Parkinson : une technique détectant des traces d'α-synucléine permet un dépistage ultra-précoce

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Publié le 13/04/2023
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Crédit photo : S.Toubon

Comment dépister la maladie de Parkinson très tôt dès le stade prodromique ? Une équipe internationale montre dans « The Lancet Neurology » qu'une technique permettant de détecter l'α-synucléine dans le liquide céphalorachidien (LCR) est à la fois très sensible et spécifique pour identifier les personnes atteintes de la maladie neurodégénérative.

La technique dite αSyn-SAA repose sur les tests d'amplification de semence (SAA pour seed amplification assays) d'α-synucléine. Elle permet d'amplifier de très petites quantités d'agrégats de la protéine malformée, de sorte qu'elle puisse être détectée avec les méthodes de biologie standard. Si l'accumulation d'α-synucléine est une caractéristique bien connue de la maladie, la technique pour la mesurer n'était pas encore validée. Cette étude est la plus large menée jusqu'à présent pour en évaluer la performance diagnostique.

Une détection très précoce des sujets à risque ou encore au stade de prodromes (sommeil perturbé, anosmie) promet d'être très utile, sinon « cruciale » selon les auteurs, pour le développement d'essais thérapeutiques à la fois dans des sous-groupes de patients et des cohortes à risque.

Des profils très hétérogènes testés

Pour ce travail, l'équipe coordonnée par le Pr Andrew Siderowf de la faculté de médecine Perelman (Pennsylvanie) a mené une analyse transversale à partir d'une cohorte de 1 123 patients inclus entre juillet 2010 et juillet 2019. Parmi eux, 545 étaient atteints de la maladie de Parkinson, 163 des sujets contrôles sains, 54 disposaient d'un scanner sans signe de déficit dopaminergique, 51 présentaient des prodromes et 310 étaient des porteurs de mutations (GBA et LRRK2) asymptomatiques.

« Identifier un biomarqueur efficace de la pathologie à l'œuvre dans la maladie de Parkinson pourrait profondément marquer la façon de traiter la maladie, de potentiellement rendre possible de poser un diagnostic plus tôt, d'identifier les meilleurs traitements pour des sous-groupes différents de patients et d'accélérer les essais cliniques », explique le Pr Siderowf, co-investigateur de la cohorte appelée Parkinson Progression Marker Initiative.

Un marqueur positif avant même le diagnostic

Les résultats de l'étude montrent que l'αSyn-SAA est positive chez 88 % parmi l'ensemble des participants au diagnostic de Parkinson déjà posé (cas sporadiques et génétiques).

Pour les cas sporadiques (sans cause génétique), 93 % avaient un résultat positif pour l'αSyn-SAA. Pour les patients avec une forme génétique, c'était plus variable avec un taux de positivité de 96 % pour les porteurs du variant GBA versus 68 % pour ceux ayant le LRRK2.

La plupart des patients avec des prodromes avaient un résultat positif (89 % en cas d'anosmie, 85 % en cas de sommeil perturbé), ce qui suggère la présence d'agrégats d'α-synucléine avant même le diagnostic de la maladie.

Pour les porteurs asymptomatiques de LRRK2 ou GBA, en revanche, le résultat d'αSyn-SAA n'était positif que respectivement chez 9 % et 7 % d'entre eux. Pour les auteurs, cela suggère que « la présence d'agrégats de synucléine dans le LCR n'est pas présente toute la vie mais acquise à un stade proche du développement de la maladie ».

Il faut noter que la plupart des patients avec prodromes et les porteurs sans manifestations avaient une imagerie normale sans déclin du nombre de cellules à dopamine, qui est une signature présente avant le diagnostic. La semence d'α-synucléine en agrégats pourrait être un marqueur très précoce du début de la maladie.

Développer un test sanguin

Le signe clinique le plus prédictif de positivité au test était la perte d'odorat, le symptôme le plus fréquent au stade prodromique. Le taux de positivité était de 97 % chez toutes les personnes avec anosmie par rapport à 63 % chez celles à l'odorat préservé.

« Alors que la perte de l'odorat est un facteur prédictif fort de la maladie de Parkinson, (...) l'α-synucléinopathie pourrait être présente avant même une perte mesurable de l'odorat », souligne la Dr Tanya Simuni de la Northwestern University et autrice principale.

Selon les Prs Daniela Berg et Christine Klein, de la faculté Schleswig-Holstein (Allemagne), qui s'expriment dans un commentaire associé, le plein potentiel de la technique ne pourra être exploité qu'avec le développement des tests sanguins mais il reste que « l'αSyn-SAA change la donne dans le diagnostic, le recherche et les essais thérapeutiques dans la maladie de Parkinson ».


Source : lequotidiendumedecin.fr