Vaccins pneumococciques conjugués

Mieux comprendre les infections

Publié le 07/10/2011
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Les infections respiratoires sont une cause majeure de morbidité et de mortalité chez le jeune enfant, en particulier en Afrique et en Asie, a rappelé le Dr Ron Dagan (Beer-Sheva, Israël). Le pneumocoque (Pnc), dont 92 sérotypes ont été identifiés, est le plus fréquemment impliqué dans ces infections et une cause majeure de décès chez l’enfant de moins de 5 ans. Dans cette classe d’âge, en 2000, le nombre d’épisodes de maladies pneumococciques sévères a été estimé à environ 14,5 millions et le nombre de décès dus au pneumocoque (hors VIH+) à 826 000, ce qui représente environ 11 % des décès des enfants de moins de 5 ans.

Prévenir les pneumonies à pneumocoques.

La pneumonie pneumococcique ne peut être théoriquement affirmée qu’après mise en évidence du Pnc par un examen bactériologique. En fait, les tests classiques de diagnostic bactériologique ne détectent une bactérie pathogène que dans une faible proportion d’infections respiratoires basses et de pneumonies. Par ailleurs, l’affirmation selon laquelle une pneumonie pneumococcique est toujours une pneumonie alvéolaire ou lobaire s’est révélée fausse. D’autres infections respiratoires basses peuvent aussi être d’origine pneumococcique.

Ces vingt dernières années, différents vaccins pneumococciques (PCV), actifs contre un nombre variable de sérotypes de pneumocoques ont été mis au point : PCV7, PCV9, PCV11. Les études d’efficacité réalisées aux États-Unis, en Afrique du Sud, en Gambie et aux Philippines ont conclu à une diminution des pneumonies alvéolaires de 33 %, confirmant le rôle majeur du Pnc dans ce type de pneumonie. Mais, de plus, une diminution de 21 % des pneumonies sévères (cause non identifiée) et de 8 % des pneumonies cliniques (cause non identifiée) était aussi observée (1). Ce qui suggère que le Pnc a un rôle dans d’autres pneumonies que les pneumonies alvéolaires classiques. Or, les pneumonies moins spécifiques étant beaucoup plus communes, même une efficacité plus faible dans ce contexte entraîne une « réduction attribuable au vaccin » (RAV) importante de la maladie. On estime que pour chaque épisode de pneumonie pneumococcique prouvée par culture, 7 épisodes de pneumonies pneumococciques prouvées radiologiquement et 19 épisodes de pneumologies cliniques hospitalisées ont pu être prévenus (1).

Et les pneumonies virales ?

« Ce qui est encore plus surprenant, souligne Ron Dagan, est que les PCV peuvent réduire ce qui était jusqu’à présent considéré comme des infections virales pures. » Le premier travail dans ce sens vient d’Israël, où un PCV a induit une réduction de 23 % des épisodes de bronchiolites, bronchites et toux chez des enfants en crèche (2). Dans d’autres études, Madhi et Klugman (3) ont montré en Afrique du Sud que les hospitalisations consécutives à des pneumonies virales (VRS, metapneumovirus, influenza et para-influenza) étaient significativement réduites après vaccination PCV. Ceci suggère que les infections virales sont souvent des co-infections virus/bactéries.

Après l’introduction du vaccin conjugué heptavalent

À partir de 2000, le vaccin heptavalent PCV7 (sérotypes 4, 6B, 14, 18C, 19F, 23F) a été introduit dans les programmes vaccinaux de différents pays. Il en a résulté une réduction importante de toutes les infections respiratoires. Aux États-Unis, après l’introduction du PCV7 en 2000, les hospitalisations pour pneumonie toute cause ont diminué de 35 % entre 1997 et 2006 chez les enfants de moins de 2 ans. Dans le même temps, une réduction de 22 % des hospitalisations pour infections respiratoires basses (IRB) hors pneumonies était constatée, permettant de dire que pour un cas de maladie pneumococcique prévenue par le PCV7, 14 cas d’hospitalisations pour IRB étaient aussi prévenus(4).

La vaccination des nourrissons par le PCV7 a non seulement réduit considérablement les infections pneumococciques invasives (tous sérotypes confondus) chez les enfants mais aussi chez les adultes, par un effet d’immunité de groupe. Ainsi, dans une étude américaine récente (5), la réduction de ces infections était de 80 % chez les enfants de moins de 2 ans et d’environ 50 % chez les adultes de plus de 65 ans. De plus, une réduction des hospitalisations pour pneumonie due au virus grippal a été constatée chez les enfants de moins de 2 ans dans les états américains où la couverture vaccinale est la plus élevée. Une tendance identique est observée chez les plus de 65 ans. Ces résultats confirment que le PCV7 agit aussi sur la sévérité des pneumonies virales.

D’après la communication du Dr Ron Dagan (Beer-Sheva, Israël)

(1) Madhi Sa & coll. Clin Infect Dis. 2005;40(10):1511-8.

(2) Dagan R & coll. Pediatr Infect Dis J. 2001;20(10):951-8.

(3) Madhi SA et Klugman KP. Nat Med. 2004;10(8):811-3.

(4) MMWR January 16, 2009 / 58(01);1-4.

(5) Simonsen L & coll. MBio. 2011 Jan 25;2(1):e00309-10.

(6)Grijalva CG & coll. Clin Infect Dis. 2010 Mar 15;50(6):805-13.

 YVONNE EVRARD

Source : Le Quotidien du Médecin: 9020