En France, aucune enquête ne mesure la prévalence du trouble bipolaire (qui serait estimée, en médiane, à 0,7 % en Europe), tandis que les troubles dépressifs ne sont recensés qu'à travers les baromètres santé 2005 et 2010, déclaratifs, qui évaluent à 7,8 % la prévalence des épisodes dépressifs caractérisés.
Dans leur étude, Lynda Badjadj et Christine Chan Chee (Santé publique France) se sont penchées sur la base nationale du Recueil d'information médicalisée en psychiatrie (RIM-P), dans laquelle les TB et TD sont codés selon la 10e révision de la classification internationale des maladies (CIM-10) de l'OMS.
Chaque année entre 2010 et 2014, 80 000 en moyenne, et jusqu'à 95 000 patients sont pris en charge pour troubles bipolaires (soit une prévalence de 0,15 %). Ils sont trois à quatre fois plus pour les troubles dépressifs qui affectent entre 320 000 et 350 000 personnes. La prévalence de ces troubles mesurée dans le RIM-P est de 0,55 %… bien en deçà des 5 à 8 % retrouvés dans les enquêtes déclaratives. Ce hiatus s'explique, selon les auteurs, par un recours au psychiatre limité à 8 à 15 % des cas déclarés de troubles dépressifs, leur suivi se faisant le plus souvent en libéral, par le généraliste.
Augmentation des prises en charge pour TB
Si les taux annuels de prise en charge pour les TD sont stables, ceux des troubles bipolaires augmentent de 2,6 % par an chez les hommes et de 3,4 % chez les femmes. La raison : les cliniciens poseraient facilement un tel diagnostic dans les formes cliniques peu spécifiques (cas subsyndromiques) ou à la place du diagnostic de psychose.
Pour les deux types de troubles, les femmes sont sur-représentées, à hauteur de 1,7 fois plus pour les TD (entre 650 et 690 femmes pour 100 000 habitants vs 380 à 420 hommes pour 100 000), et 1,6 fois plus, pour les TB (163 à 190 femmes pour 100 000 habitants vs 105 à 121 hommes pour 100 000). Les troubles de l'humeur, qui se manifestent surtout à partir de 15 ans, augmentent avec l'âge et culminent entre 50 et 54 ans, avant de redescendre. À une exception près : la prévalence de dépression repart à la hausse chez les hommes autour de 90 ans, sous le coup du deuil, d'une solitude mal vécue, ou des polypathologies.
Le suivi ambulatoire exclusif domine (il représente 55,7 % des prises en charge pour TB, et 64,8 % pour TD), devant l'hospitalisation exclusive (19,6 % pour les TB, 18 % pour les TD) et la combinaison des deux (24,7 % pour TB, 17,2 % pour TD).
Disparités géographiques
Chez les hommes comme chez les femmes, des taux de prise en charge supérieurs de 20 % au taux national ont été observés en Bretagne et Bourgogne-Franche-Comté pour les TD, et dans le Sud-Ouest pour les TB avec un gradient Nord-Est/Sud-Ouest prononcé. Face à une telle disparité allant du simple au double, les prévalences ne sauraient tout expliquer : jouent aussi des différences dans l’offre de soins et dans la prise en charge des établissements de santé, ainsi que dans les pratiques de codage, avancent les auteurs. Et d'appeler à renforcer la surveillance épidémiologique, grâce à l'exploitation des données du RIM-P et du système national d'information inter-régimes de l'assurance-maladie (SNIIRAM), avec l'espoir de mieux détecter et prévenir la chronicisation des troubles et le passage à l'acte suicidaire.
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