Dans un premier temps, nous avons relaté la position de la HAS quant à l'utilisation des marqueurs cardiaques dans la maladie coronarienne (1) (voir Généraliste n° 2538 du 8 octobre 2010). Nous présentons à présent le volet « insuffisance cardiaque » (IC) de ce texte.
LES MARQUEURS DISPONIBLES (2)
Les troponines
Les troponines, outre leur utilisation au cours de la maladie coronarienne, peuvent servir à établir un pronostic - en cas d’élévation - dans l’insuffisance cardiaque ou pour identifier les patients à risque accru de développer une insuffisance cardiaque lors de chimiothérapie cardiotoxique (anthracyclines surtout).
Les peptides natriurétiques
-› Les principaux peptides natriurétiques sont l’ANP (atrial natriuretic peptide), le BNP (brain natriuretic peptide) et le CNP (C-type natriuretic peptide). Le NT-proBNP (N-Terminal pro-brain natriuretic peptide) est, avec le BNP, le produit de clivage d’un précurseur, le pro-BNP. Seuls l’ANP et le BNP (et donc le NT-proBNP) sont majoritairement secrétés par le cardiomyocyte, l’ANP dans les oreillettes, le BNP dans l’ensemble du cœur. ANP et BNP ont une action antagoniste du système rénine angiotensine/aldostérone/vasopressine, exerçant ainsi des effets diurétique, natriurétique et vasodilatateur. D'où leur élévation plasmatique en cas d’insuffisance cardiaque (présence d'une surcharge hydrique et d'une hypertension artérielle).
-› Le dosage de l'ANP est peu utilisé. Le BNP et le NT-proBNP peuvent être dosés dans des situations très variées : diagnostic de l’insuffisance cardiaque aiguë ou chronique chez le patient présentant des symptômes incertains ; dépistage de l’IC dans une population ; estimation de la sévérité de l’IC (augmentation proportionnelle) ; évaluation du pronostic de morbidité et de mortalité de l’IC dans certaines situations ; optimisation de la prise en charge thérapeutique dans l’IC chronique. Mais leur utilisation ne se limite pas au domaine de l'insuffisance cardiaque : évaluation du pronostic de morbimortalité dans le syndrome coronarien aigu, évaluation du pronostic et stratification du risque en prévention primaire chez les patients à risque cardiovasculaire (hypertendus, diabétiques, obèses…), évaluation du pronostic des pathologies pulmonaires avec retentissement cardiaque (HTA pulmonaire, embolie pulmonaire) et de celui d’autres pathologies non ischémiques (sepsis, myocardite, insuffisance rénale), détection d'une altération cardiaque suite à une chimiothérapie cardiotoxique. À noter que les concentrations de BNP et de NT-proBNP varient avec l'âge, le sexe et l'IMC.
L'AVIS DE LA HAS (1)
Pas de troponine dans l'insuffisance cardiaque
Le dosage de la troponine "n’est pas indiqué dans la prise en charge de l’insuffisance cardiaque chronique car son utilité clinique n’est actuellement pas démontrée" (2). Et ce bien que la troponine soit un marqueur pronostique de morbi-mortalité dans l’insuffisance cardiaque chronique (plus la concentration en troponine est élevée, plus le risque d’événements indésirables est grand). En effet, la valeur seuil n'est pas déterminée, les approches diagnostiques et thérapeutiques en fonction des résultats ne sont pas définies, et la valeur ajoutée par rapport aux peptides natriurétiques n'est pas connue.
BNP et NT-proBNP : oui mais…
-› Pour la HAS, "le dosage des peptides natriurétiques peut être indiqué dans le diagnostic initial de l’insuffisance cardiaque chronique lorsque la symptomatologie est atypique. Des concentrations inférieures à 100 ng/l pour le BNP et à 300 ng/l pour le NT-proBNP rendent peu probable ce diagnostic".
-› Concernant la stratification du risque et le pronostic dans l'insuffisance cardiaque, il existe une corrélation entre les concentrations en peptides natriurétiques et le pronostic. Cependant, les modalités pratiques d’utilisation n'étant pas encore bien déterminées et l’impact du résultat sur la prise en charge des patients n’étant pas assez documenté, "il n’est pas indiqué de doser les peptides natriurétiques dans le seul but d’établir un pronostic".
-› Autres situations dans lesquelles le dosage des peptides natriurétiques n'est pas indiqué : le dépistage en routine de la dysfonction ventriculaire gauche dans des populations asymptomatiques sans facteur de risque d’IC ou à haut risque d’IC. Pour ces dernières (sujets asymptomatiques à haut risque d'IC), l'examen de choix pour dépister la dysfonction ventriculaire gauche est la mesure de la fraction d'éjection ventriculaire.
-› Dans le cadre du suivi et de l'adaptation thérapeutique de l’insuffisance cardiaque chronique, "plusieurs situations doivent être distinguées :
– chez l’insuffisant cardiaque chronique stable sous traitement optimal, la répétition du dosage des peptides natriurétiques n’est pas indiquée.
– en cas de suspicion clinique de décompensation de l’insuffisance cardiaque chronique, le dosage des peptides natriurétiques peut aider à orienter la démarche diagnostique et thérapeutique. Si l’on dispose d’une valeur mesurée chez le patient stable, seule sera considérée comme significative une augmentation de la concentration d’au moins 50 %.
– devant un tableau clinique typique de décompensation, une consultation cardiologique ou une hospitalisation s’impose dès que possible, sans réalisation préalable d’un dosage des peptides natriurétiques".
-› Enfin, compte tenu des différences entre le BNP et le NT-proBNP, il est nécessaire "de bien distinguer les deux peptides et, dans le cas du suivi d’un patient donné, de toujours prescrire le même peptide natriurétique, dosé dans le même laboratoire (même analyseur) et dans les plus brefs délais après le prélèvement".
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