AVANTAGE sélectif ou mutation cul-de-sac ? « Seule la surveillance virologique et épidémiologique pourra répondre aux questions posées par la mutation du virus A(H1N1)v identifiée par les autorités sanitaires norvégiennes, explique au « Quotidien » le Dr Jean-Claude Manuguerra, virologue, responsable de la cellule d’intervention biologique d’urgence (CIBU) à l’institut Pasteur. Les virus grippaux mutent tout le temps et sans arrêt, le A(H1N1)v n’échappe pas à la règle. L’OMS a tiré une sonnette d’alarme car il s’agit de cas graves. Mais beaucoup d’inconnues persistent. »
Pathogénicité à prouver.
Point de vue partagé par le Pr Bruno Lina, directeur du Centre national de référence de la grippe à Lyon. « Toute la question est de savoir si ce virus mutant est plus pathogène et s’il va supplanter l’autre virus, renchérit le Pr Lina. Personne n’est capable aujourd’hui de répondre à cette question. Cette mutation a déjà été identifiée par le passé au Brésil et en Ukraine, dans des formes graves mais aussi non graves. S’il s’avérait que le virus présente effectivement une pathogénicité exacerbée, cela ne signifie pas forcément qu’il soit plus transmissible d’une personne à l’autre. Il faut continuer à observer ce qui se passe. Pour le moment, on n’a pas l’impression que ce virus prenne la main. » C’est également l’avis du Dr Manuguerra de l’institut Pasteur. « La mutation a été détectée chez un petit nombre de sujets et n’est pas représentative du virus qui circule dans la population générale, insiste-t-il. Sur les 70 prélèvements analysés par les virologues nordiques, la mutation a en effet été identifiée chez trois sujets. De plus, le fait précisément que ce soit des cas graves a pu constituer un biais avec un avantage sélectif au virus mutant. »
Pas d’effets sur le vaccin.
Quant à l’efficacité des vaccins et des antiviraux, les deux spécialistes confirment qu’il n’y a pas de craintes à avoir. La mutation identifiée est en effet portée par le gène de l’hémagglutinine (HA) et ne touche pas de sites antigéniques. « La mutation concerne un domaine particulier, le site d’attachement au récepteur des pneumocytes, décrit le Pr Lina. L’affinité pour les acides sialiques est ici différente. Alors que les virus humains reconnaissent les acides sialiques de type alpha 2-6, qui sont majoritaires à la surface cellulaire, le virus A(H1N1)v muté reconnaît aussi les acides sialiques alpha 2-3, exprimés par les pneumocytes de type 1, situés plus en profondeur dans l’appareil respiratoire. D’où l’hypothèse que ce virus pourrait donner des formes pulmonaires plus graves. Mais le fait de pouvoir infecter plus facilement certaines cellules ne signifie pas pour autant que le virus soit plus pathogène. »
« L’imputabilité de la mutation reste à démontrer dans la pathogénicité, corrobore le Dr Manuguerra. Pour le vérifier, il faudrait faire des essais sur des modèles animaux.Par ailleurs, il n’existe aucun moyen de prédire la pression de sélection, c’est-à-dire quel virus prendra l’avantage. Les mutations surviennent de façon spontanée et aléatoire. Par le passé, on a pu observer une épidémie de virus H1N1 saisonnier résistant à l’oseltamivir, alors que l’usage des antiviraux était négligeable. A contrario, un scénario optimiste n’est pas exclu non plus : un virus plus transmissible et moins pathogène pourrait prendre le pas. Dans tous les cas, cette alerte fait prendre la mesure des atouts de la vaccination avec adjuvant, qui assure une protection plus large en cas de mutations. »
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