Gastro-entérologie

LA LINITE GASTRIQUE

Publié le 24/10/2022
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La linite gastrique est un adénocarcinome rare qui infiltre la paroi gastrique. Sur un plan clinique, les troubles dyspeptiques dominent le tableau. La prise en charge est préférentiellement la chirurgie.

Crédit photo : Dr Frances

Carmen, 67 ans, consulte car, depuis quelques semaines, elle a des difficultés à digérer.

Elle a remarqué être dans l’obligation de fractionner ses repas depuis deux mois.

Elle ne peut plus faire un repas classique sous peine d’avoir une dyspepsie, voire de vomir.

Par ailleurs, malgré le fractionnement des repas pour éviter ce problème digestif, elle accuse une perte de poids de 5 kg en 3 mois.

Sur un plan clinique, nous objectivons la présence d’une douleur vive lors de la palpation au niveau du creux épigastrique.

Compte tenu de cette symptomatologie, nous avons prescrit un scanner abdominal qui a objectivé un épaississement de 40 mm de grand axe de la paroi gastrique, ainsi que la présence d’adénopathies au niveau péri-­gastrique.

Dans ce contexte, Carmen a été adressée au gastro-entérologue pour effectuer une fibroscopie gastrique. Les différentes biopsies réalisées au cours de cet examen ont permis de poser le diagnostic de linite gastrique.

INTRODUCTION

La linite gastrique est une forme d’adénocarcinome diffus infiltratif car il envahit les différentes couches de la paroi gastrique. Les premières descriptions ont été effectuées au milieu du 19e siècle par William Brinton, qui avait mis en évidence un épaississement de la musculeuse de l’estomac.

Le terme de linite provient de l’aspect microscopique en bande (linitis) de cette tumeur.

Cette entité représenterait 10 % des cancers gastriques. Elle s’observe chez les patients préférentiellement de sexe féminin et le plus souvent jeunes (moins de 40 ans), mais la prévalence exacte reste difficile à évaluer.

ORIGINE

La linite gastrique touche principalement les patients d’origine américaine et asiatique.

On note parfois une prédisposition génétique avec la présence du gène PSCA (à l’origine de la régulation de la prolifération des cellules épithéliales gastriques) et également une mutation du gène de la cadhérine E, ces deux éléments semblant impliqués dans la genèse des cas familiaux de cette pathologie.

Des facteurs alimentaires (régime pauvre en fibres) semblent également être impliqués dans l’origine de cette tumeur digestive.

SYMPTOMATOLOGIE

On observe le plus souvent une altération de l’état général, asthénie, perte de poids, et des manifestations digestives comme une dyspepsie dans 55 % des cas, une dysphagie qui est parfois progressive dans 33 % des cas, des nausées ou vomissements, des douleurs épigastriques.

Dans certains cas évolués, on peut objectiver des hémorragies digestives plus ou moins importantes. Une péritonite en cas de perforation est également possible.

Mais l’importance des manifestations cliniques observées survient souvent à la suite d’une progression du processus néoplasique.

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

Le scanner abdominal comme l’écho-endoscopie permettent d’objectiver un épaississement pariétal qui est supérieur à 2 cm mais aussi la présence d’une rigidité et d’une perte des gros plis.

L’endoscopie est contributive à ce diagnostic dans 50 % des cas car l’atteinte est profonde et que, superficiellement, on ne décèle pas toujours d’anomalie particulière.

Malgré tout, l’aspect de la paroi rigide cartonnée et de couleur blanche lors de la réalisation de la fibroscopie gastrique peut orienter le clinicien.

Malgré cette faible sensibilité, cet examen est indispensable car, par réalisation de biopsies, il est possible de poser de manière certaine le diagnostic.

L’examen histologique permet d’établir le diagnostic avec mise en évidence d’une fibrose importante, une prolifération glandulaire maligne et, au niveau du stroma qui est épaissi, des cellules en bague à chaton qui donnent l’aspect rigide de la paroi gastrique.

PRISE EN CHARGE

Elle reste préférentiellement le traitement chirurgical, qui n’est possible que dans 20 % des cas du fait d’un retard diagnostique. Le plus souvent, une diffusion de cette néoplasie au niveau péritonéal ou ganglionnaire est mise en évidence.

Il est fréquent de recourir à une chimiothérapie (cisplatine) comme alternative à la chirurgie, laquelle est dans certains cas couplée à la radiothérapie.

Cependant, malgré ces différentes possibilités thérapeutiques proposées, la linite gastrique présente un très mauvais pronostic, avec un taux de survie qui est inférieur à 10 % au bout de 5 ans de prise en charge.

Dr Pierre Francès (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Dr Neil Metcalfe (médecin généraliste, programme Hippokrates, York, UK), Widad Gallaf (interne en médecine générale à Montpellier), Madeleine Stoumen (externe à Montpellier)

BIBLIOGRAPHIE
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Source : Le Généraliste