À Chamonix, les projecteurs du Pr Guy Vallancien et l'attention des 500 invités de son congrès CHAM* étaient braqués cette année au-delà de nos frontières. Objectif ? Dénicher des modèles d'organisation et de prise en charge susceptibles d'inspirer les acteurs français, dont les initiatives sont bridées par le tout normatif. Florilège.
Comme c'est la tradition depuis onze ans, le Pr Guy Vallancien a ouvert, vendredi 27 septembre à Chamonix, le congrès CHAM devant quelque 500 décideurs invités à ce « Davos de la santé ». L'illustre urologue s'est livré à une plaidoirie très politique, appelant à une plus grande liberté d'entreprendre laissée aux acteurs de terrain.
À la tribune, l'académicien a pourfendu « la difficulté de nos sociétés à repenser leurs organisations entre la contrainte des normes et la liberté d'agir ». Il a lancé un appel à « dépasser nos vieux réflexes mesquins pour bâtir une véritable Europe de la santé dans la diversité de ses composantes ». Pour le Pr Vallancien, le « déluge législatif et réglementaire français et européen » concourt à « noyer les initiatives » et brider cette liberté d'entreprendre si féconde. « Oui, une régulation est indispensable, mais de grâce, qu'elle laisse aux acteurs les moyens d'inventer, de tester, quitte à se tromper », plaide-t-il.
Résistances au changement
Pour susciter des idées et créer une émulation, le chirurgien avait convié à Chamonix des représentants étrangers – médecins, soignants, directeurs d'établissement, politiques, conseillers et experts sanitaires. Les congressistes ont pu découvrir l'intelligence artificielle à la sauce chinoise, les infirmières en pratique avancée britanniques ou encore l'organisation américaine des soins de proximité (notre dossier).
Cette programmation a fait la joie du Dr Paul Garassus, président de l'Union européenne de l'hospitalisation privée (UEHP) qui parcourt depuis plus de dix ans le vieux continent à la découverte de nouveaux modèles. À l’instar du Pr Vallancien, le neurologue lyonnais peste contre le « tout réglementaire et le tout normatif » français.
À ses yeux, plusieurs réformes auraient pu être menées plus vite et plus tôt dans l'Hexagone si « le corporatisme médical et la résistance au changement » n'étaient pas aussi forts. C'est le cas du développement des maisons médicales ou du virage ambulatoire. « Depuis 2010, les Pays-Bas on atteint 80 % de chirurgie en centres de jour, on est encore très loin de ce seuil en France », se désole le médecin.
Attention toutefois, à trop regarder ailleurs si l'herbe est plus verte, de ne pas sacrifier ce qui fait de la France un exemple. « La Haute autorité de santé est une belle réussite, visible et appréciée partout », illustre le Dr Paul Garassus. « La vérité, c’est qu’il n’y a pas un seul bon système, a analysé la ministre de la Santé Agnès Buzyn en clôture de l'événement. Chaque pays a ses réalités. Le problème de la France, ce sont les inégalités géographiques et sociales dans nos territoires. On ne peut pas se comparer à un pays comme le Danemark qui est beaucoup plus homogène en termes de population et qui n’a pas le problème des déserts médicaux. Chaque pays doit trouver la solution adaptée, avec l’offre de soins et les professionnels dont il dispose. »
* Convention on health analysis and management