Emmanuel Macron souhaitait en faire la grande réforme sociétale de son second quinquennat. « C’est le moment de le faire… Nous le ferons », avait-il glissé à Line Renaud, fervente défenseuse de l'euthanasie, en lui remettant la Grand-Croix de la Légion d'honneur en septembre dernier. Si le sujet s'avère plus épineux que prévu, une réflexion sur la fin de vie et une éventuelle évolution vers une aide active à mourir est lancée sous de multiples formes.
La convention citoyenne, soit 173 Français tirés au sort, s'est réunie pour la première fois le 9 décembre, sous l'égide du Conseil économique social et environnemental (Cese). Sa mission est de répondre à la question suivante : « Le cadre d'accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d'éventuels changements devraient-ils être introduits ? ». « Soyez libres de vous émanciper des idées reçues, de dire vos doutes, vos désaccords », a déclaré Elisabeth Borne en ouverture.
Ses travaux seront rendus en mars. En parallèle, deux ministres, Agnès Firmin Le Bodo (en charge de l'Organisation territoriale et des Professions de santé) et Olivier Véran (porte-parole du gouvernement, en charge du Renouveau démocratique), consultent à tout va, y compris en Espagne, Italie, Belgique et Suisse. Et des groupes parlementaires travaillent la question, en évaluant la loi Leonetti-Claeys de 2016 (mission confiée non sans polémique à Olivier Falorni, auteur d'une proposition de loi pour une fin de vie libre et choisie). La Cour des comptes doit remettre un rapport sur les soins palliatifs d'ici à juin 2023 aux députés. Dans les territoires, les Espaces de réflexion éthique régionaux (Erer) organisent une quarantaine de réunions, conviant des professionnels de santé, des lycéens, des patients, ou encore le grand public. Et l'écrivain Erik Orsenna doit établir un glossaire « des mots de la fin de vie ».
Le CCNE en faveur d'une assistance au suicide
La réflexion ne part pas de rien. Le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) a dessiné dans son avis 139, rendu le 13 octobre 2022, les contours d'une aide active à mourir qui serait éthique. Constatant que la sédation profonde et continue de la loi de 2016 ne répond qu'aux situations où le pronostic vital est engagé à très court terme, le CCNE propose qu'une assistance au suicide - donner les moyens à une personne de se suicider - soit ouverte aux personnes majeures, atteintes de maladies graves et incurables provoquant des souffrances physiques ou psychiques réfractaires, dont le pronostic vital est engagé à moyen terme.
La France suivra-t-elle in fine l'avis du CCNE - soit un ajustement à la marge de la loi Leonetti-Claeys ? Ira-t-elle jusqu'à la légalisation de l'euthanasie (quand l'injection létale est réalisée par le médecin) ? Quel sera le rôle dévolu au corps médical ? C'est le président de la République qui devrait trancher, sans qu'on sache encore quelle place sera laissée à l'expression de la représentation nationale.
L'urgence du développement des soins palliatifs
Le débat clive la société. Si l'association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) soutient que 78 % des Français attendent une légalisation de l'aide active à mourir, la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (Sfap) fait valoir que 85 % des soignants y sont défavorables. Seulement 12 % des médecins accepteraient de faire une prescription létale, 6 % envisageraient de l'administrer. Le Conseil national de l'Ordre des médecins se veut « attentif ». « Le médecin doit-il être accompagnateur ? Sûrement. Effecteur ? Je ne crois pas. Ce n'est pas son rôle. Et l'Ordre n'est pas favorable à l'euthanasie », a rappelé son président le Dr François Arnault, insistant dans tous les cas sur l'importance d'une clause de conscience.
Au-delà des divergences, un consensus se dégage sur la nécessité de développer les soins palliatifs, qui font l'objet d'un cinquième plan 2021-2024, piloté par les Drs Olivier Mermet, généraliste, et Bruno Richard, chef du service des soins palliatifs au CHU de Montpellier. Doté de 171 millions d'euros, il vise à garantir un accès à ces soins à tous les citoyens sur tout le territoire.
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