LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN : Qui sont ces « enfants invisibles » que vous mettez en lumière dans votre rapport annuel ?
GENEVIÈVE AVENARD : Il est extrêmement difficile de répondre à cette question. Les informations précises sur ces enfants, émargeant dans deux types de politiques différentes, manquent. Pour avoir une meilleure visibilité, nous avons lancé une enquête auprès des départements. 43 ont répondu, dont seulement 18 pouvaient indiquer le nombre d’enfants handicapés en protection de l’enfance. Nous avons conduit, en parallèle, plus de 40 auditions et reçus des contributions des acteurs de la protection de l’enfance et du handicap.
Nous estimons que le taux d’enfants pris en charge en protection de l’enfance et bénéficiant d’une reconnaissance de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) est de 17 % (soit 70 000 enfants) mais d’autres données font état de taux plus élevés (25 % voire 40 %). On note une sur-représentation des handicaps psychiques et mentaux, avec des troubles du comportement. Autre caractéristique, ces enfants se trouvent dans un enchevêtrement de prises en charge sans cohérence. Ils sont très souvent accueillis dans des structures inadaptées, dotées d’équipes éducatives mais pas forcément d’un plateau technique de soins.
Quels sont les problèmes d’accès aux soins auxquels ces enfants sont confrontées ?
Toutes les difficultés de coordination, de partage d’information, et de prévention qu’on peut rencontrer en protection de l’enfance sont aggravées pour ces enfants en situation de handicap.
En théorie, ils ont accès aux soins psychiatriques dans les hôpitaux publics, les centres médico-psycho-pédagogiques, les centres d’action médicosociale précoce ou dans les instituts médico-éducatif ou thérapeutiques. Mais la réduction des moyens en pédopsychiatrie freine leur prise en charge. Les listes d’attente s’allongent. L’offre est insuffisante.
Le défaut d’articulation entre les structures conduit parfois à la suspension ou au gel d’un soin : par exemple, lorsqu’un enfant, à la faveur d’un placement en institution, change de secteur psychiatrique. La multitude d’acteurs qui ne se connaissent pas ni ne se comprennent peut conduire à des évaluations différentes, des retards dans l’orientation vers la MDPH, et des fractures dans leur accès aux soins.
Quel peut être le rôle des médecins à l’égard de ces enfants ?
Les généralistes doivent être sensibilisés aux problématiques spécifiques de ces enfants et être convaincus de leur place dans un projet global. L’aide sociale à l’enfance (ASE) doit identifier un médecin référent en son sein, qui soit l’interlocuteur ressource et le coordonnateur des praticiens libéraux et hospitaliers.
Pour intervenir le plus justement auprès de l’enfant, les acteurs doivent en avoir une vision globale. C’est pourquoi nous plaidons en faveur d’outils, comme le carnet de santé informatisé et un dossier présentant l’anamnèse de l’enfant. Enfin, les médecins scolaires et de la protection maternelle et infantile sont très importants en matière de dépistage précoce, de soutien aux parents, et de lien avec les généralistes.
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols
Le texte sur la fin de vie examiné à l'Assemblée à partir de fin janvier
Soumission chimique : l’Ordre des médecins réclame un meilleur remboursement des tests et des analyses de dépistage
Dans les coulisses d'un navire de l'ONG Mercy Ships