Courrier des lecteurs

Touchers pelviens : souvenirs nord-américains

Publié le 19/11/2015
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En 1993… il y a donc plus de 20 ans… je préparais mon dossier de candidature pour la première nomination de professeur associé de médecine générale à la faculté de médecine de Lyon.

Je séjournais à l’université de Montréal découvrant ainsi les ECOS et la créativité iconoclaste des enseignants quebecquois, à la société de FMC de Floride et à la Medical School de Sioux Falls dans le Dakota du Sud où, a l’invitation du Dr Vogt, j’ai eu l’opportunité de participer à la formation des étudiants à l’examen gynécologique (ils étaient en tout 450 pour un territoire grand comme environ le tiers de la France).

Tout commença pour une dizaine d’étudiants en 4e année avec un cours magistral sur l’anatomie pelvienne de la femme, les principales pathologies rencontrées et la définition de l’objectif de prise en charge des patientes par les futurs généralistes qu’ils deviendraient.

Puis une vidéo sur l’examen clinique, le frottis la pose du DIU, poursuite de la formation sur des mannequins, deux étudiants et un médecin senior par poste et enfin, à ma grande surprise dans ce pays dont je connais la pudibonderie, mais le pragmatisme efficace, l’examen clinique « in vivo ».

Une dizaine de femmes de tout âge attendait avec une blouse dans un salon. Ces volontaires venaient faire à la Médical School leur examen gynéco annuel, faire poser leur stérilet ou réaliser leur frottis, elles étaient rémunérées pour cela.

Je me souviens du discours du Dr Vogt devant ces étudiants un peu intimidés : « Ne soyez pas inquiets, elles savent pourquoi elles sont là, elles ont un contrat avec la Medical School, ce sont elles qui vont vous guider… elles vous diront : mon utérus est un peu en arrière ou bien, vous n’appuyez pas assez fort, faites leur confiance ! »

À part, il m’expliqua que tout le mode était gagnant, elles avaient un examen gratuit… elles étaient payées (je ne sais plus combien exactement, une centaine d’euro envion) que c’étaient souvent des femmes de condition modeste ou de la campagne et qu’elles appelaient cela « christmas money ».

La formation dura 4 heures. ils n’étaient certes pas experts en gynéco après cet formation mais avaient pu avoir accès a un bon examen clinique, non stressant, guidé, tout en respectant la personne examinée.

Ce n’est pas mon dossier pédagogique, que je pensais innovant qui a eu les faveurs de la commission de médecine générale de Lyon et je n’ai pas été nommé professeur associé, j’ai découvert avec pas mal d’amertume qu’il y avait d’un coté le contenu scientifique d’un projet et d’un autre la couleur syndicale du candidat

Dr Jean-Pierre Micolle

Source : Le Quotidien du Médecin: 9451