Le Brexit, et maintenant ? La question du maintien des règles communautaires (jusqu'à de possibles nouveaux accords bilatéraux qui pourraient prendre plusieurs années) se pose aussi en matière de soins, de protection sociale, de règles d'exercice professionnel ou d'institutions en santé.
Les directives qui harmonisent la formation et les droits des médecins à exercer dans l’UE devraient rester en vigueur outre-Manche. Personne n’imagine que le Royaume-Uni ne réintroduise des cursus nationaux alors qu’il a participé à l’élaboration des directives européennes sur ce sujet et forme traditionnellement moins de médecins et de professionnels de santé que ses voisins. Les praticiens allemands sont depuis des lustres indispensables au fonctionnement des hôpitaux du NHS, sans parler de tous les médecins issus des pays du Commonwealth. Les experts tablent sur la signature d’accords spécifiques qui permettront aux médecins de continuer à travailler sans difficulté outre-Manche.
En ce qui concerne les soins transfrontaliers, la directive qui garantit aux patients de l’UE, sans formalités, des soins ambulatoires et hospitaliers urgents dans les autres États membres cessera sans doute de s’appliquer pour les patients britanniques dans l’Union – et inversement. On reviendra au système, plus lourd et complexe, des remboursements au cas par cas, en fonction d’accords bilatéraux (comme cela existe par exemple pour les patients français soignés en Suisse). Les accords particuliers, portant sur des soins hospitaliers programmés, pourraient également être revus.
La réglementation pharmaceutique européenne ne devrait guère changer pour les Britanniques. On les voit mal autonomiser leur législation alors que des États non-membres – comme la Norvège et l’Islande – appliquent en totalité le droit européen en la matière. Les spécialistes s’attendent à des accords « à la norvégienne » entre le Royaume-Uni et l’Union. En revanche, les conséquences économiques pourraient être plus lourdes pour les industriels du médicament, redoute leur association (ABPI), qui avait mené une campagne anti-Brexit très active.
Enfin, la question du siège de l’Agence européenne du médicament (EMA) devrait être réglée avant le « divorce » effectif. Les trois pays entrés le plus récemment dans l’UE, à savoir la Bulgarie, la Roumanie et la Croatie, font valoir qu’ils ne disposent encore d’aucune structure officielle de l’Union, et s’estiment fondés à accueillir l’EMA… Les lobbies de la pharmacie allemande, italienne et suédoise proposent eux aussi d’accueillir cette prestigieuse agence. Strasbourg constitue un cas particulier car la ville abrite déjà la « Direction européenne de la qualité du médicament » (DEQM), réunissant la Pharmacopée européenne et toute une série de laboratoires de contrôle. La DEQM participe à la préparation des autorisations de mise sur le marché (AMM) délivrées par l’EMA, à Londres. Certains suggèrent une relocalisation de l’EMA à Strasbourg pour des raisons pratiques…
Vice-président de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), le Dr Claude Pigement fait valoir qu'une candidature française serait parfaitement légitime. La France ne dirige pas de grande agence européenne, dispose d'une industrie pharmaceutique de premier plan et occupe géographiquement une place centrale, plaide-t-il. « C’est au gouvernement de se prononcer sur cette hypothèse », précisent au « Quotidien » des représentants des laboratoires, tout en ajoutant qu'ils verraient d'un bon œil une telle démarche des autorités françaises.
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