Tout sujet ayant un LDL-cholestérol › 1,60 g/l (4,1 mmol/l), ainsi que tout sujet ayant au moins un facteur de risque cardiovasculaire (voir tableau 1), doit bénéficier d’une prise en charge diététique, afin de modifier son mode de vie et son alimentation.
Le traitement diététique sera toujours associé à des conseils d’activité physique régulière (lire encadré) et bien entendu, la prise en charge des facteurs de risque associés est nécessaire : tabagisme, diabète de type 2, HTA.
- En prévention primaire, le traitement diététique sera proposé en monothérapie pour une période minimum de trois mois. Il sera poursuivi même si l’objectif thérapeutique est atteint. La négociation d’objectifs simples, peu nombreux et adaptés à chaque patient, est la clé du succès et de la pérennisation du régime diététique. Si l’objectif thérapeutique n’est pas atteint au-delà de trois mois d’un régime diététique bien conduit, une thérapeutique médicamenteuse visant à obtenir une diminution supplémentaire du LDL-cholestérol, doit être instituée, en complément du traitement diététique.
- Le patient à haut risque cardiovasculaire en prévention secondaire ou à risque équivalent, relève d’un traitement médicamenteux hypolipémiant associé à la prescription diététique et à la correction des autres facteurs de risque (sédentarité, tabagisme, surpoids…). On commencera par une posologie faible et de l’augmenter par la suite en fonction de l’efficacité et de la tolérance. La règle générale est d’obtenir des concentrations de LDL-cholestérol inférieures à 1 g/l (2,6 mmol/l). Pour certains patients en prévention secondaire coronaire, des données récentes seraient en faveur d’un objectif thérapeutique plus bas sous traitement (stratégie dite « intensive »). Le rapport bénéfice/risque de cette stratégie « intensive » doit être évaluée précisémen car l’utilisation de fortes doses de statine est associée à un risque musculaire et/ou hépatique plus important.
MODALITES DE REALISATION DU BILAN LIPIDIQUE
Le bilan lipidique doit être fait après douze heures de jeûne.
En cas de valeurs anormales, une confirmation est indispensable.
- Le bilan en première intention doit consister en une EAL (Exploration d’une Anomalie Lipidique) comportant la détermination des concentrations du cholestérol total, des triglycérides et du HDL-cholestérol par une méthode adéquate, afin de permettre le calcul du LDL-cholestérol par la formule de Friedewald, si la triglycéridémie est inférieure à 4 g/l (4,6 mmol/l) :
LDL-cholestérol (g/l) = cholestérol total (g/l) – HDL-cholestérol (g/l) – triglycérides (g/l) / 5
LDL-cholestérol (mmol/l) = cholestérol total (mmol/l) – HDL-cholestérol (mmol/l) – triglycérides (mmol/l) / 2,2
Si les triglycérides sont ≥ 4 g/l (4,6 mmol/l), quel que soit le niveau du cholestérol total, le LDL-cholestérol ne peut être calculé (un dosage direct du LDL-cholestérol est possible) : on est en présence d’une hypertriglycéridémie (plus rarement d’une hyperlipidémie mixte) devant faire l’objet d’une prise en charge adaptée.
- Chez un patient sans facteur de risque, le bilan lipidique suivant sera considéré comme normal : LDL-cholestérol < 1,60 g/l (4,1 mmol/l), triglycérides < 1,50 g/l (1,7 mmol/l) et HDL-cholestérol › 0,40 g/l (1 mmol/l).
Il n’est pas justifié de répéter le bilan, sauf en cas d’apparition d’un facteur de risque cardiovasculaire. En l’absence d’un changement des habitudes alimentaires ou d’une intervention médicamenteuse spécifique, d’un événement cardiovasculaire ou d’une augmentation du poids, la répétition d’un bilan lipidique plus d’une fois tous les cinq ans n’est pas justifiée.
PRISE EN CHARGE NUTRITIONNELLE DU PATIENT DYSLIPIDEMIQUE
Les modifications du régime alimentaire ont pour but essentiellement la diminution de la consommation des graisses d'origine animale (acides gras saturés) et la correction pondérale si nécessaire. Elles doivent être présentées sous forme positive. Aux recommandations, s’ajoute la nécessité de limiter la consommation d’alcool, de contrôler le poids et de corriger une sédentarité excessive.
Bases de la prise en charge nutritionnelle
- La diminution des apports en graisses saturées (beurre, fromages, viandes grasses, charcuterie) est l'objectif principal. Les graisses insaturées entraînant une diminution du cholestérol total et du LDL-cholestérol, sont donc autorisées dans le régime des patients hypercholestérolémiques. Les graisses insaturées sont de deux types : polyinsaturées (huiles de tournesol, maïs, colza et margarines préparées avec ces huiles) et mono-insaturées (huiles d'olive et de colza surtout). Les apports lipidiques ne doivent toutefois pas dépasser 30% de la ration calorique.
- Même s'il représente une très faible proportion du cholestérol total présent dans l'organisme, le cholestérol alimentaire joue un rôle qualitatif important : il existe une relation entre la concentration sanguine de cholestérol et la consommation alimentaire en cholestérol, surtout chez les patients hypercholestérolémiques. Il convient de diminuer l'apport alimentaire de cholestérol autour de 300 mg/j. Le cholestérol se trouve surtout dans le jaune d’œuf, le beurre, les abats (de 150 à 2000 mg de cholestérol pour 100 g). Quant aux viandes, à la charcuterie, aux laitages non écrémés, ils contiennent environ de 70 à 110 mg de cholestérol pour 100 g de produit.
Néanmoins, il faut retenir que l'influence du cholestérol alimentaire est variable selon les individus et reste le plus souvent nettement inférieure à celle des graisses saturées. La priorité reste donc la diminution des graisses saturées.
- L'apport glucidique doit compenser la réduction calorique liée à la restriction lipidique. Les glucides complexes seront préférés aux sucres raffinés. Les apports totaux doivent atteindre 50-55% de la ration calorique totale. Des apports glucidiques élevés ont été associés à des hypertriglycéridémies et à une diminution des concentrations de HDL-cholestérol. L'apport de certaines fibres alimentaires de l'ordre de 20 à 50 g/jour (son d'avoine, gomme guar, fibres de soja...) peut améliorer le profil lipidique.
- Les fruits et légumes sont des sources importantes de vitamines et de fibres alimentaires contribuant à la diminution de l’index glycémique. Des études d’observation ont montré une incidence moindre des accidents coronaires ou vasculaires cérébraux chez les consommateurs habituels de fruits et légumes. Cependant, ces résultats ne démontrent pas formellement, comme un essai d’intervention randomisé, les bénéfices cardiovasculaires des fruits et légumes. Leur apport doit être contrôlé dans les hypertriglycéridémies car le fructose stimule la synthèse des triglycérides.
- Les produits enrichis en stérols végétaux (margarines, spécialité laitière…), qui ont l’agrément de l’Afssa (Agence française de sécurité sanitaire des aliments) et administrés à la dose de 2 g, les stérols végétaux abaissent le LDL-cholestérol d’environ 10%. Ils permettent ainsi à eux seuls, une diminution équivalente à celle obtenue avec le régime classique. Les autres approches possibles sont l’utilisation de fibres (psyllium, bêta-glucan…) ou de soja. Ces approches sont complexes en pratique et justifient un avis spécialisé. Ces mesures sont additives, la diminution totale du LDL-cholestérol pouvant atteindre 30%. Aucune de ces mesures n’a été testée dans des essais d’intervention évaluant le degré d’athérosclérose ou les événements cliniques.
- Les huiles de poisson provenant des mers froides (riches en acides gras DHA et EPA) ont des propriétés hypotriglycéridémiantes. La consommation d’EPA et de DHA diminue les triglycérides plasmatiques et, à un moindre degré, le HDL-cholestérol. Ils diminuent également la pression artérielle et la survenue d'arythmies et améliorent l’hémostase. Une consommation régulière de poisson (deux à trois fois par semaine) est recommandée. Ces objectifs sont atteints en substituant en partie les graisses d'origine animale par des graisses d'origine végétale et par le poisson.
- La consommation de suppléments vitaminiques n'apporte pas d'avantages pour le contrôle des niveaux des lipoprotéines et la protection cardiovasculaire.
- Dans la population, la relation entre la consommation d’alcool et la mortalité est en forme de U ou en J. La consommation optimale est comprise entre 10 à 30 g d’alcool par jour chez l’homme et 10 à 20 g/j chez la femme. La diminution de la mortalité coronaire est la principale cause de réduction de la mortalité sans évidence d'un bénéfice supérieur d'une boisson. En revanche, la consommation aiguë est associée à un risque accru de mort subite et d’accident cérébrovasculaire. Aucune étude randomisée n’a prouvé le bénéfice de l’alcool sur la morbi-mortalité cardiovasculaire. L'apport d'alcool doit être contrôlé dans les hypertriglycéridémies, l'hypertension artérielle et le surpoids.
- Le sel n'a pas d'impact sur les lipides plasmatiques de sodium, mais il influence les niveaux de pression artérielle. Une méta-analyse des essais randomisés d’une durée supérieure à six mois portant sur la consommation de sel, a montré une diminution de la pression artérielle systolique et diastolique de 1,1 et 0,5 mmHg chez les sujets normotendus et de 1,5 et 0,7 chez les patients hypertendus. De plus, les études d’interventions communautaires ont montré qu’une réduction des apports en sel s’accompagnait d’une diminution de la pression artérielle dans la communauté.
- La recherche d'un poids satisfaisant est un objectif prioritaire dans les dyslipidémies, particulièrement dans les formes mixtes et dans l'hypertriglycéridémie isolée.L'indice de masse corporelle ou IMC (poids/taille 2) devrait demeurer, si possible, inférieur à 25 kg/m2 chez les patients dyslipidémiques. La diminution du poids s’accompagne généralement d'une diminution modérée de la cholestérolémie et d’une diminution plus franche de la triglycéridémie. Chez le patient obèse, l'amaigrissement s'accompagne d'une augmentation de la concentration de HDL-cholestérol circulant. La perte de poids est obtenue en diminuant les apports caloriques et en augmentant l’activité physique. La diminution des apports caloriques est concentrée sur les aliments de haute densité énergétique, tels que les lipides alimentaires (9 kcal/g) et l’alcool (7 kcal/g).
- L’activité physique facilite la perte de poids et le maintien après amaigrissement. Une perte de poids de 10 % en six mois est un objectif réaliste. Lorsque la perte de poids est achevée, l’objectif devient le maintien d’un poids stable. Pour cela, les aliments riches en lipides devront être remplacés par des légumes, des fruits et des produits céréaliers.
Traitement diététique de l'hypercholestérolémie
L'hypercholestérolémie justifie, dans un premier temps, une intervention diététique. Cette intervention diététique s'applique également aux sujets âgés, en prenant certaines précautions liées au statut nutritionnel à cet âge.
Il est conseillé aux patients hypercholestérolémiques :
- de remplacer le beurre par des huiles végétales (mono et poly-insaturées essentielles), par des margarines « molles » qui ne sont pas en emballage papier (car saturées) ou par des produits enrichis en stérols végétaux ;
- d'éviter la charcuterie, à l'exception du jambon maigre ;
- de privilégier le poisson aux dépens de la viande ;
- de limiter la consommation des produits laitiers les plus riches en graisses ;
- de ne pas consommer plus de deux œufs par semaine ;
- d'assurer un apport suffisant en fibres, en privilégiant la consommation de fruits, de légumes, de pain, céréales et de féculents ;
- la consommation d'alcool est acceptable (< 30 g/j). Toutefois, l'apport d'alcool doit être contrôlé dans les hypertriglycéridémies (et le surpoids).
Il est important de ne pas créer de déséquilibre alimentaire, notamment en calcium.
Traitement diététique de l’hypertriglycéridémie et des hyperlipidémies
En France, l'hypertriglycéridémie est fréquemment associée à la consommation excessive d'alcool et à l'existence d'un syndrome plurimétabolique.
- L'alcool entraîne une augmentation de la synthèse des triglycérides, mais la sensibilité des sujets à l'alcool apparaît très variable. Le diagnostic d’hypertriglycéridémie alcool-dépendante est réalisé par une épreuve d'abstinence de boissons alcoolisées : une diminution claire des concentrations des triglycérides suggère fortement une hypertriglycéridémie alcool-dépendante. Cette forme représente environ 10% des patients hypertriglycéridémiques.
- Dans le cadre du syndrome plurimétabolique, les patients sont le plus souvent porteurs d’une hyperlipidémie mixte, ou quelquefois d'une hypertriglycéridémie isolée. L'attitude diététique est identique à celle proposée dans les hyperlipidémies mixtes.
- Par rapport aux grandes lignes du traitement de l'hypercholestérolémie, il convient d'insister sur :
- la suppression de l'alcool et la limitation des fruits (sensibilité croisée entre fructose et alcool) ; la réalisation d’un test diagnostique d’abstinence de boissons alcoolisées durant cinq à sept jours évalue la susceptibilité de la triglycéridémie à la consommation de boissons alcoolisées ;
- la limitation nette des sucres simples ;
- la restriction calorique en cas d’excès pondéral.
Dans les cas d'hyperlipidémies mixtes, il faut particulièrement insister sur la correction de la surcharge pondérale lorsqu'elle existe et sur la pratique régulière d'un exercice physique d’intensité modérée.
Chez les patients diabétiques de type 2, présentant fréquemment une hyperlipidémie mixte, la réduction pondérale améliore l'équilibre glycémique et la dyslipidémie secondaire qui lui est fréquemment associée. Il est important de contrôler l'insulino-résistance et de réévaluer le bilan lipidique après équilibration de la glycémie, qui contribue à abaisser le taux des triglycérides.
Mise au point
Troubles psychiatriques : quand évoquer une maladie neurodégénérative ?
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
Recommandations
Antibiothérapies dans les infections pédiatriques courantes (2/2)