Débusquer des économies tout en améliorant la qualité des soins. Posée à chaque projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), cette délicate équation renvoie aussi à la question de la responsabilité des principaux « payeurs » (assurance-maladie obligatoire et organismes complémentaires), comme l'a montré un débat organisé par le Collège des économistes de la santé.
Premier constat partagé : notre système dual de remboursement des soins par l'assurance-maladie obligatoire et les complémentaires (mutuelles, assurances privées et institutions de prévoyance) est en partie inefficient (en raison notamment des coûts de gestion) et surtout insuffisant pour éviter tout renoncement aux soins. Malgré les nombreuses soupapes financières (CMU, aide à la complémentaire santé, régime ALD, etc.), les barrières d’accès aux soins subsistent, creusant les inégalités sociales de santé. Et même si le reste à charge moyen par Français est l'un des moins élevés des pays de l'OCDE, « la mixité de notre système fait que les individus peuvent malgré tout être exposés à des restes à charge jusqu’à 5 000 euros par an, ce qui est énorme », précise Marianne Cornu-Pauchet, directrice du Fonds CMU.
Trou noir collectif
« Coûteux, peu efficient et inégalitaire » : le regard de Brigitte Dormont est très sévère. Pour cette économiste de l’université Paris Dauphine, « la régulation de notre système mixte français d’assurance-maladie cumule tous les défauts ». En cause : l'opacité dans le remboursement des soins mais aussi le manque de confiance mutuelle entre les régimes obligatoire et complémentaire qui se regardent souvent en chiens de faïence au lieu de coopérer pour réguler le système de santé. « J’ai le sentiment que nous sommes arrivés au bout d’une évolution construite de manière assez circonstancielle, où l’on a renvoyé aux complémentaires santé ce qu’on jugeait impossible de couvrir via l’assurance-maladie obligatoire », analyse Anne-Marie Brocas, présidente du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance-maladie (HCAAM).
Les payeurs eux-mêmes constatent les difficultés à co-piloter le système. Ainsi, le Dr Jean-Martin Cohen Solal, délégué auprès du président de la Mutualité française, regrette un « manque d’échange » avec l’assurance-maladie obligatoire. « De notre côté, nous ne savons rien sur ce qu’il se passe au niveau individuel concernant le remboursement complémentaire », rétorque Claude Gissot, directeur de la stratégie, des études et des statistiques à la CNAM, évoquant « un vrai trou noir collectif », « élément très gênant en termes de régulation ».
L'accès aux données de remboursement est un premier enjeu majeur. Et à défaut de pouvoir se mettre d'accord sur tout, l'amélioration du partage de l'information entre les régimes payeurs semble un objectif commun.
Concurrence
Quelle ficelle tirer pour améliorer durablement les relations entre financeurs ? Comment faire sortir chaque nageur de sa ligne pour avancer de façon plus synchronisée ? Certains réclament un encadrement minimum des prix ou des pratiques pour gagner en visibilité. « Le président de la République veut aller vers un reste à charge maîtrisé [sur l'optique, le dentaire et le prothétique, NDLR]. Mais comment y aller dans des secteurs où les tarifs sont tellement libres ? », interroge le Dr Cohen-Solal, qui appelle à accentuer les efforts de régulation dans tous les domaines de la santé. La concertation qui va s'engager sur le reste à charge zéro réclamé par Emmanuel Macron aura valeur de test.
Les complémentaires santé veulent toutefois garder leur pleine autonomie de gestion. « Attention à ne pas vouloir nous plaquer des réponses uniformes, met en garde Cécile Waquet, directrice adjointe métiers santé-prévoyance chez AG2R-La Mondiale. Il faut nous laisser libres d’agir en concurrence ». Les négociations conventionnelles et tarifaires véritablement tripartites (professionnels de santé/Sécu/complémentaires santé) ne sont pas encore pour demain…
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