DEPUIS PLUSIEURS MOIS, la Cour de justice des communautés européennes examine le dossier du régime de propriété des pharmacies d’officine, à la demande de la commission européenne qui veut mettre fin au monopole de la possession des pharmacies par les pharmaciens (« le Quotidien » du 2 février). La Cour de justice vient de statuer et s’est prononcée pour le droit des États membres à réserver aux seuls pharmaciens l’exploitation d’une officine de pharmacie, considérant que les restrictions sur la propriété du capital étaient justifiées par des motifs de santé publique, alors que la commission européenne estime pour sa part que ces restrictions vont à l’encontre du sacro-saint dogme de la libre circulation des capitaux. Dans ses attendus, la Cour de justice estime notamment que les médicaments « se distinguent substantiellement des autres marchandises » et que les législations nationales, qui vont parfois à l’encontre du droit communautaire, se justifiaient par l’objectif de parvenir « à un approvisionnement sûr et de qualité ». La Cour estime par ailleurs que « les non-pharmaciens n’ont pas, par définition, une formation, une expérience et une responsabilité équivalentes à celles des pharmaciens (...) Dans ces conditions, il convient de constater qu’ils ne présentent pas les mêmes garanties que celles fournies par les pharmaciens ». Ce faisant, la Cour de justice n’a fait que reprendre les arguments développés par le français Yves Bot, avocat général de la Cour de justice, qui s’était clairement prononcé pour les mêmes motifs à l’ouverture du capital des pharmacies d’officine.
Sécurisation.
Cette décision a fait réagir tant les syndicats que l’Ordre national des pharmaciens. Dans un communiqué, la FSPF (Fédération des syndicats pharmaceutiques de France) se « réjouit de cet arrêt qui confirme le lien étroit entre la propriété du capital par un professionnel indépendant et la nécessaire sécurisation du circuit de dispensation des médicaments ». Même tonalité du côté de l’Ordre dont le président, Jean Parrot, estime que « cette décision fait clairement prévaloir l’intérêt supérieur des patients sur le droit ordinaire du commerce ».
Mais d’autres professionnels de santé pourraient bien se réjouir aussi de cet avis de la Cour de justice des communautés européennes. La commission européenne a en effet traduit devant cette même cour le gouvernement français pour non-respect du droit communautaire, l’Europe cherchant à contraindre la France à changer sa réglementation actuelle relative à l’ouverture du capital des laboratoires d’analyses médicales. La législation hexagonale prévoit à ce sujet que 75 % au moins du capital de ces laboratoires d’analyses doit être détenu par des biologistes, et que seulement 25 % du capital peut être détenu par des investisseurs extérieurs à la profession. Nul doute que la décision de la cour relative aux pharmacies d’officine ne mette un peu de baume au cur des biologistes par ailleurs passablement échaudés par le projet de loi Bachelot, actuellement en discussion au Sénat, et dont l’article 20 propose de procéder à une réforme de leur activité… par ordonnance.
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