Chère Consœur (texte du Dr Laure Artru: «Déserts médicaux : l"heure n'est plus aux états d'âme»), Votre lettre de la page 11 du n° 9866, un vrai appel au secours, m’a beaucoup peiné. Cependant les pages suivantes 12 et 13 du «Quotidien» apportaient déjà un début de réponse. Qu’y lit-on ? Dépistage du cancer du sein = mammographie. Céphalée aiguë urgente = rechercher une lésion neurovasculaire par TDM ou une IRM en urgence. Idem (petit encadré) pour les céphalées rapidement progressives. Dans l’abdomen aigu ? TDM urgente pour localiser une perforation, une ischémie ou, scanner, si suspicion d’hémopéritoine, etc. Et il ne s’agit là "que" de la radiologie !
Tout cela pour dire que la médecine actuelle ne peut plus se dispenser des technologies, lesquelles sont des investissements très lourds manipulés par des équipes très qualifiées… qui n’émigrent pas encore à la campagne.
J’ai 29 ans, jeune généraliste frais émoulu, ma femme est juriste spécialisée et nous avons un petit garçon de 2 ans. Je veux pratiquer une bonne médecine et une médecine d’équipe comme apprise, pouvoir suivre mes malades hospitalisés, être en lien direct avec les autres équipes hospitalières, suivre facilement ma formation continue et avoir droit comme tout le monde à quelques vacances et peut-être… à quelques week-ends tranquilles ?
Je voudrais être honoré et non "déshonoré" ou même salarié, peu importe, mais rémunéré à une juste valeur alors que maintenant la coupe de cheveux est plus chère qu’une de mes futures consultations et que dans le dernier journal de mon Berry natal, une femme, qui a un «don», aide des gens inquiets pour 30 euros…
Pas le seul concerné
Je désire aussi que mon fils et d’éventuels à venir fassent de bonnes études et puissent plus tard, comme mon épouse et moi-même, aller à l’Université… Et donc de bonnes écoles primaire puis secondaire.
Enfin, je ne veux surtout pas être tracassé par une sécurité sociale qui me demandera de faire son travail pendant une heure chaque soir et de surcroît me pénalisera quand ce sera elle qui fera une erreur ! Je veux vivre dignement, tout simplement, et pouvoir payer correctement une secrétaire sans demander aide à ma femme qui a bien d’autres choses à faire.
Alors, voyez-vous, je ne vois vraiment pas comment je pourrais m’installer dans le fin fond du Tarn et Meuse ou du Lot et Moselle. D’ailleurs, il n’y a pas que moi de concerné, il y a aussi ma femme qui a autant droit à suivre sa carrière professionnelle.
Bref, n’allons pas plus loin. Le problème est que si les technologies ne peuvent pas encore aller au chevet du malade, il faut tout faire pour que l’inverse soit possible. Et sur ce point… il y a d’énormes progrès à faire. Certes, les bibliothèques viennent aux médecins par le Net, tout comme les visioconférences et les téléconsultations mais cela ne résoudra aucunement les problèmes humains de l’éloignement des médecins des centres décisionnels.
Va-t-on vers une médecine "hors-Sol" pilotée dès le départ et de loin par des logiciels IA dépendants, tant sur la démarche diagnostique que simultanément économique ? Vous avez raison, la situation est aussi grave que lorsque le dernier commerce quitte un village qu’on abandonne ; et tout cela, est-ce que je l'écrirais si j’avais vraiment 29 ans ?J’en ai… beaucoup plus ! Très confraternellement.
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