LES ANTIRÉTROVIRAUX (ARV) inhibiteurs d’entrée sont des produits prometteurs pour la prévention de la transmission du VIH en utilisation dans des préparations topiques microbicides. Ils ciblent directement l’entrée du virus dans la cellule et peuvent contrer l’infection à la surface des muqueuses. Les plus intéressants de ces inhibiteurs d’entrée sont généralement des produits biologiques coûteux à produire, et dont l’usage est difficile à envisager dans les pays aux ressources réduites, où le besoin est grand. La synthèse par des micro-organismes d’ E. coli vivants notamment est considérée comme étant d’un coût prohibitif et non rentable en terme de rapport efficacité/coût.
Barry O’Keefe et coll. publient une avancée avec l’un de ces produits, le griffithsin (GRFT).
Cette protéine extraite d’une algue rouge présente une activité inhibitrice d’entrée très importante. Il est capable de neutraliser le VIH car il se lie aux molécules d’hydrates de carbone que le virus présente à sa surface et utilise pour masquer des domaines importants de la protéine d’enveloppe de l’effet des anticorps neutralisants, et pour faciliter l’infection des cellules de Langerhans et dendritiques.
« La puissance antivirale du GRFT couplée avec une absence de toxicité cellulaire, une stabilité exceptionnelle (résistance dans une grande variété de pH et de températures, proche du point d’ébullition) et sa stabilité dans les fluides cervicovaginaux de macaques font du GFRT un actif idéal pour un topique microbicide », indiquent les auteurs.
O’Keefe et coll. ont modifié un virus infectieux de la mosaïque du tabac en ajoutant le gène GRFT. Ils ont ensuite transfecté avec ce vecteur viral des plants de Nicotiana benthamiana, une plante voisine du tabac.
Le résultat est très positif. Les chercheurs obtiennent des quantités appréciables de la protéine d’algue rouge.
Isolats de clades A, B et C.
« Nous avons obtenu plus de 60 g de rGRFT extraite des feuilles d’environ 9 300 plants de N. benthamiana. »
La protéine rGRFT ainsi obtenue présente les mêmes performances que celle produite par synthèse par Escherichia coli. L’efficacité de la protéine est montrée contre différents isolats de VIH-1 de première transmission par voie sexuelle, des clades A et C prévalents en Afrique subsaharienne et des clades B prévalents dans les pays de l’ouest. « Nous montrons aussi que rGRFT inhibe l’infection par le VIH-1 de tissu cervical explanté et mis en culture. La protéine ne provoque pas la production des cytokines pro-inflammatoires connues pour recruter les cellules cibles du VIH-1 dans la muqueuse, ni celles connues pour promouvoir la réplication du VIH-1 dans les cellules infectées. »
Modèle de vagin irrité de lapine.
De plus, rGRFT a également été testé avec succès sur un modèle de vagin irrité de lapine, utilisé pour l’étude les microbicides topiques. Il n’a pas d’activité mitogène sur des cultes de lymphocytes humains. Enfin, il présente un profil de sécurité acceptable à des concentrations plus de 10 000 fois supérieures à la D50 antivirale.
Au total, les produits candidats pour être utilisés dans les topiques microbicides doivent satisfaire à de très nombreux critères : efficacité, activité contre les souches circulantes, sélectivité antirétrovirale, prévention de la transmission de cellule à cellule, stabilité… et pour finir la possibilité d’une production en grandes quantités au coût le plus bas.
Le griffithsin semble posséder ces qualités, notamment grâce à la technique développée par O’Keeffe et coll. Il a maintenant le statut validé de protéine candidate à inclure dans un microbicide pouvant être mis à l’essai chez les humains.
Proc Natl Acad Sci USA, édition en ligne avancée.
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