organisé du cancer du sein. « La mobilisation contre ce cancer doit être collective, a déclaré Marisol Touraine lors de l’annonce du lancement d’une large concertation citoyenne et scientifique sur le dépistage du cancer du sein. Le cancer du sein tue 12 000 femmes par an en France ; une femme sur 8 est touchée au cours de sa vie (...). L’enjeu ne concerne pas seulement les femmes et leur famille, mais la société tout entière. (...) L’ensemble de la société doit s’emparer du sujet ».
La concertation citoyenne et scientifique, officiellement lancée le 29 septembre sur internet, invite les femmes et l’ensemble des acteurs concernés à participer. « Elle répond à la double exigence de démocratie sanitaire réaffirmée dans le Plan cancer 2014-2019 et de modernisation de notre système de santé », a indiqué la ministre de la santé. Le numérique était l’outil de choix pour toucher le plus grand nombre, et une plate-forme « www.concertation-dépistage.fr » est d’ores et déjà ouverte. « Ce site de contribution sera ouvert jusqu’au 15 mars 2016 », a précisé le Pr Agnès Buzyn, présidente de l’Institut national contre le Cancer (InCA). Un comité d’orientation, « pluraliste » selon le Pr Buzyn - composé de 10 membres du monde de la santé (économistes, médecins, épidémiologistes, historien) - proposera, au vu de l’ensemble des contributions, « une feuille de route » à la ministre de la santé.
Des points de vue différents à confronter
Pour cette concertation, trois grandes thématiques de réflexion ont été identifiées. Premier point, l’intérêt du dépistage est de détecter à un stade précoce et de réduire la mortalité par cancer du sein. « À un stade précoce, la guérison est de 9 cas sur 10 », a rappelé la ministre. Et c’est en partie grâce à un diagnostic précoce que « la mortalité par cancer du sein a diminué de 1,5 % » entre 2005 et 2012. Mais cela ne va malheureusement pas sans certaines limites, en particulier le surdiagnostic, le risque de cancers radio-induits et une anxiété liée aux résultats. Si les pouvoirs publics ont organisé le dépistage au niveau national en estimant la balance bénéfice/risque favorable, qu’en est-il au niveau individuel ? Quelle information faire passer pour que la femme décide de participer, ou non, au dépistage de façon éclairée ?
Deuxième point, le taux de participation, autour de 52 %, ne progresse plus. Près de 10 à 15 % des femmes de cette tranche d’âge réalisent un dépistage hors programme, à « titre individuel ». Comment organiser le dépistage organisé pour qu’il s’adresse, demain, aussi aux femmes à risque élevé et très élevé ? Quels professionnels pour les accompagner ? Quels sont les freins qui dissuadent les femmes de participer (mauvaise expérience, éloignement, raison pratique, barrière linguistique, etc.) ?
Troisième point, le programme se doit d’intégrer d’autres objectifs de santé plus larges, en particulier la réduction des inégalités de santé, qu’elles soient liées à des facteurs socio-économiques, territoriaux ou de handicap. Comment mettre en place des actions spécifiques auprès de ces publics défavorisés ?
Du 100 % pour les femmes à risque aggravé
En parallèle, deux conférences auront lieu, l’une de citoyennes et l’autre de professionnels de santé. Vingt femmes représentatives de la société française, formées 48 heures aux enjeux du dépistage, se retrouveront plusieurs jours consécutifs et rendront un avis collectif au comité d’orientation en mars 2016. Côté professionnels, au nombre d’une quinzaine (médecins généralistes ou de santé publique, gynécologues, cancérologues, sages-femmes), ils seront amenés à se pencher sur leur implication et leur rôle dans le dépistage. Une réunion publique nationale de clôture, ouverte à tous, se tiendra au printemps avec à la clé la formulation des premières recommandations. Le comité d’orientation présentera le rapport final de la concertation à la ministre à l’été 2016.
En attendant les nouvelles orientations, qui seront présentées lors d’« Octobre Rose » 2016, la ministre de la santé réaffirme l’engagement gouvernemental dans le dépistage du cancer du sein. Une nouvelle campagne de sensibilisation est lancée avec de nouveaux contenus sur le site e-cancer.fr. Mais considérant qu’« on ne peut pas en rester là » et qu’« il faut aller vers les femmes éloignées des campagnes d’information », des affiches traduites et illustrées seront distribuées pour cibler les femmes défavorisées ou de langue étrangère. La ministre a annoncé également qu’en marge du dépistage organisé, « l’ensemble des examens de dépistage, selon le suivi spécifique défini par la HAS en mai 2014, sera remboursé à 100 % par l’Assurance-maladie pour les femmes à risque élevé et très élevé ». Ces femmes à risque aggravé sont suivies à un âge plus jeune, à un rythme plus rapproché et par des examens plus sophistiqués. Cette mesure pour l’égalité des chances « sera opérationnel au printemps 2016 », assure la ministre.
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