J’EXPLIQUE
• Dans l’ancestrale médecine ayurvédique, le nettoyage nasal fait partie de l’hygiène corporelle quotidienne. Il a été adapté à la médecine moderne pour la prise en charge de diverses affections rhinosinusiennes : rhinosinusite chronique, rhinite allergique, infection des voies respiratoires supérieures (IVRS).
• Plusieurs compositions sont disponibles : sérum physiologique, eau de mer iso- ou hypertonique, adjonction de différents minéraux ou antiseptiques locaux…
Les méthodes d’administration sont également variables : gouttes, pulvérisations, aérosols, lavage à grand volume (100 à 250 ml par côté) via des contenants type pot néti ou seringue.
• Le mécanisme combine probablement l’effet de détersion (mucus, croûtes, débris, allergènes…), l’effet de dilution des médiateurs inflammatoires et aussi l’amélioration de la clairance mucociliaire via l’augmentation de la fréquence de battement des cils.
• Des propriétés particulières seraient alléguées aux composés des produits commercialisés. Le calcium améliorerait le battement ciliaire contrairement au sodium ; le potassium favoriserait la réparation de l’épithélium respiratoire ; le magnésium et le zinc seraient anti-inflammatoires et anti-apoptotiques pour les cellules épithéliales. Le bicarbonate diminuerait la viscosité du mucus. Un pH légèrement alcalin améliorerait, au moins in vitro, le battement ciliaire [16, 17]. Pourtant, les méta-analyses [6, 7, 12] ne mettent pas en évidence la supériorité d’une solution sur une autre en termes de composition, concentration ou méthode d’administration.
JE MONTRE
J’INFORME
• C’est dans la rhinosinusite chronique [1, 5, 6] que les preuves de l’efficacité des irrigations nasales sont les plus solides. Dans une revue Cochrane [6], le lavage (seul ou adjuvant) était supérieur au placebo sur l’amélioration des symptômes et la qualité de vie [3]. Dans les études les mieux construites, les solutions nasales utilisées quotidiennement semblent diminuer l’utilisation des antibiotiques et corticoïdes par voie nasale. Ces résultats sont significativement associés à l’emploi des irrigations de grands volumes, par opposition aux vaporisations nasales [8]. Le bénéfice semble plus évident encore chez les travailleurs exposés, type travailleurs du bois [18].
• Dans la rhinite allergique, l’association d’une solution nasale à un anti-H1 a entraîné une réduction plus importante des symptômes allergiques que l’anti-H1 seul. Une autre étude, moins puissante [19], montrait un moindre recours aux anti-H1 en pédiatrie.
• Dans les IVRS, la réduction de la durée des symptômes pourrait être réduite… de 0,3 jour [12], pour une durée moyenne de 8 jours (!). L’intérêt du lavage nasal en prévention des IRVS n’est pas démontré. Quoi qu’il en soit, c’est le traitement ayant le profil de sécurité le plus favorable.
JE PRESCRIS
• Le lavage nasal commence par le mouchage de nez. Il faut toujours moucher une narine après l’autre pour limiter le risque de traumatisme sinusien et tympanique [14].
• Chez l’adulte, les gouttes doivent être instillées en position latérale, tête basse, afin de gagner le méat moyen où débouchent les sinus antérieurs.
• Chez le nourrisson, le lavage a lieu avant le repas, en décubitus dorsal, la tête tournée d’un côté. Dans la bronchiolite aiguë, aucune étude ne permet de recommander un produit autre que le sérum physiologique.
• Le Collège Français des Enseignants en ORL et Chirurgie Maxillo-Faciale [14] propose de préparer « artisanalement » son propre mélange avec 1 l d’eau minérale ou du robinet + 2 cuillers à café de gros sel de cuisine+ 1 cuiller à café de bicarbonate de soude. Le mélange doit être utilisé tiède, et peut se conserver 1 semaine.
J’ALERTE
• La tolérance du lavage nasal est excellente. Seuls 10 % des patients rapportent des effets indésirables, le plus souvent transitoires et bénins.
• En 2011 ont été rapportés 2 décès en Louisiane [13] suite à l’utilisation de « pots néti » remplis d’eau du robinet. La cause du décès était dans les 2 cas une méningoencéphalite amibienne à N. fowleri due à un dysfonctionnement des canalisations/chauffe-eau des victimes. Il avait donc été conseillé par les autorités américaines de ne pas utiliser l’eau du robinet mais uniquement de l’eau embouteillée, ou stérile, ou bouillie.
JE RENVOIE SUR LE WEB
Bibliographie
1- Société Française d’ORL. Prise en charge des rhinites chroniques. Texte long. 2005. Disponible sur http://www.orlfrance.org/download.php?id=69
2- Rabago D, Guerard E, Bukstein D. Nasal irrigation for chronic sinus symptoms in patients with allergic rhinitis, asthma, and nasal polyposis: a hypothesis generating study. WMJ. 2008 Apr;107(2):69-75
3- Rabago D, Zgierska A, Mundt M, Barrett B, Bobula J, Maberry R. Efficacy of daily hypertonic saline nasal irrigation among patients with sinusitis: a randomized controlled trial. The Journal of family practice. 2002;51(12):1049-55
4- Tomooka LT, Murphy C, Davidson TM. Clinical study and literature review of nasal irrigation. Laryngoscope. 2000 Jul;110(7):1189-93
5- Rabago D, Zgierska A. Saline Nasal Irrigation for Upper Respiratory Conditions. American family physician. 2009;80(10):1117-1119.
6- Harvey R, Hannan SA, Badia L, Scadding G. Nasal saline irrigations for the symptoms of chronic rhinosinusitis. Cochrane Database Syst Rev. 2007 Jul 18;(3):CD006394. Review. Update in: Cochrane Database Syst Rev. 2016;4:CD006394. PubMed PMID: 17636843.
7- King D, Mitchell B, Williams CP, Spurling GKP. Saline nasal irrigation for acute upper respiratory tract infections. Cochrane Database of Systematic Reviews 2015, Issue 4. Art. No.: CD006821. DOI: 10.1002/14651858.CD006821.pub3. Version française ici http://www.cochrane.org/fr/CD006821/irrigation-nasale-avec-une-solution…
8- Pynnonen MA, Mukerji SS, Kim HM, Adams ME, Terrell JE. Nasal saline for chronic sinonasal symptoms: a randomized controlled trial. Arch Otolaryngol Head Neck Surg. 2007 Nov;133(11):1115-20.
9- Hermelingmeier KE, Weber RK, Hellmich M, Heubach CP, Mösges R. Nasal irrigation as an adjunctive treatment in allergic rhinitis: a systematic review and meta-analysis. Am J Rhinol Allergy. 2012 Sep-Oct;26(5):e119-25. Disponible sur https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3904042/
10- Braun J-J, et al. Recommandations pour le diagnostic et la prise en charge de la rhinite allergique (épidémiologie et physiopathologie exclues) -Texte long. Rev Mal Respir 2010 ;27 :S79-S105.
11- Fournier JP, Rousseau R. Efficacité des irrigations nasales au sérum salé dans la rhinopharyngite aiguë de l’enfant âgé de 3 mois à 12 ans. FExercer, 2016, 124, supp 1, S16-S17
12- Kassel JC, King D, Spurling GK. Saline nasal irrigation for acute upper respiratory tract infections. Cochrane database of systematic reviews (Online). 2010;(3):CD006821.
13- Yoder J, Straif-Bourgeois S, Roy S et coll. Primary amebic meningoencephalitis deaths associated with sinus irrigation using contaminated tap water. Clin Infect Dis. (2012) doi: 10.1093/cid/cis626
14- Collège Français des Enseignants en ORL et Chirurgie Maxillo-Faciale. Connaître et savoir expliquer les gestes à effectuer lors d'un traitement nasal local. Disponible sur http://www.orlfrance.org/college/Objectifs/53.htm
15- Gardin G. Le lavage de nez. De la théorie à nos pratiques. Diplôme universitaire de kinésithérapie respiratoire. 2012. Disponible sur http://spiralconnect.univ-lyon1.fr/spiral-files/download?mode=inline&da….
16- Le Taillandier de Gabory L. L’irrigation nasale en rhinologie : que penser ? que faire ? Symposium. Congrès de Médecine Générale France. 27 mars 2015, Paris.
17- Marro M. Optimisation des lavages de nez chez le nourrisson et l’enfant. Symposium respiratoire d’Aquitaine. 2016. Disponible sur http://aquirespi.fr/fcsante/_pages/sympo/8.pdf
18- Holmstrom M, Rosen G, Walander L. Effect of nasal lavage on nasal symptoms and physiology in wood industry workers. Rhinology. 1997;(35):108–112
19- Garavello W, Romagnoli M, Sordo L, Gaini RM, Bernardino C, Angrisano A. Hypersaline nasal irrigation in children with symptomatic seasonal allergic rhinitis: a randomized study. Pediatric allergy and immunology. 2003;14:140–143.
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