Le 113 est loin d'être opérationnel mais il génère déjà des anticorps dans la profession.
Proposé le 19 décembre par le rapport Carli/Mesnier sur les urgences, ce numéro de santé unique, s'il est retenu par l'exécutif, serait la porte d'entrée du futur service d'accès aux soins (SAS, 24H/24) pour les urgences médicales et les soins non programmés (remplaçant le 15 et le 116-117). Le 113 cohabiterait avec un numéro réservé aux demandes de secours et de sécurité (112). Ce schéma (décliné en site et appli) pourrait être lancé d'ici à juin 2020 avec des sites pilotes.
« Au-delà de 30 secondes, on est disqualifié »
Las, cette solution ne satisfait ni les sapeurs-pompiers, ni SOS Médecins ni les syndicats de praticiens libéraux.
Lors d'un débat organisé par l'Institut français de la sécurité civile (IFRASEC) à l'Assemblée nationale, le Dr Patrick Hertgen, médecin urgentiste, vice-président de la Fédération nationale des sapeurs pompiers de France, n'a pas mâché ses mots. « Le 113 repose sur l'illusion d'une performance retrouvée grâce à un élargissement du périmètre des Centres 15 ! Le 112, lui, serait relégué à la sécurité civile et amputé de 85 % de son activité. Mais pour les urgences immédiates, il faut répondre très vite. Si on doit attendre plus de 30 secondes pour décrocher, on est disqualifié », clame-t-il. Or, les appels au 113 seraient extrêmement nombreux puisqu'ils couvriraient la totalité des demandes imprévues de soins (urgences vitales, graves et soins non programmés). Avec un nouveau risque d'engorgement et d'explosion...
C'est pourquoi les pompiers ont toujours défendu – à côté du numéro unique de secours, le 112 – la généralisation du 116 117 pour la régulation libérale des soins non programmés, numéro expérimenté dans trois régions (Corse, Normandie et Pays de la Loire). Un numéro « libéral » pourtant écarté par le rapport Carli/Mesnier au motif qu'il « jouit d'une faible notoriété » et n'est pas appelé à se diffuser au-delà des expérimentations régionales.
Le 116 117, ça marche
Mais du côté de la médecine de ville, le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF, fondateur de l'association départementale pour l’organisation de la PDS en Mayenne (ADOPS 53), défend les vertus et l'efficacité du 116 117. Sur les 33 000 appels reçus par son association libérale, 23 % ont abouti à l'envoi des médecins effecteurs, 15 % à l'envoi d'ordonnances aux pharmaciens de garde, 4 % au déclenchement des urgences et 58 % à des conseils médicaux ! Son message est clair : le 116 117, ça fonctionne bien. Dans ce contexte, il s'inquiète d'un numéro unique de santé qui viendrait contrecarrer cette dynamique locale. « Grâce aux organisations territoriales que nous sommes en train de mettre en place en ville, nous pourrions définir un parcours de soins non programmés avec une porte d'entrée qui n'est ni le 15 ni le 113 mais un numéro dédié à la médecine générale. Hélas, aujourd'hui, je crains qu'on nous en empêche... ».
Également invité du débat à l'Assemblée, le Dr Jean-François Cueille, vice-président de la protection civile, urgentiste et chef de service au CHU de Limoges, se montre lui aussi sceptique sur la création du 113 comme numéro unique santé. « On va nous demander de mettre la main sur l'agenda de la médecine libérale ! C'est très compliqué... ».
Même la fédération SOS Médecins affiche son inquiétude, redoutant un « guichet unique » dont elle risque d'être exclue à terme. Les 63 associations du réseau SOS aspirent au maintien de l’accès direct à leur régulation et à leurs structures – dont le numéro national 3624 et les numéros d’accès directs aux centres d’appels.
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