ON EN CONSTRUIT. Mais, en quinze ans, la population carcérale a doublé, passant de 35 000 à 62 000. La cellule individuelle est donc un mythe qui ne se transformera en réalité que si les pouvoirs publics conscarent des budgets à la création de lieux de détention modernes et salubres. La prison française mérite la phraséologie qui s’applique aux films d’horreur. Les conditions sanitaires sont déplorables, la promiscuité, la violence, les viols y sont monnaie courante. Pour un détenu, les chances de rédemption sont à peu près nulles. Un jeune condamné qui entre en prison en ressortira avec une haine tenace pour la société qui aura ajouté la détresse matérielle et morale à la privation de liberté. Les prisons françaises sont dénoncées partout, notamment dans les instances européennes et par l’Observatoire des prisons. Dès lors, le projet gouvernemental ne semble pas de nature à améliorer les conditions carcérales. C’est plutôt un moyen pour limiter les mises en détention, dont le nombre, au regard des places disponibles, fait scandale.
Des lois plus dures, mais l’intendance ne suit pas.
L’absence de financement est en outre en parfaite contradiction avec la sévérité accrue de la justice à l’égard des délinquants et des criminels. Au nom de la sécurité, le gouvernement a fait adopter des lois plus dures. Ce qui entraîne un plus grand nombre de condamnations, et des peines plus longues. Aujourd’hui, les pouvoirs publics sont en fait obligés de faire marche arrière. Le recours au bracelet électronique constitue un aveu : il faut limiter impérativement le nombre de détenus. La seule peine prévue par la loi, c’est la détention. Tout le reste, c’est-à-dire les conditions de vie parfois inhumaines, augmente indûment la peine infligée par le juge. Du coup, par manque de place, c’est la détention elle-même, la seule peine prévue par le Code pénal qui va disparaitre dans beaucoup de cas.
Inutile d’ajouter que, si la société française est incapable d’accorder aux détenus une existence correcte, leur avenir est compromis. On s’efforce de faire travailler le plus grand nombre de prisonniers mais leur réinsertion sociale exige aussi qu’ils soient, au préalable, traités humainement. Les exemples de condamnés qui retournent à une vie civile honnête et bien remplie sont très rares. La situation est telle que le recours au bracelet électronique est insuffisant. Les mises en détention préventive sont beaucoup trop nombreuses et c’est dans la procédure judiciaire elle-même qu’il faut apporter des aménagements. Il y a certes des raisons (de sécurité, de précaution dans l’enquête) pour qu’un suspect, c’est-à-dire une personne présumée innocente, aille en prison. Mais si ces raisons n’existent pas, le suspect doit rester en liberté. Dans le cas précis de la détention préventive, on trouve tous les ingrédients de la plus scandaleuse des injustices. Imaginez celui qui n’a rien à se reprocher mais doit passer quelques jours (ou quelques semaines) en cellule sur l’ordre d’un juge, et se retrouve victime de brutalités en prison. Au nom du droit, on commet tous les jours des erreurs judicaires programmées. Le problème de la prison est donc inséparable du problème plus général du fonctionnement de la justice.
Beaucoup de réformes, peu de résultats.
Il se trouve que la ministre, Rachida Dati, a fait beaucoup de réformes. Elle en paie le prix puisqu’elle va abandonner ses fonctions ministérielles dans quelques jours. Magistrats et avocats se sont battus avec vigueur contre les dispositions que leur ont imposées le gouvernement et le parlement. Il était peut-être utile ou nécessaire de procéder à ces réformes, mais les grands procès en cours, celui du drame de Toulouse et celui de l’assassin présumé du préfet Érignac, ne donnent nullement l’impression que la justice est plus sûre d’elle-même, plus sereine et plus efficace. Quand on se rappelle le scandale d’Outreau, le mal qui a été fait à des innnocents, contraints de faire des années de préventive, déshonorés pour rien, et aujourd’hui encore sous le choc, on se dit qu’un juge qui se respecte doit y réfléchir à deux fois avant de mettre un homme ou une femme en prison. Mais non, la loi lui permet de les jeter dans une cellule, même s’il est prouvé un plus tard qu’ils n’ont commis aucun crime ou aucun délit. A l’heure où les prisons débordent, peut-être qu’une indulgence de précaution devient un ardent devoir.
Le 19 janvier, le Premier ministre visitait à Roanne une prison neuve, mais dont la mis een fonction a été retardée par des malfaçons
POUR DÉGAGER DE LA PLACE, ON POURRAIT DÉJÀ ÉVITER LA DÉTENTION PRÉVENTIVE
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