LE QUOTIDIEN : Comment est née l'idée de ce livre et à qui s'adresse-t-il précisément ?
Pr MICHEL LEJOYEUX : Un constat simple m'a incité à rédiger cet ouvrage : le manque de discernement, tant chez les patients que parfois dans le corps médical, entre ce qui est du registre de la déprime et la maladie dépressive. La France est le premier consommateur mondial d'antidépresseurs par habitant et, dans le même temps, l'un des pays qui compte le plus de malades en dépression non traités. Signe de deux dérives actuelles : l'excès de médicaments pour la déprime et le refus de traiter les vraies maladies. La dépression se caractérise par une véritable incapacité à faire face alors que dans la déprime, il s'agit en quelque sorte d'un simple oubli des ressources dont on dispose pour lutter contre la mélancolie.
Plus qu'une liste de conseils vous parlez d'un style voire d'une hygiène de vie…
On a trop tendance à considérer le fait d'être de bonne ou mauvaise humeur comme une fatalité. Or il existe, tout comme pour se maintenir en bonne santé physique, des habitudes de vie à adopter pour préserver sa santé mentale. Ce livre ne prétend pas soigner, ni se substituer à un traitement médical ou à une psychothérapie. Il offre simplement le moyen à tout un chacun, en dédramatisant la psychologie, de mieux comprendre ses émotions négatives pour mieux les désamorcer.
Vous faites aussi bien référence à la pensée positive, qu’à l’appel à la réflexion contre la dépression ou encore à l’importance de bien cibler son empathie. Sur quelles bases appuyez-vous ces conseils ?
Beaucoup de ces conseils de bons sens trouvent une validation à la faveur d'études récentes. L'avancée des techniques d'imagerie a permis de valider in vivo certains mécanismes cérébraux associés aux émotions. L'idée, par exemple que lorsque le cortex est activé, cela ralentit le fonctionnement de l'amygdale peut expliquer en image aujourd'hui comment la réflexion et la raison peuvent calmer les émotions.
Au-delà des mécanismes cérébraux vous évoquez également l'importance de l'alimentation, de l'activité physique ou encore de vivre entouré de verdure…
Les études sont nombreuses à montrer l'interaction entre l'activité physique régulière et modérée (3 fois 45 minutes par semaine) et des bienfaits sur le cerveau, et donc sur la santé mentale. De même, on sait aujourd'hui les relations entre le microbiote intestinal et le cerveau. Et il semble naturel qu'un régime équilibré soit aussi bon pour le moral que pour le physique. Quant aux bénéfices de se « mettre au vert », ils sont vérifiés régulièrement dans des études. L'une des plus parlantes établit une corrélation entre la baisse de la consommation d'antidépresseurs et l'élévation du nombre d'arbres près des habitations.
Quels messages adressez-vous aux autres praticiens à travers cet ouvrage ?
Il est essentiel de privilégier une approche globale du patient. Le non biologique doit aussi être entendu, sans se résumer à la seule psychothérapie. La santé mentale est un déterminant de la santé physique. Ne tronçonnons pas nos malades.
*JC Lattès, 306 p.19 €
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