Trois ans de prison ferme, et une peine d'inéligibilité de cinq ans, c'est ce qu'a requis le parquet ce mercredi à l'encontre de Jérôme Cahuzac, à l'issue de 5 jours d'un procès retentissant. Pour l'accusation, ces trois ans sont le prix à payer pour « une vie familiale enracinée dans la fraude pendant plus de vingt ans ». L'ancien ministre du budget de François Hollande, son ex-épouse et quelques banquiers, comparaissent jusqu'au 15 septembre pour fraude fiscale et blanchiment de fraude.
À l’encontre de Patricia Cahuzac, le parquet a requis deux ans de prison ferme. La procureur Éliane Houlette a précisé que l'ex-épouse avait « surpassé » son mari « dans la dissimulation de ses avoirs au fisc. Le seul élément qui distingue vos deux situations, a-t-elle ajouté, c'est que lui était ministre ».
L'audience de ce matin était consacrée aux réquisitions des parties civiles, puis du parquet financier. Un sale moment pour les époux Cahuzac qui n'ont guère été ménagés. L'avocat de la direction générale des finances publiques a cruellement rappelé qu'en 2011, alors qu'il était président de la commission des finances de l'Assemblée, Jérôme Cahuzac avait assuré que « la dimension citoyenne de l'impôt est un principe exigeant qui implique de veiller à ce que chacun s’acquitte de l’impôt. La fraude et l’évasion fiscale fragilisent le contrat social ». L'ancien ministre garde les yeux fixés au sol.
Le monde merveilleux de la fraude fiscale
La parole est ensuite donnée au parquet. Le vice-procureur Jean-Marc Toublanc attaque fort : « Bienvenue dans le monde merveilleux de la fraude fiscale », commence-t-il avant de rappeler que le total des avoirs dissimulés par les deux époux se monte à 3,5 millions d'euros. Une somme qui les place selon lui « parmi les plus gros fraudeurs français ».
Ironiquement, il précise que parmi ces millions, une partie n'appartenait peut-être pas à Jérôme Cahuzac, mais à « un mouvement politique mort-né ». Allusion à la ligne de défense de l'ancien ministre qui assure que les 600 000 euros de son compte caché ne lui appartenaient pas, et devaient servir à financer les activités politiques de feu Michel Rocard. Jean-Marc Toublanc rappelle cependant que l'accusé s'est toujours comporté « comme le seul propriétaire de ces fonds ». « Chez Jérôme Cahuzac, continue-t-il, la vérité est un mirage qui disparaît dans le sable de sa mauvaise conscience. »
Jean-Marc Toublanc énumère les achats effectués avec cet argent dissimulé. Une piscine de 43 000 euros pour la villa en Corse, 20 000 euros pour des vacances en famille aux Seychelles, les études d'un enfant et l'appartement d'un autre également payés par ce moyen. Sans oublier 127 000 euros dépensés entre 2005 et 2009 à l'Hôtel Hermitage de La Baule. Jérôme et Patricia Cahuzac, assis non loin l'un de l'autre au premier rang, gardent les yeux fermés.
Trahison du serment d'Hippocrate
La procureure n'y va pas non plus par quatre chemins. Aux Drs Jérôme et Patricia Cahuzac qu'elle qualifie de délinquants en col blanc, elle rappelle qu'en blanchissant des revenus tirés de leur clinique capillaire, ils ont trahi le serment d'Hippocrate, notamment dans ce passage : « Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire ». Très remontée, elle ajoute que l'ancien ministre, par ses dénégations successives a « porté atteinte à l'image du pays, devenu la risée du monde ».
Toujours à l'attention de Jérôme Cahuzac, Éliane Houlette rappelle qu'il est fils de résistant : « Vous avez sacrifié tous les principes éducatifs, civiques et républicains portés par votre famille par appât du gain ». À la clôture des réquisitions, alors que la salle d'audience se vide, Jérôme Cahuzac reste assis, seul, les yeux dans le vague.
Le procès doit s'achever jeudi 15 septembre par les plaidoiries de la défense. Le verdict sera alors mis en délibéré.
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