L’acupuncture, née en Chine il y a plus de 3 000 ans, épouse une ancienne conception de la physiologie dans laquelle la santé était le résultat de l’harmonie entre les fonctions de l’organisme et entre le corps et la nature (1). Selon cette conception, le blocage du xi ou qi, ou énergie vitale du corps, diffuse le long de « méridiens ». L’insertion d’aiguilles à des endroits spécifiques le long de ces méridiens permettrait de restaurer le flux normal du qi.
Les bases de l’acupuncture sont ainsi très éloignées de l’enseignement des universités françaises, et soulèvent la question de l’efficacité réelle et de la sécurité d’emploi de cette technique.
Une efficacité difficile à démontrer
L’évaluation de l’efficacité de l’acupuncture en respectant les critères de la médecine factuelle reste difficile et les résultats sont souvent contradictoires. Le choix du protocole est essentiel. Les études se heurtent par ailleurs aux difficultés du double insu et de la définition d’un groupe témoin approprié (2,3).
Mais l’efficacité thérapeutique de l’acupuncture a été vérifiée par de nombreux essais contrôlés avec allocation aléatoire. Leur nombre dans certains domaines est tel que des méta-analyses ont pu être réalisées. Mais peu de données convaincantes ont été réellement démontrées et c’est surtout dans le traitement de la douleur que les données expérimentales sont les plus robustes (4,5), comme dans celui de la prévention des nausées et des vomissements.
Une action sur la libération d'adénosine, d'opoïdes et d'hormones du stress
Sur le plan du mécanisme d’action, il a été montré que l’anesthésie locale au point d’insertion des aiguilles d’acupuncture bloque leurs effets, ce qui suggère que le mode d’action de l’acupuncture est lié à l’innervation. L’acupuncture augmente par ailleurs le débit sanguin local, et elle est associée à une libération d’adénosine, dotée d’effets antalgiques (6). L’acupuncture est également associée à la libération d’opioïdes endogènes au niveau du tronc cérébral et l’imagerie fonctionnelle du cerveau chez l’homme a montré les effets immédiats et prolongés de l’acupuncture au niveau du système limbique (6).
De plus, des études réalisées en faisant appel au PET scan ont montré que l’acupuncture augmente l’activité des récepteurs mu pendant plusieurs jours, et a également des effets sur la libération d’hormones de stress (6).
Ainsi, les efforts mis en œuvre pour caractériser les effets de l’acupuncture en termes de physiologie médicale classique restent pour l’instant imparfaits. Sur le plan clinique, les effets de l’acupuncture sont souvent modérés, elle devrait donc être associée aux stratégies thérapeutiques « occidentales » validées. Dans les cas les plus simples, comportant un seul point d’acupuncture, son utilisation par des non spécialistes devrait être encouragée.
(1) Berman BM, et al. Acupuncture for chronic low back pain. N Engl J Med 2010;363(5):454-61
(2) Coutaux A. Traitements physiques de la douleur (TENS et acupuncture). Revue du Rhumatisme Monographies 2017;84(1):81-5
(3) Calvino B. L’analgésie acupuncturale : une pratique controversée. « Qu’est ce qui sous-tend l’analgésie induite par acupuncture, sham ou réelle ? ». Douleurs : Evaluation - Diagnostic - Traitement 2017;18(1):3-8
(4) Haake M, et al. German Acupuncture Trials (GERAC) for chronic low back pain: randomized, multicenter, blinded, parallel-group trial with 3 groups. Arch Intern Med 2007;167(17):1892-8
(5) Berman BM, Langevin HM, Witt CM, Dubner R. Acupuncture for chronic low back pain. N Engl J Med 2010;363(5):454-61
(6) Chon TY, Lee MC. Acupuncture. Mayo Clin Proc 2013;88(10):1141-6.
Article précédent
Réadaptation par l’imagerie motorisée graduelle
Article suivant
Un risque suicidaire accru
Repenser les méta-analyses ?
En situation chronique post-chirurgicale
Réadaptation par l’imagerie motorisée graduelle
Quels effets pour l'acupuncture ?
Un risque suicidaire accru
De la méthadone, bien sûr !
Quand on croit ne plus pouvoir rien faire...
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature