« L’obligation de signaler a été recommandée par plusieurs instances dont l’Association mondiale de psychiatrie, le Comité des droits de l’enfant et deux rapports de l’ONU, rappelle une lettre ouverte qui vient d’être adressée aux sénateurs. Quand le signalement constitue une obligation, il réduit par trois le risque pour une enfant de mourir sous les coups », assurent les signataires.
« Sans doute les contraintes qui peuvent peser sur les médecins, notamment dans le secteur privé ne sont-elles pas négligeables, convient la pédopsychiatre Catherine Bonnet, elle-même plusieurs fois sanctionnée avant d’être réhabilitée, à la suite de signalements. Mais l’intérêt des enfants paraît justifier amplement qu’un dispositif exceptionnel soit adopté pour mieux protéger des enfants exposés à un risque de maltraitance. »
Signataire de la lettre, Éric de Montgolfier, qui fut l’un des initiateurs de la PPL, estime qu’« en renonçant à l’obligation, les parlementaires ont été pusillanimes : ils ont retenu la protection des médecins plutôt que celle des enfants. Or, c’est l’obligation qui aurait mieux protégé les médecins. Le libre choix les place entre le marteau et l’enclume. C’est en contraignant que la loi protège, affirme l’ex-procureur général de la République, alors qu’en laissant l’alternative, elle expose le praticien à subir des contrecoups sur son évaluation des risques et ses décisions. Elle lui met la nuque sous le couperet. »
« La PPL va dans le bon sens, reconnaît le Dr Jean-Louis Chabernaud, président du SNPH (Syndicat national des pédiatres hospitaliers), autre signataire, quand elle prévoit des dispositifs de formation pour les médecins comme pour tout professionnel de santé. En revanche, en n’instaurant pas l’obligation systématique de signalement, elle fait perdre des chances aux enfants victimes : l’obligation peut empêcher, outre la récidive, le risque de violences d’un auteur envers d’autres enfants. C’est fondamental : les libéraux doivent acquérir le même réflexe de signalement systématique que les hospitaliers, pour lesquels cette démarche ne présente aujourd’hui aucune difficulté. »
Question de confiance
Les libéraux ne se rallient pas forcément à cette analyse. « On marche sur la tête quand on veut forcer le généraliste à faire du signalement, alors qu’il est exercé à construire sa pratique sur tous les cas border-line, proteste le Dr Jérôme Marty, président de l’UFML (Union française pour une médecine libre). Au lieu de rajouter des couches de législation, faisons-lui enfin confiance ! Si on veut le contraindre, on pourra susciter la réaction inverse : il ne notera plus dans le dossier les éléments de doute sur lesquels il s’interroge et évalue la meilleure prise en charge. »
À l’Ordre aussi, le ton est à la circonspection. « Je crois que le médecin dispose aujourd’hui de toutes les garanties dans le code pénal (article 226-14) comme dans le code déontologie (44) pour faire part de ses doutes éventuels à la CRIP (cellule de recueil des informations préoccupantes) et saisir éventuellement le procureur de la République, estime le Dr Jean-Marie Faroudja, président de la section éthique et déontologie. Les conseils départementaux sont là pour renseigner sur la procédure. Si le médecin s’en tient aux règles en vigueur, c’est-à-dire s’il signale sans mettre en cause qui que ce soit, il ne s’expose à aucune conséquence professionnelle ou pénale, quand bien même il aurait commis une erreur : par exemple le signalement de bleus chez un enfant qui chute et qui va se révéler atteint d’une tumeur au cerveau, ou celui de fractures, chez un enfant qui a une ostéogenèse imparfaite. Aucun médecin n’est sanctionné en pareil cas. »
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