La troisième vague de Covid-19 s’est abattue sur la Russie alors qu’une grande partie de la population pensait à l’instar de Vladimir Poutine que « la pandémie était en passe d’être jugulée dans le pays ». Les mises en garde des épidémiologistes qui avaient prévu depuis plusieurs mois la troisième vague sont restées lettre morte. « Cela faisait un moment que nous en parlions, personne ne nous a crus… maintenant on y est », a déclaré l’épidémiologiste Alexander Gorelov à l’agence Tass.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 737 morts le 5 juillet, un record absolu depuis le début de la pandémie, entre 600 et 700 les jours précédents et 25 142 nouveaux cas de contamination le 4 juillet. Ces records s’expliquent par le variant Delta, d’ores et déjà responsable de 90 % des nouveaux cas recensés dans la mégapole moscovite selon le maire Sergueï Sobianine.
L’imprévoyance des autorités politiques et sanitaires ne constitue que l’un des facteurs qui a précipité l’arrivée de la nouvelle vague pandémique. La gestion chaotique de la campagne vaccinale, la méfiance de la population pour les vaccins en général et pour ceux « maison » en particulier, et enfin les impératifs électoraux, ont fait le reste.
Une campagne vaccinale désastreuse
Commencée en décembre, la campagne vaccinale n’a pas été à la hauteur des ambitions du chef de l'État qui avait déclaré que 60 % de la population devait être vaccinée avant l’automne. Les autorités ont multiplié erreurs et maladresses, par exemple avec le dénigrement systématique des vaccins occidentaux par les médias d’État, qui a renforcé l’intérêt de la population pour les vaccins utilisés hors de leurs frontières. Lors d’un sondage effectué par l’institut Levada, 62 % des personnes interrogées rejettent l’idée d’une vaccination avec Spoutnik alors que 85 % envisageraient sans crainte un vaccin étranger.
Par ailleurs, les Russes ne peuvent pas choisir leur vaccin. Certes la Russie en a homologué quatre : Spoutnik V, Spoutnik light (institut Gamaleïa), EpivacCorona (Vektor), Kovivak (Tchoumakov). Mais seuls les deux Spoutnik sont disponibles dans l’ensemble du pays.
Carences de la communication
Enfin la campagne de vaccination a souffert de la faiblesse de la communication, qui a laissé libre place aux « fake news » ayant envahi les réseaux sociaux. Les autorités sanitaires ne se sont pas étendues, loin s’en faut, sur les effets secondaires possibles des différents vaccins et des précautions à prendre après les injections. Enfin la question des contaminations postvaccinales a été totalement occultée. Le maire de Moscou et le gouverneur de Saint-Pétersbourg se sont contentés de conseiller à leurs administrés de se faire revacciner…
La politique d’abord
Selon le site « Our world in data », à la date du 2 juillet, seulement 16,30 % de la population avait reçu une dose de vaccin et 12,6 des individus étaient complètement vaccinés ! Certes la Russie est l’un des pays les plus vaccinosceptiques du monde mais le phénomène actuel est absolument inédit. Certains politologues n’hésitent pas à y voir un geste politique qu’ils assimilent à une nouvelle forme de dissidence…
Pour le Kremlin cette troisième vague tombe au plus mauvais moment. L’économie se remet difficilement du confinement de 2020, les élections législatives sont prévues pour le 9 septembre. Russie unie, le parti du président, n’a pas de concurrent mais une abstention massive affaiblirait le chef de l’État.
C’est dans ce contexte qu’il faut replacer les récentes décisions pour enrayer la pandémie : refus de la vaccination obligatoire pour l’ensemble de la population, seuls les fonctionnaires y sont assujettis ; pas de quarantaine mais un pass sanitaire pour aller au café ou au restaurant. Reste que ces demi-mesures n’ont pas jusqu’à présent fait preuve de leur efficacité et que si la vague épidémique continue à progresser Vladimir Poutine pourrait être contraint à prendre des mesures drastiques.
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