Prescription d'un traitement alternatif, aménagement des « recos », liste de maladies prioritaires… Pour faire face aux pénuries de médicaments, des plans B peuvent être mis en place, au prix d'un surcroît de stress pour les patients et de charge de travail pour les professionnels.
Depuis août, les patients atteints de la maladie de Parkinson font face à un événement inédit par son ampleur et sa durée : une rupture de stock du traitement symptomatique Sinemet (Lévodopa Carbidopa), prévue pour s'étendre jusqu'à mars 2019.
En théorie, les patients traités par Sinemet qui n'ont plus accès à leur traitement doivent se rabattre sur Modopar (Lévodopa) ou ses génériques. En pratique, ce n'est pas si simple : toute la chaîne du soin se retrouve engorgée. « Notre infirmière référente et notre infirmière de coordination sont bombardées de questions de patients et de médecins, détaille le Pr Marie Vidailhet, coordinatrice du centre expert Parkinson de la Pitié Salpêtrière (AP-HP). L'ANSM recommande aux patients de consulter leur médecin traitant. Cela se traduit par une surcharge de travail et une angoisse très importante. On engorge un système médical déjà en tension, alors que les études de Santé Publique France nous promettent une hausse de 50 % de patients parkinsoniens d'ici à 2030. »
Le Pr Vidailhet craint une réaction en chaîne si les stocks de Modopar venaient à s'épuiser à leur tour. « Il faudrait alors se reporter sur les produits mixtes – Lévodopa/carbidopa/entacapone – pas forcement adaptés pour tous les patients, et notamment les patients instables qui représentent les 3/4 de notre file active », prédit-elle.
Gestion « à la boîte près »
Les hospitaliers sont aussi en première ligne. Face aux tensions d’approvisionnement en immunoglobulines polyvalentes, les pharmaciens de l'AP-HP ont suivi les recommandations du comité scientifique technique temporaire mis en place par l'ANSM, priorisant certaines indications. Ainsi, l'immunoglobuline polyvalente disponible doit aller en priorité aux patients atteints de déficits immunitaires primitifs, de syndrome de Guillain-Barré, d’érythroblastopénie, de formes sévères de purpura thrombopénique idiopathique, de la maladie de Willebrand, pour le traitement du rejet de greffe ou la maladie de Kawasaki.
À l'échelle de l'AP-HP, « nous devons procéder à une répartition entre les différents établissements, avec une gestion à la boîte près », explique le Pr Pascal Paubel (AGEPS). Pour les antibiotiques, comme l’amoxicilline/acide clavulanique, c'est une pénurie mondiale et durable qui frappe les hôpitaux. « On doit se reporter sur d’autres spécialités ou d'autres posologies, explique le Pr Paubel. Le problème est que l’on se retrouve assez rapidement avec des phénomènes de ruptures de stock en cascade. »
Le dernier niveau d'adaptation à une rupture de stock est l'aménagement des recommandations. Un exercice auquel a dû se livrer la commission technique des vaccinations de la HAS, à laquelle appartient le Pr Daniel Floret. « Pour le BCG, souligne-t-il, il a fallu exclure des recommandations des catégories professionnelles pour qui la vaccination était jusqu'alors obligatoire ».
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