Suppression du Pass contraception en Ile-de-France : les acteurs de la Santé s'offusquent

Par
Publié le 28/04/2016
Planning

Planning
Crédit photo : Phanie

La suppression du Pass contraception par le conseil régional d'Ile-de-France est un « signal désastreux à un moment où on sait que les questions liées à la santé sexuelle sont des questions tout à fait importantes », a réagi la ministre de la Santé Marisol Touraine, ce 28 avril, au micro de France Inter.

« Le Pass contraception était une manière d'entrer en contact, de sensibiliser, de parler avec les jeunes », a ajouté la ministre des droits des femmes.

La présidente du Conseil régional, Valérie Pécresse (Les Républicains), justifiait son choix entériné par le vote du budget début avril, par la non-utilisation de l'enveloppe de 20 000 euros qui y était dédiée. « J’ai pris acte, tout simplement, de l’arrêt par la gauche fin 2013, de la distribution du Pass contraception en Ile-de-France. Il n’y a plus eu un Pass contraception distribué à une lycéenne d’Ile-de-France depuis janvier 2014 », déclarait-elle sur la même radio le 24 avril. Seulement 2 000 PASS auraient été distribués depuis son lancement en 2011.

En avril 2015, le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) indiquait que la moitié des régions métropolitaines avait adopté le dispositif, décliné différemment selon les territoires. « Le taux de recours à ces Pass reste excessivement faible, et ce même dans les territoires ruraux qui en constituaient au départ la cible privilégié », lisait-on déjà. Le volume de Pass distribué serait inférieur à 4 % dans les 4 régions étudiées (Poitou-Charentes, Rhône-Alpes – où il plongerait à 0,1 %, Aquitaine, Pays de la Loire) et le taux d'utilisation des chéquiers, inférieur à la moitié.

 

À améliorer, pas à supprimer

 

Les acteurs de la santé sexuelle déplorent la disparition du Pass contraception. « L'éliminer, c'est risquer de creuser les inégalités. Raisonner en termes de nombre est lacunaire : ce pass a pour vocation de servir aux jeunes filles les plus vulnérables, notamment dans les campagnes ou les territoires reculés », estime Veronica Noseda, Coordinatrice nationale du Planning Familial.

Des pistes d'amélioration étaient possibles, selon elle, comme une meilleure articulation avec le planning, une meilleure communication et information, et une mobilisation de tous les acteurs. « Certaines jeunes filles ont pu se faire recaler par des pharmaciens lorsqu'elles présentaient un chèque du Pass. D'autre part, le nom des médecins qui acceptaient le dispositif n'était pas toujours communiqué aux jeunes filles qui ne savaient pas où se rendre », poursuit-elle.

 

Renforcer l'information sur la gratuité et confidentialité

 

Pour le Dr Gilles Lazimi, généraliste à Romainville, et membre du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, la suppression du Pass est une « décision aberrante et idéologique ». « La région est responsable des lycées et collèges. On a besoin de cet outil. Certes, il est insuffisant utilisé, mais il se montre pertinent pour toucher des femmes peu sensibilisées, consultant rarement des médecins, loin des centres de planning », explique le médecin.

Le Pass avait notamment le mérite d'assurer la confidentialité et la gratuité de la contraception, observe le Dr Lazimi. Certes, la loi de financement de la sécurité de 2013 instaure la gratuité des contraceptifs remboursables pour les mineures de 15 à 17 ans, et le droit au secret, mais moins de 1 % des délivrances obéissent à ces règles, souligne l'IGAS.

La suppression du Pass contraception en Ile-de-France va aussi à l'encontre de l'avis du Haut Conseil de la santé publique sur la santé sexuelle et reproductive, qui recommande de communiquer mieux et plus sur la gratuité et l'anonymat des mineures pour l'accès à la contraception, de les étendre aux jeunes femmes de 18 à 25 ans, et de promouvoir à l'école une éducation à la santé sexuelle dès le plus jeune âge.

Marisol Touraine a enfin rappelé qu'au 1er juillet 2015 entre en vigueur la gratuité des consultations et examens liés à la prescription d'une conception pour les mineures de plus de 15 ans, inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Contactées par « le Quotidien », toutes les régions ayant mis en place un Pass contraception déclarent le maintenir. 
 

Dans les Pays de la Loire, près de 12 500 chéquiers distribués

Pour la saison 2014-2015, le conseil régional des Pays de la Loire a distribué 12 428 « pass prévention contraception » ; 6 685 ont été utilisés jusqu'à présent, les chéquiers restant valables jusqu'au 31 décembre 2016, a indiqué la région au « Quotidien ». 

Composé de 7 coupons, permettant l'accès à 2 consultations médicales, à des analyses médicales pour la contraception et/ou le dépistage d'IST, et à des contraceptifs pour une durée moyenne d'un an, le Pass prévention contraception, déclinaison du pack 15-30 ans, s'adresse aux filles et garçons, dans les lycées sans condition d'âge, et dans les missions locales, maisons de santé pluridisciplinaires, pharmacies, et centres de planification et d'éducation familiale (CPEF) aux moins de 20 ans qui le demandent.

Les Pays de la Loire se caractérisent par l'une des plus faibles implantations de CPEF (3 pour 10 000 femmes de 15 à 19 ans), mais des taux de recours à la contraception via l'assurance maladie nettement plus élevés que la moyenne nationale et des bons résultats en termes de grossesses précoces (moins de 10 par an pour 1 000 femmes) et d'IVG, lit-on dans le rapport de l'IGAS. 

 


Source : lequotidiendumedecin.fr